Interdiction de vols quasi-générale pour le Boeing 737 MAX

Par Fabrice Gliszczynski  |   |  861  mots
Deux jours après l'accident d'un Boeing B737 MAX d'Ethiopian Airlines, les interdictions de vol concernant cet appareil se sont multipliés ce mardi. Seules les compagnies américaines continuent d'exploiter ce modèle. Mais des passagers et des personnels navigants expriment leur craintes de monter à bord.

Des passagers et des personnels navigants commerciaux qui refusent de monter à bord des Boeing B737 MAX; des interdictions d'exploiter cet avion qui se multiplient à l'échelle de la planète : deux jours après l'accident d'un B737 MAX 8 d'Ethiopian Airlines qui a fait 157 victimes, Boeing traverse une crise majeure.

Alors qu'aucune indication sur les causes du crash n'a été révélée et que les boîtes noires récupérées lundi n'ont pas parlé, une cascade d'interdictions de vols a été décidée ce mardi. La France, le Royaume-Uni, l'Allemagne, l'Italie, l'Autriche, l'Irlande, l'Australie, le Sultanat d'Oman, l'Inde, la Malaisie, la Corée du Sud, Singapour, la Pologne, mais aussi la quasi-totalité des opérateurs non-américains (Norwegian, Aeromexico, Turkish Airlines, Tuifly, Icelandair, Aerolineas Argentinas et Gol) ont fermé, ce mardi, leur ciel au B737 MAX. La veille, la Chine, l'Indonésie, la Mongolie, Ethiopian Airlines, Comair, Cayman Airways, avaient déjà interdit leur espace aérien à cet appareil. A l'heure où nous mettons sous presse, l'AESA, l'agence européenne de la sécurité aérienne, avait décidé elle aussi de suspendre l'appareil du ciel européen.

Pas d'immobilisation aux Etats-Unis

Ces interdictions inédites dans l'histoire de l'aviation civile sont décidées au nom du principe de précaution, alors même que les raisons de l'accident restent inconnues. Surtout ces décisions ne s'alignent pas sur celle des Etats-Unis, lesquels ont obligé lundi soir Boeing à apporter des modifications à certains logiciels sans demander l'immobilisation de l'appareil. De facto, seules les compagnies américaines et canadiennes continuent d'exploiter le vols.

Inquiétude des passagers américains

Pour autant, la panique gagne les personnels navigants et les passagers, un grand nombre refusant désormais d'embarquer à bord du B737 MAX ou réclamant de le clouer au sol. Pour rappel, cet accident fait suite à celui de la compagnie indonésienne Lion Air en novembre. Dans les deux cas, l'avion était neuf et s'est écrasé après le décollage.

Refusant d'attendre les conclusions de l'enquête, de nombreux Américains expriment en effet sur les réseaux sociaux leurs doutes sur la fiabilité de l'appareil et cherchent des garanties des compagnies aériennes exploitant ce monocouloir. Un hashtag #GroundBoeing737max8 ("clouer au sol le Boeing 737 MAX 8") a même été lancé sur Twitter pour que les autorités américaines fassent de même. Les lignes téléphoniques des services clients de SouthWest Airlines et d'American sont, elles, saturées d'appels.

"Nous recevons des questions de clients demandant si leur vol sera opéré par un Boeing 737 MAX 8", explique à l'AFP Michelle Agnew chez SouthWest Airlines, dont les 34 appareils devaient normalement voler mardi. Si la réponse est positive, s'ensuit soit une demande de changement de vol, soit une demande d'annulation.

Outre les passagers, la nervosité a également gagné les pilotes et personnels navigants. Le syndicat des personnels navigants (APFA), représentant des salariés d'American Airlines, a ainsi demandé à ses membres de ne pas monter à bord d'un 737 MAX 8 s'ils ne se sentent pas en sécurité. L'agence fédérale de l'aviation américaine, la FAA, doit "conduire une enquête approfondie sur le 737 MAX", enjoint pour sa part l'AFA, un autre syndicat de personnels navigants, tandis que le syndicat des pilotes ALPA appelle à la "prudence".

Des politiques demandent l'immobilisation de l'avion

Les appels demandant aux autorités américaines de clouer au sol les 737 MAX 8 se multiplient également chez les politiques. "La FAA devrait clouer au sol le 737 MAX jusqu'à ce que (...) nous soyons sûrs que l'avion est prêt à voler", préconise l'éminent sénateur républicain Mitt Romney sur Twitter.

"La FAA devrait changer sa position et immobiliser cet avion aux Etats-Unis jusqu'à ce que la sécurité soit garantie", a également exhorté la sénatrice Elizabeth Warren, candidate à l'investiture démocrate pour la présidentielle américaine de 2020.

Le coup est rude pour Boeing. Dernière génération du célèbre B737, ce best-seller de Boeing lancé dans les années 1960, le B737 MAX est un appareil stratégique pour l'avionneur américain. Mis en service il y a moins de deux ans, il est en effet positionné sur le marché des court et moyen-courriers de plus de 150 sièges, qui constitue près de 60% à 70% des livraisons d'avions pour Boeing mais aussi d'Airbus (présent sur ce segment de marché avec son A320neo).

Fin janvier, le carnet de commandes du B737 MAX  s'élevait à 4.661 exemplaires. Plus de 350 exemplaires volaient jusqu'à, dont 76 au sein de compagnies chinoises. L'avionneur va devoir arrêter les livraisons pour toutes les compagnies opérant dans des pays ayant interdit de vol l'appareil.

Après avoir dévissé de plus de 5% lundi, le titre de Boeing continuait à reculer mardi. A 18h35 heure de Paris, il chutait de plus de 7%.

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