Electricité  : et si le courant ne passait plus entre la France et l'Allemagne ?

Par Marina Torre  |   |  619  mots
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La France pourrait manquer d'électricité dès cet hiver, prévient Capgemini. L'importation d'énergie en provenance d'Allemagne , nécessaire pendant les pics de consommation, souffrirait des fermetures de réacteurs décidées au printemps après la catastrophe de Fukushima.

La fermeture de plusieurs réacteurs en Allemagne pourrait avec des conséquences en France dès cet hiver. Une étude sur le marché de l'énergie en Europe, publiée ce mercredi par l'entreprise de conseil et de services informatiques Capgemini, s'inquiète en effet du risque d'approvisionnement en courant. "Il existe une réelle menace sur la continuité de la fourniture électrique pendant l'hiver 2011-2012 et les hivers suivants", notent les auteurs de cette enquête dans un communiqué.

Comme la consommation augmente régulièrement - de 4,7% en 2010 -,  la France doit parfois importer de l'électricité, notamment d'Allemagne. Cette année, la production pourrait en outre souffrir des conditions météorologiques marquées par une forte sécheresse. "Lors des pics de consommation, surtout à midi ou vers 19h", l'énergie risque de manquer, explique Colette Lewiner, chargée de cette étude pour Capgemini. "Pour un degré de moins par rapport aux normales saisonnières, il faut importer 2.300 Mw/H", poursuit-elle.

Or, outre-Rhin, après la catastrophe de Fukushima, sept réacteurs ont été arrêté et un autre n'a pas été remis en marche, ce qui réduit les capacités d'exportations de 8.000 Mw/H. Parallèlement, la consommation d'électricité augmente (de 9,5% en 2010). Conséquence : l'Allemagne sera peut-être contrainte d'importer elle aussi, et, la France devra trouver à se fournir ailleurs.

La Bretagne et la région Provence-Alpes-Côte-d'Azur seraient particulièrement touchées. "Les industries pourraient être priées de réduire leur consommation ou de mettre en marche des sources d'énergies alternatives. Quand aux Français, comme cela a déjà été le cas par le passé, ils seront peut-être incités à retarder certaines activitées gourmandes en électricité comme les lessives par exemple", détaille Colette Lewiner.

Du côté du gouvernement, ces inquiétudes sont prises au sérieux. "Nous devons être vigilants", a ainsi affirmé Eric Besson le ministre de l'Energie qui répondait aux questions des députés. Il a aussi indiqué qu'une réunion afin de "prendre toutes les précautions nécessaires". Ces discussions auront lieu le 11 novembre, au lendemain de la remise d'un rapport sur le sujet par le Réseau de Transport Electrique, qui gère les infrastructures en France.

Une nuance de taille toutefois, le ralentissement économique pourrait atténuer ces risques de coupure de courant s'il s'accompagne d'une baisse de consommation d'électricité et de gaz nécessaires à la production de biens et services.

Plus de 1.000 milliards d'euros nécessaires d'ici 2020

A long terme également, le bureau de recherche prévoit  "des conséquences négatives sur la sécurité d'approvisionnement" en électricité en Europe. Premier effet probable : une augmentation des prix de l'énergie susceptible de remettre en question les tarifs de l'électricité actuellement en vigueur dans l'Hexagone.

"Si les autorités de régulation de l'énergie et les gouvernements ne mettent pas en place un nouveau cadre réglementaire incitant les acteurs à réaliser les 1.100 milliards d'euros - d'ici à 2020 - d'investissements nécessaires dans l'Union européenne, la continuité de la fourniture pourrait être menacée ", note l'Observatoire européen de l'énergie. Cette évaluation ayant été faite avant la catastrophe de Fukushima, c'est même 1.300 milliards d'euros d'investissement qui pourraient être nécessaires.

La décision de l'Allemagne d'abandonner progressivement la production de l'énergie nucléaire jusqu'en 2022, devrait "accroître sa dépendance vis-à-vis du gaz russe", est-il également pointé.

En revanche, Capgemini semble plutôt confiants concernant le développement du nucléaire sur le reste du continent. "La grande majorité des réacteurs nucléaires en construction sera terminée, probablement avec du retard par rapport au planning initial".