OGM : 20 ans de controverse en Europe

Par Marina Torre  |   |  778  mots
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Entre moratoires et autorisations, études et contre-expertises, difficile de débrouiller le dossier des OGM rouvert avec fracas mercredi à l'occasion de la publication d'un rapport alarmant par l'équipe du Français Gilles-Eric Séralini. Le point.

Les OGM nous empoisonnent-ils ? Faut-il les interdire ? Des questions qui agitent ONG, industriels, pouvoirs publics et consommateurs depuis des dizaines d'années. L'étude publiée mercredi par l'équipe de Gilles-Eric Séralini a remis le sujet sous le feu des projecteurs. Pendant deux ans, ces chercheurs ont étudié les effets de l'ingestion d'un maïs transgénique breveté par Monsanto. Résultat : la mortalité est accrue. Dans une vidéo publiée par le Nouvel Observateur, Gilles-Eric Séralini affirme que "ce n'est pas une étude de plus, mais celle qui manquait". De fait, des dizaines d'expérimentations ont été menées aboutissant à des décisions parfois contradictoires et des retours en arrière en France comme en Europe. Et qui font débat depuis plus de 20 ans.

1992 : L'Union européenne autorise le dépôt de brevets sur des organismes vivants. Une possibilité qui existait depuis 1980 aux Etats-Unis. Deux ans avant la décision de Bruxelles, en 1990, deux directives avaient été adoptées pour encadrer la recherche sur les OGM et leur dissémination dans la nature. L'une d'elle rend obligatoire les évaluations environnementales et les études d'impact sur la santé humaine.

1996 : La Commission européenne décide d'autoriser la commercialisation d'un maïs transgénique dans les pays de l'UE.

1997 : Alain Juppé, alors Premier ministre, annonce l'interdiction en France de la mise en culture de semences de maïs transgénique. La même année, le Parlement européen demande aux Etats européens de suspendre la commercialisation du maïs transgénique dans l'UE, le temps d'établir son innocuité pour la santé. A la fin de l'année, après la victoire des socialiste aux élections législatives, le nouveau Premier ministre Lionel Jospin autorise, avec un encadrement, la commercialisation du maïs transgénique.

1998 : Des associations écologistes (Greenpeace, France Nature Environnement...), familiales et de consommateurs ainsi que la confédération paysanne lancent le mouvement "Alerte aux OGM". Six mois plus tard, la production du MON810, variété de maïs de Monsanto ainsi que le TER 25 sont autorisées en Europe. En septembre, la commercialisation du maïs transgénique est à nouveau interdite en France. Un moratoire jugé illégal par Bruxelles.

1999 : Une étude publiée par la revue Nature met en lumière l'effet du pollen d'un maïs transgénique sur un papillon. Conséquence : la Commission européenne suspend les procédures d'homologation de certaines variétés de maïs transgénique. La même année, des agriculteurs conduits par la Confédération paysanne détruisent des plants de riz OGM, ce qui aboutira à des condamnations. Au niveau européen, des dissensions se font jour. Deux déclarations sont adoptées lors d'une réunion à Luxembourg. La première se borne à renforcer étiquetages et évaluations. La seconde, signée par la France, le Danemark, la Grèce, l'Italie et le Luxembourg prônent la suspension de nouvelles mises sur le marché.

2001 : Le Programme des Nations unies pour le développement définit les biotechnologies comme le "seul et meilleur outil" du développement de l'agriculture dans les pays défavorisés. La même année, un rapport de l'Agence française de sécurité sanitaire des aliments (Afssa), conclue à l'existence de traces d'OGM dans des semences dites conventionnelles mais déclare que cela ne constitue pas en soi un risque pour la santé.

2006 : L'organisation mondiale du commerce appelle l'UE à l'ordre et déclare illégales certaines interdictions relatives aux OGM. En avril, Bruxelles renforce le contrôle scientifique des OGM avant de les autoriser.

2007 : Le Grenelle de l'Environnement préconise la suspension des cultures d'OGM en France jusqu'à ce qu'une expertise indépendante soit publiée.

2008 : Par décret, la production du MON810 est interdite en France. L'année suivante une étude de l'Afssa affirmant que ce maïs ne présente aucun danger est publiée, ce qui n'aboutit pas à une levée du moratoire. De nouvelles opérations de fauchage ont lieu.

28 novembre 2011: Le Conseil d'Etat annule les arrêtés mais le gouvernement Fillon passera outre, comme l'annoncent les ministères de l'écologie et de l'agriculture français le 13 janvier 2012.

Décembre 2011 : L'Autorité européenne de sécurité des aliments publie un rapport favorables aux OGM. Or, l'organisme est dénoncé par certaines ONG comme étant partial.

20 février 2012 : Le gouvernement français saisi  la Commission européenne pour lui demander de suspendre l'autorisation de mise en culture du maïs transgénique Monsanto 810.

15 septembre 2012 : le Premier ministre annonce que le moratoire sur l'interdiction de la culture du MON810 sera renouvelé. 

19 septembre 2012 : Publication de l'étude Séralini.