Un excès de finance freine la croissance et creuse les inégalités, selon l'OCDE

Par latribune.fr  |   |  566  mots
Les personnes les plus aisées "recueillent une plus grande part des fruits de l'essor des marchés boursiers", entre autres parce que le secteur financier verse des salaires plus généreux, supérieurs à ceux perçus par des salariés au profil similaire dans le reste de l'économie, souligne l'OCDE.
Dans une étude publiée mercredi, l'Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) pointe notamment les effets nocifs d'une expansion excessive du crédit, aux entreprises comme aux ménages.

Si l'existence de la finance est sans doute nécessaire dans l'économie moderne, sa forme actuelle aggrave les inégalités et ralentit la croissance dans les pays développés. Le constat vient de l'OCDE, qui a présenté mercredi 17 juin à Londres une nouvelle étude intitulée "Finance et croissance inclusive", où il appelle à réformer le secteur financier.

S'appuyant sur cinquante ans de données statistiques, l'Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE),  qui regroupe 34 pays riches, pointe notamment les effets nocifs d'une expansion excessive du crédit, dont une poursuite aura, dans la plupart des pays de l'OCDE, "plus de chances de ralentir la croissance que de l'encourager", selon les auteurs du rapport.

Les obligations et les actions meilleures pour la croissance que le crédit

Sur les cinquante dernières années, les crédits bancaires accordés aux ménages et aux entreprises ont en effet crû trois fois plus vite que l'activité économique, souligne l'OCDE. Or, un recours excessif au crédit bancaire de la part des entreprises, au détriment d'autres formes de financement par le marché, comme les obligations et les actions, fait peser un certain nombre de risques sur la croissance à long terme, met en garde l'étude. Parmi les causes, l'OCDE cite notamment une mauvaise affectation du capital via le financement de projets dont la rentabilité est faible ainsi que l'éviction des travailleurs les plus compétents des secteurs dont le potentiel productif est le plus élevé.

Ainsi, "une hausse du crédit bancaire de 10 % du PIB se traduirait par une baisse de 0,3 point de la croissance du PIB", calcule l'OCDE, alors qu'"une hausse de la capitalisation boursière de 10 % du PIB est associée à une progression de 0,2 % du PIB en moyenne dans les pays de l'OCDE et du G20".

Les fruits des marchés boursiers réservés à une minorité

Quant au crédit accordé aux ménages, son accroissement "a tendance à être un facteur d'inégalités". Si en effet "l'expansion financière peut aider les titulaires de bas revenus à financer leurs projets et acquérir un bien immobilier", il n'empêche que "les personnes plus aisées peuvent emprunter (et empruntent) davantage".

Ces dernières par ailleurs "recueillent une plus grande part des fruits de l'essor des marchés boursiers", entre autres parce que le secteur financier verse des salaires plus généreux, supérieurs à ceux perçus par des salariés au profil similaire dans le reste de l'économie. Ainsi, en Europe, les salariés du secteur financier représentent 20% de la tranche de la population qui gagne le mieux sa vie, alors qu' ils ne représentent que 4% de la masse salariale totale.

Le soutien aux établissements systémiques critiqué

Pour remédier à ces problèmes, l'OCDE insiste sur une piste: "améliorer la structure des financements (qui) peut générer des gains en termes de bien‑être économique et social". Dans cette perspective, elle suggère notamment de réduire le soutien des Etats aux établissements systémiques (à savoir jugés trop gros pour pouvoir faire faillite sans menacer l'ensemble du système), critiqué car il les encourage à prendre  des risques inconsidérés dans leur activité.

L'OCDE prône également "une réforme fiscale pour promouvoir la neutralité entre financement par la dette et par les capitaux propres".

(Avec AFP)