Alexis Tsipras : "Je suis fier de ma bataille et de mon gouvernement"

Par Sarah Belhadi  |   |  875  mots
Des élections législatives anticipées devraient probablement avoir lieu en Grèce le 20 septembre, a annoncé un responsable gouvernemental devant la presse, jeudi.
Alors que la Grèce a obtenu, hier mercredi, un premier versement du 3e plan d'aide lui permettant de rembourser sa dette de 3,2 milliards d'euros à la BCE, le Premier ministre a annoncé sa démission ce jeudi soir dans une allocution à la télévision et a convoqué de nouvelles élections, sans en préciser la date.

Article publié le 20 août à 17:11, actualisé à 20:33

Depuis quelques heures, la rumeur enflait. Plusieurs médias grecs rapportaient que le Premier ministre Alexis Tsipras devrait annoncer sa démission ce jeudi soir.

Quelques minutes après 20 heures, Tsipras s'est exprimé à la télévision publique pour annoncer des élections anticipées, sans pour autant préciser de date. S'adressant au peuple grec, il a tenté de justifier ses décisions et fait son mea culpa : "Nous ne sommes pas sortis de cette période difficile amorcée il y a cinq ans, mais on peut se battre pour y parvenir", a-t-il déclaré sur l'ERT.

Mea culpa

Très critiqué depuis le 13 juillet (date de l'accord avec les créanciers du pays), il a concédé au peuple grec que ce compromis ne reflétait pas ses promesses de campagne :

"Je veux être honnête vis-à-vis de vous : nous n'avons pas réussi à obtenir l'accord que nous souhaitions avant d'être élus en janvier (...) nous avons lutté et fait des compromis".

Tsipras explique alors que la Grèce, acculée par ses dettes, était contrainte d'accepter l'accord, et de s'y tenir :

"Cet accord, nous sommes obligés de le respecter, mais nous allons également nous battre pour en réduire les effets néfastes. On va faire en sorte de regagner notre souveraineté face aux créanciers."

Il s'est néanmoins félicité d'avoir obtenu un sursis de trois ans pour le pays, contre cinq mois initialement :

"Nous avons un accord sur trois ans. On nous demandait de faire de la casse, des privatisations, on exigeait également un déficit zéro pour les caisses de retraite et de sécurité sociale. (...) Nous avons malgré tout réussi à obtenir des exigences inférieures à celles de l'accord précédent".

Tout en nuançant son propos : "Nous avons gagné du terrain, ce qui ne veut pas dire que nous avons réussi à faire ce que le peuple voulait."

Le roseau plie, mais ne rompt pas: Tsipras déjà en campagne ?

Certes, Tsipras a annoncé qu'il remettait sa démission au président, mais son discours sonne d'ores et déjà comme une nouvelle entrée en campagne électorale.

En s'adressant au peuple grec, il les invite à choisir celui qui pourra engager les réformes nécessaires et poursuivre le combat, tout en rappelant que "l'Europe n'est plus la même après ce premier semestre" :

"C'est vous qui allez décider (...), c'est un nouveau chemin qui s'ouvre devant nous: qui  peut faire les réformes nécessaires et comment ; vous, avec votre vote, vous allez nous juger."

Il conclut en martelant :

"Je suis fier de ma bataille et de mon gouvernement."

Les Grecs aux urnes le 20 septembre ?

Plus tôt dans la journée, la télévision publique ERT avait indiqué que le Premier ministre s'exprimerait dans une allocution ce soir aux alentours de 20 heures (à 19 heures, heure de Paris) pour présenter sa démission et annoncer de nouvelles élections. Le journal Kathimerini avait, de son côté, rapporté que Alexis Tsipras convoquerait ce jeudi 20 août ses ministres et conseillers pour décider de la stratégie à adopter dans les prochains jours.

En fin d'après-midi, un responsable gouvernemental a alors rapporté à l'agence Reuters que des élections législatives anticipées pourraient être organisées plus tôt que prévu.

"L'objectif est d'avoir des élections le 20 septembre", avait alors déclaré cette source gouvernementale après la rencontre entre Alexis Tsipras, les principaux dirigeants de son parti Syriza et des ministres.

Face aux créanciers, Tsipras s'incline

Depuis le 13 juillet,  Alexis Tsipras, accusé d'avoir capitulé face aux créanciers du pays, est désavoué par son propre camp.

Le 28 juin, il avait annoncé la tenue d'un référendum pour que les Grecs disent si oui, ou non, ils acceptaient les mesures proposées par les créanciers. Et, alors que le "non" l'emporte très largement le 5 juillet au soir, avec 61%, le Premier ministre finira par accepter, quelques jours plus tard, le plan imposé par Bruxelles.

Démissions massives

Dans son propre camp, ce qui ressemble pour beaucoup à une capitulation de Tsipras, passe mal.

Le 15 juillet, c'est la vice-ministre des Finances, Nadia Valavani qui annonce sa démission, expliquant qui lui est "impossible de continuer d'appartenir au gouvernement". Elle ajoute que l'accord trouvé avec les créanciers est une "humiliation totale pour le gouvernement et le pays".

Le même jourManos Manousakis, secrétaire général du ministère des Finances annonce son départ. Nikos Chountis, ministre adjoint aux Affaires européennes, élu de Syriza, démissionne également.

Une semaine plus tôt, au lendemain du référendum du 6 juillet, Yanis Varoufakis alors ministre des Finances, avait préféré renoncer à son poste.

Fronde dans le camp Syriza

Vendredi dernier, lors du vote au Parlement sur le troisième plan d'aide de 86 milliards d'euros, 32 députés de son parti Syriza sur 149 ont voté contre, 11 ont préféré s'abstenir.

Athènes, en échange d'un nouveau plan d'aide -le 3è en 5 ans- a été contrainte de voter de nouvelles mesures sur les retraites, la TVA, la justice civile, ou encore des privatisations massives. Un nouveau plongeon dans l'austérité.