Le capital-risque français n'a plus les moyens de ses ambitions

Par Christine Lejoux  |   |  564  mots
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En 2011, les sociétés françaises de capital-risque ont investi 822 millions d'euros seulement dans de jeunes pousses, selon l'indicateur Chausson Finance. Un montant en chute de 21% par rapport à 2010, et inférieur à celui de 2009, une année pourtant marquée par la récession économique.

L'activité du capital-risque français se dégrade à vitesse grand V. Au second semestre 2011, les sociétés françaises de "venture" ont investi 406 millions d'euros seulement dans des start-up, selon l'indicateur publié ce mardi par la société de conseil en levée de fonds Chausson Finance. Ce montant représente une chute de 24% par rapport au second semestre 2010, plus importante encore que celle de 19% enregistrée au cours des six premiers mois de 2011. Au total, sur l'ensemble de l'année écoulée, les investissements réalisés par le capital-risque français n'ont pas excédé 822 millions d'euros. Non seulement il s'agit là d'une dégringolade de 21% par rapport à l'année 2010, qui s'était achevée sur un record de 1,05 milliard d'euros (+15,4%), mais ce montant est de surcroît inférieur aux 910 millions investis en 2009, en pleine récession économique.


L'amorçage n'a recueilli que 8% des investissements


Autre signe de la frilosité du capital-risque, l'essentiel (64%) des investissements réalisés par le "venture" français, au second semestre, ont concerné des sociétés qui en étaient au moins à leur deuxième tour de table. En revanche, le financement d'amorçage, destiné à financer la mise au point d'un concept ou d'un produit, a représenté 8% seulement du total des investissements. Et les premiers tours de table, qui ont pour vocation de financer la mise sur le marché dudit concept ou produit, n'ont recueilli que 28% des investissements.


Internet, le secteur privilégié du capital-risque


De la même façon, si l'Internet est, pour le deuxième semestre d'affilée, le secteur d'activité privilégié des capital-risqueurs, avec 104 millions d'euros d'investissements recueillis, soit 26% du total, c'est parce que ce secteur est devenu une valeur sûre. "Auparavant, c'était la santé [équipements médicaux et biotechnologies ; Ndlr] qui arrivait en tête des secteurs préférés du capital-risque. Mais aujourd'hui, nombre de sociétés Internet ont démontré leur capacité à réaliser un chiffre d'affaires élevé, à dégager une forte rentabilité et, donc, à offrir aux investisseurs des possibilités de sorties intéressantes", explique Sabine Fillias, directeur associé chez Chausson Finance. Et de citer l'exemple de Monshowroom : trois ans seulement après leur entrée au capital du site Internet de vente de prêt-à-porter, Alven Capital et Credit Agricole Private Equity viennent de céder leur participation de 49% à Casino. Monshowroom, créé il y a six ans, est rentable depuis 2010 déjà, et devrait publier, au titre de 2011, un bond de 70% environ de son chiffre d'affaires, à quelque 20 millions d'euros.


Une désaffection des investisseurs particuliers et institutionnels


Si le capital-risque français se montre moins prodigue et moins audacieux, c'est faute de moyens. Ce segment du capital-investissement subit en effet une désaffection des investisseurs, aussi bien particuliers qu'institutionnels. Leurs intentions d'allocation de capitaux au "venture" ont chuté de 69%, au premier semestre 2011, selon l'Afic (Association française des investisseurs en capital). En raison, pour les particuliers, du coup de rabot fiscal subi par le dispositif FIP-FCPI (Fonds d'investissement de proximité-Fonds communs de placement dans l'innovation) et, pour les "zinzins", en raison des nouvelles réglementations Bâle III et Solvabilité 2, qui brident les investissements des banques et des assureurs dans le private equity. Une situation que déplore Sabine Fillias, qui rappelle que "le capital-risque a dopé l'esprit d'entreprise et la création de sociétés innovantes."