Assurance vie : le jeu dangereux de certains assureurs

Par Ivan Best  |   |  488  mots
Le gouverneur de la Banque de France, Christian Noyer, a appelé les assureurs à la prudence. Peine perdue
De nombreux assureurs affichent des rendements exceptionnels pour leurs contrats en assurance vie, au titre de 2014. De quoi attirer encore plus les épargnants, ce qui va obliger les assureurs à investir dans des obligations au rendement aujourd'hui très faible. Un jeu dangereux, à terme

L'assurance vie, qui a eu les faveurs des épargnants,  détrônant le livret A depuis la mi 2014, si l'on en croit les statistiques diffusées mois après mois, a encore de bonnes chances d'afficher d'excellentes performances début 2015. En tous cas les assureurs font tout pour, affichant pour 2014 des rendements de leurs contrats standard (fonds en euros) bien au dessus de ce qui était attendu. Avec des obligations d'Etat rapportant moins de 1%, les experts s'attendaient à des rendements de l'ordre de 2%.

Il n'en est rien. Beaucoup d'assureurs ou presque affichent un rendement net (mais avant prélèvements sociaux et impôt) de leur contrat pour 2014, supérieur à 3%. A comparer au maigre 1% que rapporte le livret A.

Beaucoup de rendements supérieurs à 3%

MASCF annonce ainsi un rendement de 3,1% pour son contrat en euros, Apicil 3,05%, l'Afer 3,2%, Gaipare 3,40%, GMF 3,05%, MAAF 3,01%. On sent à l'évidence la volonté de se situer au dessus de la barre des 3%. Une volonté très marketing...
Comment les assureurs sont-ils parvenus à de telles performances, avec des placements sécurisés (obligations souveraines), dans lesquels les fonds en euros sont majoritairement investis, rapportant moins de 1% ? Il faut souligner, d'abord, que tous les contrats n'atteignent pas de tels sommets. La communication a lieu sur ceux affichant les plus hauts rendements. S'agissant de ces contrats, beaucoup sont, en fait, parvenus à servir 3% aux assurés en prenant quelques risques - les contraintes de Solvabilité 2 ne sont pas encore en vigueur- et en réalisant des plus-values latentes, ce qu'ils n'affichent pas encore vraiment (seule la publication des comptes détaillés permettra de le savoir). Des plus-values qui ne seront, dès lors, plus disponibles à l'avenir. Or celui-ci s'annonce très incertain, avec des taux d'intérêt toujours plus faibles.

Christian Noyer avait averti ces assureurs, en vain

Une stratégie dangereuse, comme l'avait suggéré le gouverneur de la Banque de France, Christian Noyer, qui avait appelé en octobre les assureurs à baisser la rémunération de leurs fonds en euros. Car, avec une telle rémunération,  les assureurs vont à tous les coups attirer encore plus les épargnants, et, face à cet afflux de placements,  vont se trouver dans l'obligation d'acheter massivement des titres d'Etat, sensés rémunérer cette épargne. Le hic, c'est que ces titres ne rapportent plus rien, ou presque. Les assureurs vont donc faire baisser le rendement moyen  de leurs investissements encore plus vite que ne le voudrait l'évolution tendancielle des taux d'intérêt.

Le choc n'en sera que plus rude

Quand ils devront dire la vérité aux épargnants, le choc n'en sera que plus rude. « La prudence aurait commandé d'afficher des rendements en forte baisse pour les fonds en euros, et d'inciter les épargnants à aller vers les fonds en unités de compte » (placés pour une plus grande part en actions), commente un expert.

Les assureurs qui affichent des rendements exceptionnels ne l'ont pas eue, cette prudence...