Allemagne : les émissions de CO2 en nette baisse grâce à un fort recul du recours au charbon

Par latribune.fr  |   |  681  mots
La baisse des émissions en Allemagne est « largement attribuable à une forte diminution de la production d'électricité à partir de charbon ». (Crédits : Wolfgang Rattay)
Les émissions de CO2 de l'Allemagne, première nation industrielle d'Europe, ont atteint leur niveau le plus bas depuis environ 70 ans, grâce au recul plus fort qu'attendu du recours au charbon. Le pays a néanmoins encore du chemin à faire pour atteindre son objectif d'une réduction de 65% d'ici 2030.

Après une année 2022 sous le signe d'une forte consommation de charbon, les émissions de gaz à effet de serre de l'Allemagne ont atteint 673 millions de tonnes de CO2, soit « le plus bas niveau depuis les années 1950 » en 2023, selon les calculs du groupe d'experts Agora Energiewende. Il s'agit donc d'une nette baisse par rapport aux 746 millions de tonnes de 2022.

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Forte baisse de la consommation de charbon

L'Allemagne fait mieux que l'objectif annuel d'un maximum de 722 millions de tonnes de CO2, inscrit dans la loi allemande sur la protection du climat, explique cet organisme de référence.

Plusieurs raisons à cela : la consommation d'énergie en Allemagne a globalement diminué de 3,9% sur un an, reflétant les difficultés du secteur industriel. Les émissions du secteur industriel ont diminué de 20 millions de tonnes, soit 12% sur un an. En outre, le pays a importé en 2023 davantage d'électricité, constituée pour moitié d'énergies renouvelables et pour un quart d'énergie nucléaire, note le groupe de réflexion.

L'autre facteur qui a joué est structurel : l'Allemagne poursuit son virage énergétique avec une production d'électricité toujours plus basée sur les énergies renouvelables. La part de l'électricité produite à partir de ces énergies, éolien et solaire principalement, a représenté 55% l'an dernier, contre 48% en 2022, a indiqué mercredi l'Agence fédérale des réseaux. La part du charbon dans le bouquet de production est tombée à 26% contre près de 34% en 2022. Alors que le recours au charbon avait augmenté en 2022 pour compenser l'arrêt des flux de gaz russe vers l'Allemagne, sa combustion est retombée l'an dernier à son niveau des années 1960. La baisse des émissions est donc surtout « largement attribuable à une forte diminution de la production d'électricité à partir de charbon », note le groupe d'experts. Le gouvernement allemand compte atteindre 80% d'électricité renouvelable dans la consommation brute d'électricité d'ici à 2030, un objectif jugé ambitieux.

A noter cependant, le logement et le transport ont en revanche vu leurs émissions « quasiment stagner », échouant ainsi respectivement pour la quatrième et la troisième année à remplir les objectifs climatiques, souligne par ailleurs Agora Energiewende. Pour les atteindre, l'Allemagne a besoin d'une « offensive d'investissements »pour moderniser le chauffage des bâtiments comme l'industrie, soulignent les experts. Ils estiment que seulement 15% de la baisse des émissions en 2023 a un caractère « durable », s'inscrivant dans le long terme. Si les émissions ont été de 46% inférieures à l'année de référence 1990, le pays a encore du chemin à faire atteindre son objectif d'une réduction de 65% d'ici 2030.

La France progresse aussi

En France, aussi, on note des progrès. De janvier à fin septembre 2023, les émissions de CO2, méthane et protoxyde d'azote notamment ont diminué de 4,6%, hors puits de carbone comme les sols ou les forêts, par rapport à la même période de 2022, selon les pré-estimations publiées fin décembre par le Citepa, l'organisme mandaté pour réaliser l'inventaire français des émissions. Ce recul survient après une baisse de 4,3% déjà observée sur le premier semestre, elle-même consécutive à un repli de 2,7% sur l'ensemble de 2022.

« Trois secteurs participent le plus à cette baisse (sur neuf mois): l'industrie (-9,3%), la production d'énergie (-9,4%) et les bâtiments (-7,5%) », souligne le Citepa dans un communiqué. Les transports, secteur le plus émetteur, « contribuent plus modestement à cette tendance à la baisse (-1,8%) », ajoute l'organisme. « Beaucoup a été fait, mais beaucoup reste à faire et des marges d'amélioration existent », a reconnu Agnès Pannier-Runacher, ministre de la Transition énergétique. En juin, le Haut Conseil pour le climat avait estimé que la baisse des émissions de la France était encore « insuffisante » au regard de ses objectifs et des retards accumulés. Plusieurs associations fustigent également le fait que les diminutions enregistrées depuis un an ne seraient dues qu'à des facteurs conjoncturels (crise en Ukraine, météo clémente, recul du pouvoir d'achat liée à l'inflation) et non à des efforts suffisants de transformations structurelles.

(avec AFP)