Matières premières : le Congrès américain accuse trois banques de manipulation des prix

Par latribune.fr (avec AFP)  |   |  587  mots
JP Morgan a rappelé avoir cédé, en mars dernier, son unité de commerce de matières premières (pétrole, gaz naturel, métaux) au groupe de négoce suisse Mercuria Energy pour 3,5 milliards de dollars.
Selon un rapport d'une commission sénatoriale rendu public mercredi, Goldman Sachs, JPMorgan Chase et Morgan Stanley profiteraient de leurs activités dans le marché des matières premières physiques pour exercer une concurrence déloyale vis-à-vis d'autres acteurs, voire pour influencer les prix.

Goldman Sachs, JPMorgan Chase et Morgan Stanley sur la sellette. Le Congrès américain a accusé ces trois banques, dans un rapport rendu public mercredi 19 novembre, d'avoir "potentiellement" manipulé les prix des matières premières, au détriment des industriels et des consommateurs.

Mélange de genres

"Depuis 2008, Goldman Sachs, JPMorgan Chase et Morgan Stanley sont engagées dans plusieurs milliards de dollars d'activités concernant les matières premières physiques, en contrôlant ou en étant propriétaires de vastes stocks" de brut, de gaz naturel, d'aluminium, d'uranium entre autres, lit-on dans la synthèse du document.

Ces banques sont notamment, selon l'enquête d'une commission sénatoriale, propriétaires d'entrepôts de stockage, de centrales électriques, de mines de charbon et de sites de gaz naturel et d'oléoducs.

Concurrence déloyale et manipulation des prix

Or ce mélange de genres entre leur métier de banquier et le commerce engendre une concurrence déloyale face aux industriels et autres acteurs non bancaires:

Il "leur permet de bénéficier de coûts d'emprunts bas contrairement aux autres intervenants", fustigent les sénateurs.

Ils accusent d'ailleurs les trois fleurons de Wall Street de s'être servis de leur position pour "manipuler ou influencer les prix des matières premières".

"L"implication massive de Wall Street dans les matières premières physiques met notre économie (...) et l'intégrité de nos marchés à risque", regrette le sénateur Carl Levin, cité dans le document.

En conclusion, les sénateurs plaident pour un désengagement des banques du courtage des matières premières.

"Il est temps de restaurer la séparation entre la banque et le commerce et d'empêcher Wall Street d'utiliser des informations confidentielles à son avantage et au détriment de l'industrie et des consommateurs", insiste Carl Levin.

Les responsables des trois banques seront entendus par le Sénat jeudi et vendredi.

Un désengagement déjà entamé

Les premières réactions des trois grands établissements de Wall Street n'ont toutefois pas tardé.

Goldman Sachs, qui a des actifs dans l'uranium, l'aluminium et le charbon, faisait valoir dans un argumentaire transmis à l'AFP mercredi les bienfaits du rôle "d'intermédiaire" sur le marché physique des matières premières: "producteurs et consommateurs comptent sur les marchés financiers pour se protéger contre des mouvements imprévus de ces prix", affirmait la banque, tout en niant nie toute influence sur les prix et les stocks dans ses activités d'aluminium.

JPMorgan rappelait mercredi que la banque a déjà cédé une grande partie de ses activités dans ce marché: notamment, en mars dernier, son unité de commerce de matières premières (pétrole, gaz naturel, métaux) a été acquise par le groupe de négoce suisse Mercuria Energy pour 3,5 milliards de dollars. Morgan Stanley a pour sa part vendu il y a un an sa division de courtage pétrolier au géant russe du pétrole Rosneft.

Une class action en cours

Il y a plus d'un an, un fabricant américain de poutres en aluminium, Superior Extrusion, a lancé une action en nom collectif (class action) visant Goldman Sachs et le London Metal Exchange (LME), les accusant de "comportements anticoncurrentiels et monopolistiques dans le marché du stockage d'aluminium".

Le régulateur des matières premières et produits dérivés, la CFTC, a ouvert une enquête élargie à JPMorgan, Morgan Stanley et le courtier en matières premières Glencore Xstrata.