Total tenté par le modèle discount pour ses stations-service

Par latribune.fr  |   |  486  mots
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Ce serait une première. Total étudie une rupture fondamentale de son positionnement haut de gamme dans la distribution en transformant une partie de son réseau en stations à bas prix capables de rivaliser avec celles des supermarchés.

Est-ce une réponse à l'insistance avec laquelle le gouvernement tente de lutter contre l'actuelle envolée des prix à la pompe ? Pas vraiment puisque le pétrolier français teste son nouveau concept depuis avril 2010. À l'issue de l'expérience menée dans 45 stations dans l'Hexagone, Total est prêt à passer à la phase supérieure en transformant un grand nombre de ses 2.050 stations service à l'enseigne Total en stations à bas prix, "un prix très proche" de celui pratiqué dans les supermarchés, soit environ 10 centimes d'euro de moins au litre que dans les réseaux traditionnels. "Nous étudions un déploiement progressif. La décision doit être prise en 2011", déclare à La Tribune Jérôme Paré, directeur de l'activité distribution de Total en France.

L'enjeu pour Total est à la hauteur du bouleversement envisagé par la major qui mise sur le haut de gamme dans ses stations service depuis toujours. Même l'irruption de la grande distribution qui a réussi à capter 60 % du marché français des carburants en baissant les prix n'avait pas réussi à faire bouger le leader français. Le pétrolier a néanmoins fini par décider de tenter d'enrayer la fuite des particuliers de ses enseignes rouge. "Entre 2002 et 2009, les ventes aux particuliers dans l'enseigne Total ont chuté de 40 %", précise Jérôme Paré.

"Depuis 2002, le prix du gasoil a pratiquement doublé en valeur absolue. Plus le carburant pèse sur le budget des ménages, plus les particuliers vont rechercher les stations à bas prix", ajoute-t-il. Or, les particuliers consomment un peu plus de la moitié (53 %) des carburants vendus en France. Jusqu'à présent, Total a réussi à maintenir sa part de marché de 20 % des volumes en France grâce au doublement, entre 2002 et 2009, des ventes de son enseigne bleue Elf (278 stations), déjà positionnée sur le bas prix depuis 2002, et grâce au dynamisme de ses ventes aux poids lourds dans le réseau AS24.

"Tripler les volumes vendus"

Quelles stations vont se lancer dans le discount ? "Pour conserver la même marge mensuelle, il faut pouvoir tripler les volumes vendus", indique Jérôme Paré. Les stations concernées, dont Total garde le nombre secret, sont celles dont l'emplacement sur un axe passant et l'espace disponible pour implanter de nouvelles pompes leur permettraient de servir trois fois plus de clients dans la journée. Total va-t-il amener ses concurrents à lui emboîter le pas ? "En France, les marges sont déjà les plus faibles d'Europe, il est donc peu probable que l'on assiste à une guerre des prix", estime Jérôme Paré. La grande distribution n'a d'ailleurs pas surenchéri à la baisse dans les zones où Total teste ses prix discount depuis un an, autour du Havre, de Nantes et d'Aix-en-Provence. Compte tenu des investissements à consentir et de la minceur de sa marge (moins de 1 centime par litre de marge nette), le pétrolier n'a pas droit à l'erreur.