Défense : pourquoi Eurocopter peut-il gagner un méga-contrat en Pologne

Par Michel Cabirol  |   |  699  mots
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En Pologne, la filiale hélicoptériste d'EADS est en compétition pour remporter un appel d'offre estimé à 3 milliards d'euros environ. Si Eurocopter gagne ce contrat, le constructeur européen et le motoriste Turbomeca installeront respectivement deux chaînes d'assemblage pour l'EC725 chez l'industriel polonais WZL 1 basé à Lodz.

En Pologne, Eurocopter met les gaz. Et pas qu'un peu pour rattraper ses deux concurrents - l'italien AgustaWestalnd et l'américain Sikorsky -, qui avaient une longueur d'avance. Surtout la filiale d'EADS croit de plus en plus en ses chances de succès pour remporter le méga-appel d'offre lancé par Varsovie portant sur l'acquisition de 70 hélicoptères multirôles (versions tactique, navale et de sauvetage) . Un contrat estimé à environ 3 milliards d'euros. "C'est le contrat de la décennie en Europe", explique-t-on chez l'hélicoptériste. Varsovie devrait choisir son fournisseur en 2014.

Eurocopter signe un accord industriel avec WZL 1 

En attendant, Eurocopter, qui propose le Caracal (EC725), continue de mettre toutes les chances de son côté. Ainsi le constructeur franco-allemand va signer ce jeudi un accord avec l'industriel polonais de Lodz, WZL 1, une entreprise spécialisée dans la maintenance aéronautique qui assemblera le Caracal si Eurocopter gagne la compétition. De son côté, Turbomeca installera également une chaîne d'assemblage pour les turbines de l'EC725. Produire surplace est d'ailleurs la condition sine qua non pour rester en course dans cet appel d'offre. "Les sociétés qui réfléchissent à participer de façon efficace à l'appel d'offres doivent apporter des garanties que ces hélicoptères seront produits en Pologne. Il s'agit d'un soutien à l'économie, au marché polonais du travail", avait expliqué fin septembre 2012 le Premier ministre polonais, Donald Tusk.

Pour AgustaWestland (AW149) et Sikorsky (S-70), c'est déjà le cas.  Le groupe italien avait racheté en 2010 l'usine de PZL à Swidnik (sud), qui produit des hélicoptères Sokol utilisés dans les opérations de sauvetage, la lutte contre les incendies et le transport, notamment militaire. Ils sont vendus en Pologne, en République tchèque et en Corée du Sud. Sikorsky Aircraft produit, quant à lui, dans son usine de Mielec (sud) sa nouvelle version de l'hélicoptère Black Hawk, S70i, destinée à l'exportation. Grâce à cette coopération WZL 1, Eurocopter rattrape son retard sur ses deux concurrents.

Septembre 2012, Eurocopter est relancé

Avant septembre 2012, on ne donnait pas cher des chances de succès d'Eurocopter. Mais lors du salon de l'industrie de l'armement MSPO, qui s'est tenu à Kielce début septembre 2012, la cote du constructeur de Marignane a brusquement remonté. L'armée polonaise, qui a découvert les qualités de l'EC725 présenté par Eurocopter sur le salon, s'est montrée très intéressée par cet appareil, qui correspond bien à ses besoins opérationnels et qui a fait ses preuves au combat (combat proven) en Afghanistan, Libye et au Mali. Mieux en tout cas que les deux autres appareils en compétition. Bref, c'est le déclic pour Eurocopter, qui pourtant partait de loin.

Car pour la presse polonaise, AgustaWestland et Sikorsky Aircraft, apparaissaient cet automne encore comme les mieux placés pour remporter cet appel d'offres en raison de leurs partenariats industriels. Et surtout, le constructeur italo-britannique avait bien savonné la planche de son partenaire dans le programme NH90, dont Eurocopter détient 62,5 %. Initialement, il était convenu que les deux constructeurs proposent à Varsovie le NH90, cet hélicoptère de dernière génération vendu aux quatre coins du monde à plus de 500 exemplaires. AgustaWestland devait conduire cette campagne, le groupe italien étant le mieux placé pour diriger ce propect après le rachat en 2010 de l'usine de PZL à Swidnik (sud). Sauf que les Italiens ont préféré, sans le dire, jouer en solo et pousser l'AW149. 

Un soutien politique français demandé

Du coup, Eurocopter a perdu beaucoup de temps et a dû changer son fusil d'épaule et proposer l'EC725. "Nous sommes arrivés un peu tard dans la course", regrettait-on à l'automne au sein de la filiale d'EADS. Aujourd'hui, ce n'est plus le cas. Mais pour gagner, Eurocopter demande un soutien politique des autorités françaises. "C'est fondamental pour gagner ce contrat", souligne-t-on dans le groupe. Cela tombe bien : la France tente désespérément de relancer la coopération dans le cadre du Triangle de Weimar (Berlin-Paris-Varsovie). Ainsi, le ministre de la Défense, Jean-Yves Le Drian, était cet automne à Varsovie pour défendre la coopération européenne.