Vers un plan national de lutte contre la surconsommation d'alcool ?

Par Jean-Yves Paillé  |   |  565  mots
L'alcool est la première cause d'hospitalisation (580.000 patients par an) et représente un surcoût annuel de 2,6 milliards d'euros pour les hôpitaux.
Les associations contre l'alcoolisme se sont réunies mardi afin de proposer des mesures pour s'attaquer à la surconsommation de boissons alcoolisées. Celles-ci pourraient être reprises dans un plan national, selon une source proche du dossier. Il y a quelques mois, l’État était épinglé par la Cour des comptes pour son manque d'investissement à ce sujet...

Les lobbies de l'alcool en France doivent-ils s'inquiéter ? D'après nos informations, les principales associations de prévention et de lutte contre l'alcoolisme (Anpaa, SFA...) se sont réunies mardi 14 mars afin de formuler des propositions pour lutter contre la surconsommation. La réunion interassociative a été organisée "en vue de l'élaboration d'un plan national alcool", a expliqué à La Tribune une personne préférant rester anonyme, et dont l'organisation était partie prenante de cette réunion. "Les choses se mettent en place. Dans quelques jours ou semaines, la Mission interministérielle de lutte contre les drogues et les conduites addictives (Mildeca, NDLR) devrait faire des annonces, dont certainement une journée sans alcool", a-t-elle ajouté.

Contactée par La Tribune, la Mildeca confirme simplement "un travail collectif sur des mesures de lutte contre les consommations excessives d'alcool". Mais elle assure "qu'il n'y a pas de préparation de plan, à proprement parler".

"Les discussions et les débats ont tourné autour de la prévention, des soins, de recherche, de l'implication des usagers, soit toute la palette d'une politique de santé", dit à La Tribune le docteur Bernard Basset, vice-président de l'Association nationale de prévention en alcoologie, qui a participé à la réunion. La forme sous laquelle les mesures définies seront relayées est encore floue, ajoute le docteur Bernard Basset. "Rapport complet, livre blanc... Ce n'est pas encore défini. Le résultat de ces discussions sera finalisé au printemps. Il sera prêt pour la prochaine mandature", estime-t-il. Il n'a néanmoins pas confirmé qu'un plan national alcool concret était en cours d'élaboration.

"Il y a un vrai problème de santé publique majeur, ne l'évitons plus !"

L'Etat pourrait donc serrer la vis après avoir été vivement critiqué sur sa politique de santé publique sur l'alcool dans un rapport de la Cour des comptes, il y a quelque mois. Les sages de la rue Cambon jugent que "l'État ne s'est pas donné les moyens d'infléchir les comportements à risque".

Le document déplore "une tolérance générale vis-à-vis de la consommation d'alcool"  due à un "héritage social et culturel, renforcé par les enjeux économiques". Le secteur des boissons alcoolisées génère pas moins de 22 milliards d'euros de chiffre d'affaires annuel et représente plus de 550.000 emplois directs et indirects.

Deuxième cause de mortalité en France

La Cour des comptes regrette, en outre, des "assouplissements" de la loi Évin du 10 janvier 1991 encadrant la publicité des boissons alcoolisées avec, notamment, la loi de modernisation du système de santé du 26 janvier 2016, qui inclut une mesure pour la défense des terroirs et de l'oenotourisme. Pour Bernard Basset, il est grand temps de sortir de l'attentisme face à la surconsommation: "Il y a une grande timidité des politiques sur ces questions. L'alcool est la deuxième cause de mortalité en France (49.000 morts par an. Il y a un vrai problème de santé publique majeur, ne l'évitons plus !"

L'alcool est la première cause d'hospitalisation (580.000 patients par an) et représente un surcoût annuel de 2,6 milliards d'euros pour les hôpitaux, selon un rapport de Institut de veille sanitaire, publié en 2015. Le professeur François Paille, coauteur de l'étude, estimait que l'ensemble du coût sanitaire et social de l'alcool "est de l'ordre de 20 milliards d'euros" par an.