Habitat indigne : "Il faut remettre à plat toutes les procédures ! " (Guillaume Vuilletet, LREM)

Par Propos recueillis par César Armand  |   |  694  mots
Guillaume Vuilletet est député (LREM) de la 2ème circonscription du Val d'Oise. (Crédits : Assemblée nationale – 2018)
INTERVIEW. Le député (LREM) du Val-d'Oise Guillaume Vuillet vient d'être missionné par le Premier ministre pour formuler des propositions en matière de lutte contre l'habitat indigne. Le parlementaire va notamment regarder quels outils administratifs, budgétaires et juridiques peuvent être mobilisés.

Trois semaines après la promulgation de la loi Élan, et dans le contexte du drame de Marseille, le gouvernement est désormais habilité à prendre, par voie d'ordonnance, des mesures visant à simplifier les mécanismes de lutte contre l'habitat indigne. C'est pourquoi le Premier ministre Edouard Philippe a demandé au député Guillaume Vuilletet (LREM) du Val d'Oise de travailler jusqu'à fin mai pour rationaliser les outils et gagner en efficacité dans ce domaine.

LA TRIBUNE - Vous devez "recenser les besoins opérationnels", "mener des entretiens avec les acteurs représentatifs" et "proposer des évolutions réglementaires et institutionnelles". Concrètement, comment allez-vous réformer le traitement de l'habitat insalubre en six mois ?

GUILLAUME VUILLETET - Avec la loi Élan, nous avons déjà renforcé considérablement les outils de justice contre les marchands de sommeil. Il existerait de 80.000 à 100.000 logements loués de cette façon alors que seuls 90 marchands de sommeil sont condamnés chaque année... De même, nous avons renforcé les incitations à faire des travaux dans l'ancien si nécessaire. Nous avons également réformé le régime de l'expropriation pour ne pas qu'il y ait des gens qui en profitent.

Désormais, nous allons remettre à plat les 13 polices spéciales (communale, intercommunale, départementale, régionale...) qui concourent à établir qu'un logement est insalubre. Cet enchevêtrement de réglementations n'est, en effet, pas de nature à favoriser une action rapide alors qu'on estime entre 400.000 et 600.000 le nombre de logements indignes. Or, aujourd'hui, il n'y en a "que" 3.000 qui sont déclarés insalubres.

C'est pourquoi, nous ferons un état des lieux, nous rendrons compte des dispositifs et nous articulerons tout cela avec la loi Élan. Je peux déjà vous annoncer que demain, la confiscation des biens des marchands de sommeil sera automatique, sauf si le juge décide du contraire. Cela va permettre de gérer le cas où une partie du bien appartient à quelqu'un d'autre ou s'il s'agit d'une occupation illicite sans que le véritable propriétaire n'en ait été informé.

Le code de la construction institue aujourd'hui deux procédures d'arrêtés de péril : le péril ordinaire et le péril d'urgence dit « péril imminent ». Allez-vous simplifier tout cela ?

Cela fait partie des choses qui vont être examinées. Il y a une palette - sans doute un peu touffue - des procédures... Il est donc nécessaire de tout remettre à plat pour voir comment gérer ces questions et surtout mieux les articuler. Quel est le meilleur niveau de décision entre la commune et l'intercommunalité ? La question se pose. Cela dépend des cas, répondrais-je intuitivement. En réalité, l'idée est d'intégrer toutes les mesures existantes et prendre tous les acteurs publics et privés qui entendent régler ce vrai problème. La diversité de situations est telle qu'il faut que nous continuions à travailler tous ensemble.

Comment, précisément ?

Les villes de Clichy et de Montfermeil, qui comptent beaucoup de copropriétés dégradées, étaient conçues pour des cadres parisiens, mais les infrastructures n'ont pas suivi... Des pavillons sont hérités de la grand-mère depuis vingt ans, mais les successions sont restées en plan et les squatteurs se sont installés. D'autres encore transforment leur garage pour en faire le studio du petit dernier, puis décident d'y loger le frère de leur femme de ménage. Ce problème ne se rencontre pas non plus que dans les métropoles et les quartiers populaires. Dans les Outre-mer, 40% des successions sont mal-gérées et connaîtraient ce fléau. Un quart des logements insalubres français s'y trouverait même... Un drame comme celui de Marseille a, certes, mis la lumière sur l'habitat dégradé, mais il masque le cas de ce marchand de biens exproprié et indemnisé à hauteur de 6 millions d'euros !

Il nous faudra donc regarder quels outils administratifs, budgétaires et juridiques doivent être mis en place. Comment peut-on détecter, analyser et gérer ce problème en amont et en aval avec les occupants ? Cela va guider nos réflexions.