Logement : les professionnels préparent le terrain à Cécile Duflot...

Par Pascale Besses-Boumard  |   |  870  mots
Cécile Duflot, la nouvelle minsitre du Logement Copyright Reuters
Les acteurs de l'immobilier attendent de pied ferme la nouvelle ministre du Logement. Et la mettent en garde sur les conséquences que pourraient avoir, en ces périodes de basses eaux, de trop fortes contraintes, notamment en matière environnementale.

L'arrivée de Cécile Duflot à la tête du ministère du logement, est loin de laisser de marbre tous les acteurs du secteur. Dans un point de vue titré : Cécile Duflot, ministre du logement pour tous ou du logement écologique ? François Gagnon, président d'ERA Europe, réseau de franchise d'agences immobilière va droit au but : « Il faut admettre qu'il y a une part de civisme à vouloir un logement conforme au respect de l'environnement mais dans la construction, le surcoût généré par des installations ou des modifications pour économiser l'énergie ne sera pas absorbé par les économies réalisées.  A l'époque du protocole de Kyoto qui s'est voulue exemplaire en matière de développement durable, les économies mondiales et nationales n'étaient pas en dépression. Avec la crise de 2008 et la désolvabilisation des ménages accédants, investisseurs ou locataires, le sujet du financement du surcoût, en soi important, est devenu crucial. Le problème se pose certes dans le neuf, mais il est lancinant dans l'ancien : l'ancien est la cible naturelle des acquéreurs modestes, et il le sera plus encore avec la baisse prévisible des aides en direction du neuf. Dans ce contexte, il sera essentiel que le gouvernement et le parlement gardent les pieds sur terre. Oui à une action puissante contre la précarité énergétique qui frappe les familles les plus fragiles, et les fragilise plus encore. Oui à la poursuite de l'effort de rénovation énergétique du parc existant et à un accompagnement par les fonds publics. Non à l'intégrisme, qui conduirait par exemple à conditionner désormais toute aide à un classement énergétique entre les lettres A et C ».

Le marché ne peut plus supporter de hausse de prix

De son côté, Henry Buzy-Cazaux, président de l'Institut du management des services immobiliers est lui aussi assez disert sur le sujet dans un blog écrit ce jour : « Oser affirmer qu'on devrait faire passer le souci de loger avant celui de loger dans des conditions optimales au plan de la vertu énergétique relevait alors de la folie sacrilège, et il n'y a pas si longtemps on vous aurait brûlé vif pour moins. Pourtant, désormais, la communauté immobilière est presqu'unanime: le collectif "Je vote priorité logement", emmené par le Syndicat National des Aménageurs-Lotisseurs" et fédérant les HLM, les promoteurs, les constructeurs de maisons individuelles ou encore les architectes, l'a exprimé à tous les candidats avant le premier tour de la présidentielle: le marché ne peut plus supporter de hausse de prix, et toute nouvelle exigence normative entraînerait cette hausse inévitablement. Alors comment une ministre écologique va-t-elle réagir à cette demande? Son prédécesseur avait été implacable et avait notamment refusé le moratoire que les constructeurs de maisons individuelles réclamaient dans l'entrée en vigueur des normes. Pour moi, je pense que Cécile Duflot saura être plus ministre du logement que chef de parti. Et je reconnais aussi que les convictions ne doivent pas être de circonstance, et qu'on ne peut différer indéfiniment de sauver la planète et d'assurer l'avenir de nos enfants. Bref, je considère comme une chance d'avoir pour ministre une responsable politique qui devra en elle-même résoudre le dilemme pour éviter la schizophrénie, et qui sans aucun doute trouvera le juste milieu: être aux affaires conduit à une posture empreinte de raison, quand les discours partisans sont parfois plus extrêmes et plus envolés ».

Les associations divisées

De leur côté, les associations étaient divisées lundi sur un rapport remis à la ministre du Logement Cécile Duflot qui préconise notamment l'augmentation du taux obligatoire de logements sociaux dans certaines communes ou l'augmentation de la taxe sur les logements vacants.Le taux obligatoire de logements sociaux dans les communes où la situation du logement est la plus tendue "pourrait être relevé à 25% voire 30%", contre 20% actuellement, estime le Haut conseil de la famille (HCF), qui regroupe les acteurs de la politique familiale et dépend du Premier ministre.
Dans ce rapport, adopté le 10 mai, le Haut conseil préconise également que les montants des loyers dans le parc social "tiennent compte des revenus des locataires" et que soit accrue la mobilité des résidents en fonction de l'évolution de leur situation.
"C'est du beau travail, nous assistons à un dérèglement du marché et il faut loger en priorité ceux qui en ont le plus besoin", a apprécié Christophe Hodré, responsable du logement au sein de l'Union des familles laïques. A l'inverse, la Confédération syndicale des familles craint que cette logique ne destine les quartiers d'habitat social à devenir de "futurs ghettos".
L'augmentation de la taxe sur les logements vacants et l'encadrement des loyers dans le parc privé, une des promesses de campagne de François Hollande, font également l'objet de propositions dans le rapport, tout comme une taxation plus forte des plus-values dégagées sur la vente de terrains non-bâtis."Nous estimons qu'en région parisienne, par exemple, il faudrait construire 100.000 logements par an au lieu de 35.000 actuellement", a souligné Christophe Hodré.