Déchets ménagers : des coûts de gestion trop élevés et mal répartis

Par Virginie de Kerautem  |   |  782  mots
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Les coûts de gestion des déchets ménagers pour les collectivités locales augmentent de 6% par an en France depuis quelques années souligne la Cour des Comptes dans un rapport, avec des variations allant du simple au triple selon les collectivités. Il est notamment reproché aux collectivités de ne pas assez contrôler leurs prestataires privés, ni même leurs agents.

La gestion des déchets ménagers et assimilés (d'origine commerciale ou artisanale) a coûté 8 milliards d'euros en 2009, soit 124 euros par habitant et par an. Un chiffre en hausse de 6% par an depuis plusieurs années, apprend-on dans un rapport publié ce mardi par la Cour des Comptes qui a passé au peigne fin 150 collectivités et organismes locaux dans une vingtaine de régions françaises.

Plus précisément, les dépenses en fonctionnement des services de déchets ménagers et assimilés ont augmenté en moyenne de près de 30% entre 2004 et 2008. Mais ce sont les coûts en personnel qui ont crû le plus (+40%) tandis que la hausse liée à la collecte et les traitements de déchets ressort à 10%.

La transposition des directives européennes sur les déchets, plus exigeantes, et le Grenelle de l'environnement en 2007, ont de facto pesé sur les dépenses, en particulier en matière de prévention, de recyclage et de valorisation mais ces exigeances sont loin d'être les seules causes. Résultat, des "progrès réels" ont été notés en terme d'environnement. Et les auteurs de souligner que, contrairement à 2004,  les 128 incinérateurs en fonction "respectent désormais tous les normes en matière de pollution de l'air".

Des écarts trop importants d'une collectivité à l'autre

Mais il n'y a pas que des bonnes nouvelles. Le rapport pointe du doigt les fortes disparités de coûts relevés entre les collectivités. Par exemple, le produit de la taxe d'enlèvement des ordures ménagères, par habitant (TOEM, payée par plus de 90% de la population en même temps que les impôts locaux) " peut varier du simple au triple, voire au-delà". Ces disparités sont liées au fait qu'aucune obligation de couverture de 100% des coûts ne pèse sur cette taxe. Selon le ministère chargé de l'écologie, rapporte la Cour des Comptes, la TOEM est inférieure à 58 euros par habitant dans 25% des communes étudiées et grimpe à plus de 92 euros pour 25% d'autres communes.

Soulignant l'impact du tourisme sur la quantité des déchets collectés dans certaines collectivités, notamment dans le sud de la France, la Cour des Comptes conclut que "cette spécificité ne saurait constituer le seul élément justificatif des écarts de coûts constatés".

Des coûts mal maîtrisés

L'évolution des coûts pâtit donc des relations "difficiles" entre les collectivités et les prestataires privés, en particulier le manque de contrôle des premières sur les secondes. Parmi les exemples cités, voici celui de la communauté d'agglomération Chambéry Métropole (Savoie). Lors de l'arrêt de son usine pour mise aux normes, cette dernière a passé des marchés dits "d'exporation" de ses matières excédentaires pour un montant de 18 millions d'euros. Le problème, c'est que le groupement titulaire a privilégié les sites qui lui appartenaient, plus coûteux.

Un autre exemple concerne la communauté urbaine de Brest (Finistère) dont le montage contractuel complexe mis en place rend difficile le contrôle du délégant sur chacune des entreprises prestataires; d'autant plus qu'aucun objectif tant qualitatif que quantitatif n'a été fixé. Pire, "aucune clause ne traite des relations financières et opérationnelles entre ces entreprises et les compte-rendus annuels ne permettent pas l'exacte connaissance des dépenses et des recettes".

D'après la Cour des Comptes, le respect des règles de concurrence n'est en outre pas suffisamment respecté.

Mais l'évolution des coûts souffre également d'une mauvaise exploitation des équipements de traitement des déchets.

Des doutes sur l'organisation des modalités de travail

Le document s'en prend également au régime du "fini-parti". Ce principe permet à l'agent de quitter son poste dès qu'il a terminé sa collecte. Or, ces agents sont soumis aux 35 heures, payées par la collectivité. Sur l'ensemble de l'année, et si l'agent a réalisé des heures supplémentaires, il sera davantage payé. En revanche, s'il effectue moins d'heures que le nombre d'heures théoriquement prévues, le compteur est simplement mis à zéro. un compteur permet de savoir le nombre d'heures supplémentaires réalisées. Un dispositif que la Cour des Comptes considère comme "très favorable aux agents et coûteux pour la collecticité".

"Pollueur-payeur"

Jugeant les modalités de tarification du service public inadaptées, le rapport préconise de les faire évoluer; à commencer par faire converger la taxe et la redevance sur les ordures ménagères "dans un sens plus incitatif pour les usagers, permettant d'appliquer le principe du pollueur-payeur".