L'Union européenne n'abandonne pas son projet d'embargo sur le pétrole russe

Par latribune.fr (avec AFP)  |   |  769  mots
L'Union européenne doit trouver une solution pour débloquer le 6e paquet de sanctions à l'encontre de la Russie. (Crédits : YVES HERMAN)
Après près d'un mois de blocage et une première tentative de compromis inaboutie, les Vingt-Sept se remettent à l'ouvrage pour mettre en place un embargo sur le pétrole russe. Pour y arriver, il faudra convaincre la Hongrie de Viktor Orbán. Très dépendante des approvisionnements venus de Russie, elle s'y est farouchement opposée jusqu'ici.

Mis à mal par l'opposition hongroise, l'embargo européen sur le pétrole russe a encore une chance d'aboutir. Alors que s'ouvre demain et pour deux jours une réunion extraordinaire du Conseil européen, qui réunit les chefs d'Etat et de gouvernement des 27 pays de l'Union européenne, les ambassadeurs des Etats-Membres s'activent en coulisse. Ils examinent ce dimanche une solution pour débloquer le 6e paquet de sanctions contre la Russie, selon l'AFP citant des sources européennes.

Plusieurs mesures sont prévues dans ce paquet, dont l'exclusion de nouvelles banques russes et un élargissement de la liste noire à de nouvelles personnalités russes, mais la fin des importations de pétrole depuis la Russie est la mesure la plus emblématique. Malgré des sanctions financières et industrielles déjà conséquentes, c'est la première fois que l'Union vise le secteur énergétique.

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Embargo sur mer, libre service à terre

La solution examinée dimanche à Bruxelles, à l'initiative de la présidence française de l'UE et du Conseil européen, consisterait à exclure l'oléoduc Droujba de l'embargo pétrolier. Celui-ci représente un tiers des acheminements de pétrole russe en Europe, selon ces mêmes sources européennes. Les sanctions se limiteraient alors aux seuls approvisionnements de pétrole par bateau, qui représentent les deux tiers restants. Elles se concrétiserait par un arrêt des achats de pétrole dans les six mois et de produits pétroliers d'ici la fin de l'année.

Si les représentants des Etats-Membres s'accordent aujourd'hui, la solution devra être avalisée par les chefs d'Etat et de gouvernement, avec l'espoir de régler de régler la question d'ici le début de leur sommet extraordinaire lundi après-midi à Bruxelles. Celui-ci se déroulera jusqu'à mardi.

Cela viendrait en tout cas en contradiction avec les préconisations de la Commission européenne, dont la présidente Ursula von der Leyen avait déclaré début mai vouloir "une interdiction de tout le pétrole russe, brut et raffiné, transporté par mer et par oléoduc". Elle y voyait ainsi le moyen d'intensifier sa pression sur Moscou afin de « faire payer le prix fort » au président russe Vladimir Poutine pour sa guerre contre l'Ukraine. La Commission européenne espérait alors une entrée en vigueur de la mesure pour la célébration de la 72e journée de l'Europe le 9 mai.

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Obtenir l'aval de la Hongrie

Ce compromis a pour but premier de contenter la Hongrie, et son virulent Premier ministre Viktor Orbán, afin qu'elle lève son véto sur ce 6e train de sanction qui doit être adopté à l'unanimité. Elle s'y était fermement opposé lors de sa présentation par Ursula von der Leyen début mai. Viktor Orban avait alors déclaré qu'une "ligne rouge" avait été franchie.

Enclavé sans accès à la mer, le pays d'Europe centrale dépend du pétrole acheminé de Russie par Droujba, qui lui fournit 65% de sa consommation.

Ce n'est pas la première tentative de compromis avec la Hongrie depuis l'annonce de ces nouvelles mesures. Budapest avait jugé insuffisante la proposition d'une dérogation de deux années qui avait été offerte à elle, ainsi qu'à la Slovaquie qui connaît un enclavement et une dépendance comparables. La Hongrie avait alors réclamé au moins quatre ans de dérogation et près de 800 millions d'euros de financements européens pour adapter ses raffineries.

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Ne pas polluer le sommet

Si la présidence française de l'UE et du Conseil européen se montrent aujourd'hui si conciliants avec Budapest, c'est dans la crainte que cette question de l'embargo pétrolier vienne peser sur le sommet de lundi et mardi. La recherche d'un compromis s'est donc accélérée ces derniers jours.

Toujours selon les mêmes sources citées par l'AFP, l'option de reporter l'adoption de tout le paquet de sanctions le temps de trouver une solution pour l'approvisionnement en pétrole de la Hongrie est même envisagée.

Tout compromis, quel qu'il soit, ne sera sans doute pas du goût du président ukrainien Volodymyr Zelensky, qui doit intervenir par visioconférence au début de ce Conseil européen.