L'industrie française n'a toujours pas effacé la crise de 2009

Par Fabien Piliu  |   |  621  mots
Le terrain perdu par l'industrie française n'a toujours pas été reconquis
Selon l'Insee, la production industrielle a stagné en août. Compte tenu de la conjoncture actuelle, cette statistique ne surprend guère. Mais parce que cette morosité est une tendance lourde, les dégâts occasionnés par la crise de 2008-2009 ne sont toujours pas effacés. La plupart des secteurs produisent moins qu'en 2010.

La plus grave crise économique que la France ait connue depuis 1945 ne s'efface pas facilement. L'industrie porte encore les stigmates de la récession observée en 2009, année au cours de laquelle le PIB a reculé de 2,5%.

Plus de quatre ans après, le chemin perdu au cours de cette période n'a toujours pas été rattrapé. En cause ? Le ralentissement de la demande intérieure. Si les ménages consomment toujours, ils mettent moins la main au portefeuille qu'au cours des années 2000. La chute quasi-continue de l'investissement des ménages et des entreprises contribue aux difficultés d'une industrie qui ne profite pas du dynamisme du commerce mondial, la demande adressée à la France n'ayant pas cessé de reculer entre 2002 et 2010 avant de stagner ensuite. En clair, la France a décroché sur la scène économique mondiale (voir graphique)

L'industrie produit moins qu'en 2010

Aujourd'hui, le résultat est sans appel. En août, le niveau de la production industrielle est inférieur de 1,6% à celui observé en 2010. La production manufacturière se situe 1,4% en-dessous de celle enregistrée cette année-là.

Certains secteurs ont particulièrement souffert depuis 2010. C'est en particulier le cas de l'industrie agroalimentaire (-3,7%), de l'énergie (-3,9%), de la pharmacie (-5,8%) du textile (-6,2%), des industries extractives (-6,9%), de l'équipement électrique (-9,6%) et du raffinage (-17,9%).

Malheureusement, la surperformance bien louable de certains secteurs, parmi lesquels les biens d'équipement (+2%), le matériel de transport (+5,8%), la chimie (+11,7%) et les autres matériels de transport (+15,6%) n'a pas permis d'effacer les dégâts sociaux.

Les destructions nettes d'emplois se poursuivent

Dans " L'Economie française en 2015 ", l'Observatoire français des conjonctures économiques (OFCE) estime à 400.000 le nombre d'emplois industriels détruits depuis 2008. Au cours de la seule année 2013, ce sont 35.000 emplois en équivalent temps plein qui ont été supprimés.

Selon une étude de la Direction générale du Trésor dévoilée en 2010, la contribution de l'industrie à la richesse nationale est passée de 24 % à 14 % entre 1980 et 2007. L'industrie française a perdu sur cette période 1.913.500 emplois, tombant à 3.414.000, soit une baisse de 36 % de ses effectifs. L'étude précise également deux choses : la très grande majorité de ces pertes d'emplois, 96% exactement, a eu lieu dans l'industrie manufacturière ; les forts gains de productivité seraient à l'origine de près de 30 % des pertes d'emplois sur la période 1980-2007 et de 65 % depuis 2000.

L'industrie crée des emplois, mais pas assez

L'industrie crée-t-elle encore des emplois ? Bien sûr. Mais ils sont trop peu nombreux pour relancer l'emploi industriel. Selon une étude menée par Xerfi sur les créateurs nets d'emplois publiée en juin, les 17 plus gros groupes industriels ont créé 25.000 emplois sur la période 2008-2013. Leur point commun ? Ils sont innovants, mais pas n'importe comment.

" L'intensité n'est pas ou plus le marqueur clé du potentiel de développement. Celui-ci résulte aussi de la combinaison de proposition de nouveaux usages à destination des ménages et des entreprises, d'augmentation des compétences, de renouvellement des modèles d'affaire en lien avec Internet. L'ensemble de ces constats suggère que la structure du soutien de l'État aux entreprises devient obsolète. Il souligne les limites d'un abord trop cloisonné de l'innovation ", explique Olivier Passet, le directeur des synthèses économiques chez Xerfi.

Pour stimuler l'innovation, les récents gouvernements, de droite et de gauche, ont imaginé des dispositifs transversaux. Citons  notamment le crédit d'impôt recherche (CIR), la principale arme du gouvernement pour inciter les entreprises à innover pour attirer les centres de recherche & développement étrangers. Pérennisé en 2013 par François Hollande, le coût pour les finances publiques de ce dispositif s'élèvera à 5,3 milliards d'euros en 2015.