PSA vire au rouge

Par Alain-Gabriel Verdevoye  |   |  890  mots
PSA a souffert l'an dernier en Europe, qui absorbe 58% de ses ventes. Ses imatriculations y ont baissé de 6,8% à 2.045.000 unités, le marché global ne reculant que de 0,6%. Copyright Reuters
Une part de marché en chute sur le marché européen, son principal débouché, une faible implantation dans les pays émergents et des coûts trop élevés pour un constructeur généraliste. Le constructeur, qui annonce aujourd'hui des mauvais résultats, est en panne.

Mercredi matin, PSA Peugeot Citroën doit annoncer de médiocres résultats financiers au titre de 2011. Le consensus des analystes estime que PSA devrait afficher une petite perte d'exploitation sur l'année dans l'automobile. Gaëtan Toulemonde, analyste réputé de la Deutsche Bank, estime ladite perte à 300 millions, dont un déficit de 700 millions imputable au seul second semestre. PSA a déjà indiqué qu'il s'attendait à une "perte significative" au deuxième semestre. Ce même analyste estime par ailleurs que PSA aura triplé sa dette à trois milliards d'euros au 31 décembre dernier.

Une situation dégradée en Europe

La situation du constructeur s'est en effet nettement dégradée sur les six derniers mois. Et ce, alors même qu'au premier semestre 2011, PSA enregistrait encore 405 millions de bénéfice d'exploitation pour sa division automobile. PSA a souffert l'an dernier en Europe, qui reste son principal marché puisqu'il absorbe 58% de ses ventes. Ses imatriculations y ont baissé de 6,8% à 2.045.000  unités, le marché global ne reculant que de 0,6%. Le groupe pâtit de la mauvaise tenue des marchés français et espagnol, où il joue un rôle clé, ainsi que du vieillissement de sa petite Peugeot 207. En Europe occidentale (voitures particulières seules), sa part de marché s'est effritée à 12,4% en 2011 (contre 13,4% un an plus tôt)... et même à 11,3% à peine sur le mois de décembre. En 2011, PSA a réalisé le plus faible taux de pénétration - et de loin - depuis au moins quinze ans! Inquiétant, car PSA car réalise l'essentiel de ses marges sur le Vieux continent.

Parts de marché limitées dans les pays émergents

Certes, PSA accroît ses volumes ailleurs. Il a ainsi progressé de 8% en Amérique latine, dépassant les 300.000 unités pour la première fois, mais le marché lui-même était en hausse de 29% en Argentine, de 3% au Brésil.  En Chine, PSA a crû de 3,3%... mais le marché lui-même a progressé de 6%. PSA y a donc perdu en pénétration. En Russie, PSA a aussi évolué moins bien que le marché (+35%, contre un marché à +39%). En outre, PSA reste un acteur relativement petit sur ces marchés émergents.  Il détient 5,5% du gâteau latino-américain, loin derrière les ténors (Fiat, Volkswagen, GM), 3,4% seulement du marché chinois, là aussi fort loin des performances de Volkswagen, GM, Hyundai-Kia, Nissan, Honda. Même chose en Russie, avec une petite part de 2,7%. Tout cela ne compense donc pas vraiment le recul marqué en Europe.

Ambiance plombée

L'ambiance chez PSA n'est pas à la fête. L'angoisse est bien palpable au siège parisien du groupe, avenue de la Grande-Armée. Certains commencent même à douter de la stratégie suivie par Philippe Varin., son président. "Des deux projets qu'il a initiés, l'alliance avec Mitsubishi a échoué et l'implantation en Inde a pris du retard", explique un cadre. "On manque de vrais visionnnaires de l'automobile comme chez Volkswagen", renchérit un autre. Certes, PSA dispose de certains atouts comme la méritoire montée en gamme - impulsée par l'ancien patron Christian Streiff -, qui doit permettre de dégager les marges suffisantes pour financer les implantations internationales. Citroën espère de la sorte 150-160.000 ventes de sa gamme distinctive DS cette année. Mais, le succès des toutes nouvelles DS4 et DS5 comme celui de la Peugeot 508, qui portent de toutes façons sur des volumes assez limités, reste à confirmer. Le prix de vente moyen reste très inférieur à celui de Toyota ou Volkswagen.

Un constructeur assez isolé

Le problème fondamental de PSA, c'est que le constructeur tricolore reste isolé sur la scène internationale, face aux Volkswagen, GM, Toyota ou à l'Alliance Renault-Nissan. Et ce, malgré ses coopérations ponctuelles avec Fiat (utilitaires), Ford (diesels), Toyota (petites voitures), BMW (moteurs à essence, technologie hybride), Mitsubishi (véhicules électriques et 4x4). Trop européocentré, spécialisé dans les véhicules petits et compacts qui sont les plus sensibles à la concurrence internationale et au facteur coûts, PSA pâtit d'une rentabilité structurellement faible. "PSA conçoit et produit trop cher", souligne un spécialiste. Le hic: un généraliste comme PSA ne peut pas répercuter ses surcoûts sur ses prix de vente, l'image du groupe dans le monde ne le permettant guère... 

En attendant la Peugeot 208

Sa forte dépendance vis-à-vis des usines françaises pèse évidemment sur lesdits coûts. Le groupe fabrique encore 37% de ses véhicules dans l'Hexagone, notamment les petites Citroën C3 et DS3, une majorité de ses futures Peugeot 208. Volkswagen, Fiat et a fortiori Renault assemblent un pourcentage de véhicules bien plus faible dans leur pays d'origine. Comble de malchance: le bonus-malus écologique, en vigueur dans l'Hexagone, a particulièrement nui aux modèles de gamme moyenne, ceux que PSA fabrique en France avec a priori ses plus fortes marges! PSA veut certes fermer son site d'Aulnay (région parisienne), traditionnellement peu compétitif. Mais pour cela, il devra affronter une sévère tempête socio-politique. Pour 2012, PSA peut compter sur son nouveau fer de lance à gros volumes, la Peugeot 208. Mais, ses principaux débouchés européens, notamment la France, seront les plus touchés par la crise actuelle.