Dans l'impasse sur le Brexit, Theresa May joue la carte du second référendum

Par Reuters  |   |  703  mots
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Theresa May a présenté mardi un nouveau compromis pour tenter de sortir de l'impasse sur le Brexit, offrant des concessions à l'opposition dont la possibilité d'un second référendum sur la sortie de l'Union européenne. Elle espère ainsi faire enfin ratifier l'accord qu'elle a conclu en novembre dernier avec Bruxelles, et que les députés ont rejeté par trois fois. Mais ses chances paraissent minces.

[Article publié le 22.05.2019 à 9h33, mis à jour à 12h46]

À deux jours d'une claque électorale annoncée aux élections européennes, Theresa May abat sa dernière carte. S'exprimant au siège du cabinet d'audit PricewaterhouseCooopers, la Première ministre britannique a demandé mardi aux députés de voter en faveur du projet de loi sur le retrait destiné à ratifier le divorce avec l'Union européenne (le Withdrawal Agreement Bill), leur assurant qu'ils pourraient ensuite l'amender en organisant un second référendum.

« Je reconnais la force sincère et authentique du sentiment de la Chambre sur cette question importante... (...) Le gouvernement intégrera donc en préambule du Withdrawal Agreement Bill l'obligation de voter sur la tenue ou non d'un second référendum. Cela doit avoir lieu avant que l'Accord de retrait soit ratifié », a-t-elle expliqué.

Pour tenter de rallier le maximum de députés en faveur de son nouveau plan, elle a également fait miroiter des arrangements douaniers avec l'Union européenne proches des souhaits du Labour, l'opposition travailliste avec laquelle elle a discuté jusqu'à la mi-mai, pendant un mois et demi, en vain.

Mais ses chances de le voir ratifier sont minces : de nombreux élus ont durci leur position et ont déjà annoncé qu'ils voteraient contre ce texte qu'elle soumettra aux Communes dans la semaine du 3 juin.

Les travaillistes fustigent (déjà) un "nouvel emballage"

Theresa May le sait : elle a besoin aujourd'hui d'un apport de voix travaillistes pour obtenir au Parlement une majorité favorable au projet de retrait. Mais en concédant trop au Labour, elle prend aussi le risque de se mettre à dos les conservateurs qui s'étaient ralliés à son camp.

Le chef du file du Parti travailliste, Jeremy Corbyn, a déjà exclu d'approuver la nouvelle offre de Theresa May, qu'il considère comme une "resucée" de celle que son parti a rejetée la semaine dernière. Pour sa part, le Parti unioniste démocrate (DUP) d'Irlande du Nord - dont May a aussi besoin pour s'assurer d'une majorité - a estimé que les "erreurs fatales" de l'accord original n'avaient pas disparu.

Simon Clarke, un élu tory qui a voté pour l'Accord de retrait lors du troisième vote sur le texte le 29 mars dernier, a déjà prévenu qu'il voterait contre la prochaine fois. Et l'ancien ministre David Jones a qualifié la déclaration de Theresa May "d'inacceptable" et a estimé que cette initiative qui intervient juste avant les élections européennes n'aura pour effet que de favoriser le Parti du Brexit de Nigel Farage.

Un changement de stratégie

En ouvrant la possibilité d'un second référendum et en proposant le maintien d'une forme d'union douanière avec l'UE - deux hypothèses qu'elle a écartées pendant des mois -, Theresa May pourrait compter sur le fait que le Parlement rejettera l'organisation d'une nouvelle consultation, et que sa proposition d'une union douanière "temporaire" restera assez peu solide pour satisfaire une partie des élus conservateurs.

Mais ces concessions soulignent aussi à quel point la stratégie préalablement déployée par la Première ministre - consistant à plaire d'abord aux partisans du Brexit - était vouée à l'échec. La question est de savoir désormais si ces concessions seront suffisantes pour convaincre le Labour.

La "fureur" des députés conservateurs

Le nouveau plan de Theresa May est plutôt mal reçu par la presse britannique. "Audacieux ? Il est encore pire que le précédent", titre The Independent, qui ajoute que cette tentative pour sauver le plan de sortie est vouée à l'échec devant l'accueil hostile des députés conservateurs et ceux de l'opposition.

Selon Le Telegraph, près de 68 députés auraient déjà fait savoir qu'ils voteraient "contre". Selon Laura Kuenssberg, chef du service politique de la BBC, certains membres du Parti conservateur souhaitent pousser Theresa May à la démission avant ce quatrième vote.

"Une nouvelle initiative, lancée par Nigel Evans, a pour but de pour faire tomber la Première ministre pour qu'elle ne puisse pas présenter le projet de loi (...) La situation s'est détériorée dans la nuit pour May", écrit-elle sur Twitter.