Rafale, NH90, Tigre : ce que peut espérer la France au Qatar

Par Michel Cabirol  |   |  880  mots
L'émir du Qatar, Cheikh Hamad bin Khalifa al Thani se prépare à démissionner dans le cadre d'une vaste transition politique Copyright Reuters
Le président de la République sera à Doha samedi. Le Qatar, qui doit organiser la Coupe du Monde de football en 2022, s'est fixé comme priorité de muscler ses systèmes de défense et de sécurité. D'où une volonté tous azimuts d'acquérir de nombreux équipements militaires. Et la France rêve de plusieurs grands contrats.

Vingt milliards d'euros sous le soleil du Qatar dans le domaine de la défense... C'est l'ensemble des campagnes commerciales auxquelles participent les industriels de l'armement tricolores. Bien sûr, la visite de François Hollande à Doha ce week end aiguise les appétits mais, selon des sources concordantes, le président de la République ne devrait pas participer, sauf énorme surprise, à la signature de contrats dans le domaine de la défense. D'autant que Sheikh Hamad ben Khalifa Al Thani devrait abdiquer, quelques jours après la visite de François Hollande, en faveur de son fils Tamim ben Hamad Al Thani, le prince héritier depuis 2003 et réputé francophile.

Pourquoi une telle frénésie d'acquisitions pour ce petit pays du Moyen-Orient ? "Cette accumulation de projets, qui arrivent en même temps, est générée par l'échéance de 2022, date à laquelle Doha organisera le Coupe du Monde de football", explique un bon connaisseur de ce dossier. Le Qatar a besoin renforcer sa sécurité intérieure et sa défense dans l'optique de cette échéance majeure, explique-t-il. Et dix ans, ce n'est pas de trop en vue de maîtriser sur le plan opérationnel tous ces équipements militaires sophistiqués. D'où cette accélération d'acquisitions qui ne tomberont pas toutes dans l'escarcelle de la France. Doha a par exemple déjà acheté des chars Leopard (avec à bord l'électronique de Thales) et l'artillerie, dotée de systèmes de communication de l'électronicien français, au groupe allemand Krauss-Maffei Wegmann (KMW) face notamment à Nexter, qui proposait des chars Leclec d'occasion en partenariat avec l'armée de terre française et le système Caesar.

Rafale, NH90 et VBCI en haut de la pile des Qataris

Pour autant, la visite devrait faire avancer des dossiers, notamment ceux qui sont au-dessus de la pile des Qataris comme l'avion de combat Rafale (Dassault Aviation), l'hélicoptère de transport NH90 (Eurocopter) et le véhicule blindé à roue (8x8) de Nexter. En juillet dernier, le Rafale avait beaucoup impressionné les Qataris à l'issue d'une campagne extrêmement positive par temps chaud (50 degrés) au Qatar... sans aucun coup de chaleur contrairement à certains de ses concurrents américains, les appareils de Boeing, les F-15 et les F-18. Les Qataris, qui ont un besoin estimé entre 24 et 36 appareils, ont également évalué le Typhoon Eurofighter et le F-16 Block 50/52 (Lockheed Martin). Le Rafale aurait la préférence des pilotes qataris et serait sorti vainqueur des évaluations techniques, selon un proche du dossier. Doha, qui dispose notamment de douze Mirage 2000-5 vieillissants, pourrait entrer en négociations exclusives avec Dassault Aviation à tout moment, explique-t-on à La Tribune. En revanche, il existe peu de chance pour qu'un contrat soit signé d'ici à la fin de l'année. Mais pourquoi pas 2014... Inch'Allah.

L'évaluation de l'hélicoptère TTH de l'armée de Terre, en pleine tempête de sable, a également impressionné à Doha, qui ont encore une douzaine de vieux Sea King d'AgustaWestland.. En octobre dernier, un comité d'évaluation qatari est également venu en France et en Italie pour visiter les sites de fabrication du NH90 chez Eurocopter à Marignane et d'AgustaWestland en Italie. Les pilotes qataris ont volé sur du TTH. Pour l'heure, la France travaille sur deux propositions, l'une étant de panacher la version terrestre (12 modèles TTH) et navale (10 NFH), l'autre étant de proposer que du NFH (22 exemplaires). Face au NH90, les Américains proposent le Seahawk de Sikorsky. En revanche, les Qataris préféreraient pour renouveler leur flotte d'hélicoptères de combat (soit une douzaine d'appareils) l'Apache de Boeing au Tigre d'Eurocopter. "L'Apache est plus gros, donc plus dissuasif pour le Qatar", explique-t-on à La Tribune. En outre, les Qataris n'ont pas eu la même profondeur d'évaluation sur le Tigre, note-t-on dans le groupe EADS. Au total, pour Eurocopter, cela représente deux campagnes d'environ 4 milliards d'euros.

Enfin, le VBCI de Nexter est également dans le groupe de tête à l'issue de récentes évaluations face à ses rivaux allemand (Boxer de KMW et Rheinmetall), finlandais (Patria AMV) et turc. Alors que le dossier sur le plan technique est bien avancé, Doha attend maintenant des offres financières pour l'acquisition de 400 véhicules pour les forces terrestres ainsi quelques exemplaires pour la garde spéciale de l'émir. Il est possible que Doha présélectionne rapidement deux concurrents.

MBDA et DCNS en stand-by

Les dossiers du missilier MBDA et du groupe naval de DCNS apparaissent moins prioritaires aux Qataris. Contrairement à l'Arabie saoudite, chasse gardée de Thales, le missilier MBDA dispose au Qatar de bonnes chances d'équiper les forces armées dans le domaine de la défense aérienne. Le groupe européen propose le VL-Mica ainsi que le système SAMP/T équipé de missiles antimissiles Aster Block 1 pour la défense anti-aérienne. A plus long terme, MBDA et le groupe naval DCNS proposeront des frégates équipées de systèmes anti-missiles Aster 30. Problème, les eaux peu profondes de l'émirat compliquent le dossier.. Enfin, le Qatar pourrait choisir rapidement à l'issue d'un appel d'offre un constructeur pour équiper la marine qatarie de quatre corvettes. DCNS est sur les rangs et propose son système de combat, le Setis.