Maduro ordonne à ses banques d'adopter le petro, la cryptomonnaie vénézuélienne

Par latribune.fr  |   |  668  mots
(Crédits : Reuters)
C'est du jamais-vu. Après avoir violemment dévalué le bolivar le 20 août dernier pour tenter de juguler l'hyperinflation qui sévit dans le pays, le président Maduro impose "l'ancrage" de la monnaie nationale au petro, la toute récente cryptomonnaie locale, afin de contourner le manque de liquidités et les sanctions financières des États-Unis.

Le Venezuela a ordonné lundi aux banques d'adopter comme "unité de compte" le petro, la cryptomonnaie vénézuélienne, parallèlement à une offre d'obligations garanties par de mini-lingots d'or, deux nouvelles mesures par lesquelles le président socialiste Nicolas Maduro compte relancer l'économie sinistrée de son pays.

Les banques publiques et privées doivent désormais fournir leurs informations en bolivars (la monnaie nationale) et en petro, la cryptomonnaie avec laquelle le gouvernement entend contourner le manque de liquidités et les sanctions financières des Etats-Unis.

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La première fois qu'un pays adosse sa monnaie à une cryptomonnaie

La mesure fait partie d'un "plan de relance" lancé par le président Nicolas Maduro dont le pays est confronté depuis cinq ans à une grave crise économique. Le Fonds monétaire international (FMI) prévoit une inflation de 1.000.000% pour 2018.

Après avoir lancé le 20 août de nouveaux billets amputés de cinq zéros, le programme de réformes du président Maduro envisage "l'ancrage" de la monnaie au petro.

C'est la première fois qu'un pays adosse sa monnaie sur une cryptomonnaie. Les prix et les salaires seront fixés dans ces deux monnaies.

Contourner les restrictions de financement imposées par les Etats-Unis

Chaque petro, selon le dirigeant socialiste, équivaut à environ 60 dollars, sur la base du prix du baril de pétrole vénézuélien, soit 3.600 bolivars souverains (la nouvelle monnaie).

L'économiste Jean-Paul Leidenz estime que cette mesure doit faire face à deux défis: le financement du déficit (20% du PIB) et les restrictions de financement pour le Venezuela, conséquence des sanctions imposées par les Etats-Unis.

Parallèlement, lundi, le président Maduro a lancé lundi une offre d'obligations garanties par de mini-lingots d'or pour promouvoir l'épargne chez les Vénézuéliens qui voient la monnaie locale s'évaporer avec l'hyperinflation.

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Les doutes des experts en cryptomonnaies

Vendredi 17 août, en même temps qu'il annonçait une hausse de plus de 3.000% du salaire minimum mensuel, le président vénézuélien Nicolas Maduro avait également annoncé la mise en place d'un taux de change unique rattaché au "petro", la crypto-monnaie lancée cette année, en février, par le gouvernement.

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Avec le petro, monnaie virtuelle basée sur les réserves en hydrocarbures du Venezuela,  le gouvernement cherche à contourner le "blocus financier" que Maduro accuse les Etats-Unis d'avoir imposé à son pays.

Cependant les économistes considèrent que le système des changes, fortement subventionné, est l'une des causes majeures de la crise économique au Venezuela, provoquant une inflation galopante et la chute de la monnaie nationale, le bolivar.

Des experts en crypto-monnaie ont fait part de leurs doutes quant au recours au petro comme instrument financier fonctionnel, notamment face aux sanctions imposées par les Etats-Unis, lesquelles excluent le petro de toute transaction.

Ces doutes ne sont pas nouveaux. Le professeur Steve Hanke, économiste, professeur à la Johns Hopkins University, et contributeur du magazine Forbes, a tiré la sonnette d'alarme depuis le début : à la suite de son analyse publiée dès le 6 décembre 2017, il publiait un tweet extrêmement direct :

"La crypto-monnaie "Petro" de Maduro est une initiative stupide et inutile. Pourquoi les gens investiraient-ils dans un actif non réglementé, qui plus est, contrôlé par l'un des gouvernements les plus incompétents et les plus corrompus de la planète? A mon avis, tout cela court à l'échec."

(Avec AFP et Reuters)