Budget italien : Juncker ne veut pas d'une nouvelle crise de la dette en zone euro

Par latribune.fr  |   |  737  mots
En brandissant le spectre d'une nouvelle crise de la dette dans la zone euro, le président de la Commission européenne Jean-Claude Juncker a averti l'Italie contre sa trajectoire budgétaire. (Crédits : Reuters)
Réunis à Luxembourg, les ministres des Finances de la zone euro ont accentué lundi 1er octobre la pression sur l'Italie pour qu'elle respecte les règles budgétaires de l'Union européenne, tandis que Rome accusait Bruxelles de "terrorisme sur les marchés financiers". Le déficit italien devrait en effet atteindre 2,4% du PIB en 2019, ce qui ne permettra pas de remplir les objectifs de réduction de la dette publique.

Quatre jours après la décision de la coalition populiste au pouvoir en Italie de creuser son déficit public davantage que prévu, l'inquiétude grandissait à Bruxelles et sur les marchés. Le président de la Commission européenne Jean-Claude Juncker et plusieurs autres dirigeants européens ont mis en garde l'Italie, le 1er octobre, contre son projet de budget pour 2019 que les instances de Bruxelles jugent incompatible avec les objectifs de réduction de la dette publique.

Bien que la coalition M5S/Ligue n'ai pas encore publié le document détaillant ses objectifs financiers et économiques pour la période 2018-2021, elle table sur un déficit de 2,4% du produit intérieur brut (PIB) pour les trois prochaines années.

Cette question du budget italien a été mise à l'agenda de la réunion des ministres des Finances de la zone euro à Luxembourg à la demande des grands argentiers français, Bruno Le Maire, et néerlandais, Wopke Hoekstra. Et une nouvelle réunion est programmée ce mardi autour du président du Conseil Giuseppe Conte, à 19h00.

La dette publique italienne représente 131% du PIB

En optant pour un déficit budgétaire de 2,4% du PIB sur les trois prochains exercices budgétaires, le nouveau gouvernement italien s'est forcément placé en porte à faux avec les engagements pris par le précédent gouvernement auprès de Bruxelles. En effet, le précédent gouvernement de centre gauche visait 0,8%, et le même chiffre en 2020 et 2021.

Pour Jean-Claude Juncker, il n'est pas question pour la zone euro de vivre une nouvelle crise de la dette, après celle provoquée par la Grèce, qui avait failli venir à bout de l'euro. Et pour cause : la dette publique italienne représente déjà 131% du PIB, soit le ratio le plus élevé en zone euro après la Grèce. Bruxelles demande donc à Rome de maintenir son déficit au plus bas et de réduire sa dette publique.

L'exécutif européen serait toujours en discussion avec le gouvernement italien qui doit présenter son projet de budget le 15 octobre prochain.

"L'Italie s'éloigne des objectifs budgétaires que nous avons approuvés en commun au niveau de l'UE (...) Nous devons être stricts et justes avec l'Italie pour éviter une nouvelle crise (...) Si l'Italie veut un traitement particulier supplémentaire, cela signifierait la fin de l'euro", a-t-il ajouté. Ce à quoi Giovanni Tria, le ministre des Finances italien, a rétorqué qu'il ne s'attendait pas à la fin de la monnaie unique, tout en rassurant ses homologues sur la réduction de la dette publique.

Rome accuse Bruxelles de "terrorisme sur les marchés financiers"

Pierre Moscovici, commissaire européen à l'économie, souhaite quand à lui maintenir le dialogue avec Rome tout en insistant sur le respect des règles budgétaires de l'Union. Le projet de budget italien ne les respecte "manifestement" pas, mais l'ampleur du décalage et "la façon de le combler" doivent être déterminés, a-t-il ajouté.

Dans le même temps, devant la presse à Rome, le vice-Premier ministre et chef du Mouvement 5 Etoiles (M5S, anti-système), Luigi Di Maio, s'est emporté contre Pierre Moscovici, l'accusant de "faire du terrorisme sur les marchés" financiers pour porter préjudice au gouvernement de Rome.

"Il y a des institutions européennes qui jouent à faire du terrorisme sur les marchés" financiers (...) Ce matin, de toute évidence, quelqu'un n'était pas content du fait que le spread n'avait pas grimpé. Un commissaire, M. Moscovici, s'est réveillé et a pensé à faire des déclarations contre l'Italie pour alimenter la tension sur les marchés."

Au lendemain de la présentation par le gouvernement populiste italien de son projet de budget le 28 septembre, le spread, soit l'écart entre le taux d'emprunt italien et celui allemand, a fortement grimpé, passant de 233 points le 26 septembre à 267 le 28, et dépassant les 280 points le 1er octobre, selon l'agence spécialisée RadioCor.

Et les propos dissonants de Claudio Borghi, spécialiste des questions économiques de la Ligue et président de la commission des Affaires budgétaires de la Chambre des députés, n'ont pas arrangé les choses ce mardi. En estimant que l'Italie réglerait la plupart de ses problèmes si elle avait justement sa propre monnaie nationale, il a fait monter les taux d'emprunts italiens à cinq à dix ans.

(avec AFP et Reuters)