Le conseil économique et social se penche sur l'énergie

Par Marie-Caroline Lopez  |   |  898  mots
Eco-quartier Eden Bio, concu par l'architecte Edouard Francois, à Paris XXème. Copyright Reuters
Une TVA sur les travaux énergétiques ramenée à 5%, une aide sociale au chauffage étendue au fioul et au butane... Le Conseil économique, social et environnemental formule une série de recommandations dans deux projets d'avis soumis au vote ces mardi et mercredi.

Télescopage bienvenu des initiatives. Le Conseil économique, social et environnemental (CESE) soumet mardi et mercredi au vote de son assemblée plénière deux projets d'avis sur deux sujets d'actualité: l'efficacité et la transition énergétiques, au centre de l'action de l'actuel gouvernement en matière d'énergie. Pourtant, ces travaux, issus d'une auto-saisine du CESE, ont été lancés... il y a un an. Ils tombent cependant à pic.

Ramener la TVA sur les travaux thermiques de 10 à 5%

Le premier s'attaque à l'efficacité énergétique, l'une des priorités fixées par François Hollande en matière d'énergie. «C'est précisément parce que le président de la République a décidé de faire de la rénovation thermique des logements un axe majeur de son quinquennat, que nous nous interrogeons sur la pertinence de passer, au 1er janvier dernier, de 7 à 10% la TVA sur ces travaux», souligne Jacky Chorin (CGT-FO), co-rapporteur avec Anne de Béthencourt (membre de la Fondation Nicolas Hulot) du projet d'avis sur l'efficacité énergétique. «Nous recommandons de ramener ce taux à 5%», déclare-t-il.

160.000 logements seulement rénovés en 2011

«Le Grenelle avait déjà fixé un objectif de 400.000 logements à rénover par an. Le gouvernement vient de le relever cet engagement à 500.000. Mais, en 2011, 160.000 logements seulement ont été rénovés», souligne Jacky Chorin, pour expliquer le but de cet avis. «Nous avons pointé des problèmes et proposé des pistes pour le financement», ajoute-t-il. Parmi les problèmes, un exemple: «le Grenelle de l'environnement a rendu obligatoire des travaux dans le secteur tertiaire public et privé. Mais le décret qui doit préciser le niveau de ces travaux n'est jamais sorti».

8 à 13 milliards d'euros par an à trouver

«Pour financer cette mesure de rénovation des logements, il faut trouver entre 8 et 13 milliards d'euros supplémentaire par an puisque pour 500.000 logements la facture va s'élever entre 10 et 15 milliards d'euros. L'Etat en finance aujourd'hui deux milliards», précise le co-rapporteur. «Nous proposons un certain nombre de pistes autour de la BPI, la notion de tiers investissement et le programme de soutien proposé par CDC Climat».

"Accélèrer la mise en place de critère de performance énergétique"

Outre le bâtiment (qui happe 44% de l'énergie consommée en France), le secteur industriel (22% de la demande française d'énergie) recèle un potentiel pour les efforts d'efficacité énergétique. «Nous recommandons notamment d'accélérer la mise en ?uvre de la directive Eco-Conception qui introduit un critère de performance énergétique sur les produits vendus en Europe», indique Jacky Chorin.

"Etendre l'aide sociale au chauffage au fioul et au butane"

En matière de lutte contre la précarité énergétique, «il faut étendre l'aide sociale réservée aujourd'hui aux utilisateurs de gaz et d'électricité à tous les modes de chauffage dont le fioul et le butane/ propane», estime le CESE dans cet avis qui sera soumis au vote. «Plus de 50% des quelque 4 millions de ménages en précarité énergétique sont des personnes âgées, propriétaires de leur logement datant souvent d'avant la première réglementation thermique de 1974 et qui se chauffent en majorité au fioul», note Jacky Chorin.

Un cadre pour le débat national sur la transition énergétique

Les ministres du Logement Cécile Duflot et de l'Energie Delphine Batho vont venir commenter dès mardi après-midi au CESE ces projets d'avis, et dire comment elles vont s'en inspirer. Pour le deuxième projet d'avis, sur la transition énergétique, c'est facile. Il fournit comme un cadre méthodologique au débat national sur la transition énergétique, lancé laborieusement en novembre dernier. L'un de ses deux co-rapporteurs, le climatologue Jean Jouzel est d'ailleurs membre du comité de pilotage du débat national.

Une vaste confrontation de points de vue

«Dans ce travail, le plus important, c'est presque le processus qui a conduit à prendre collectivement ces recommandations», souligne Catherine Tissot-Colle (directeur de la communication d'Eramet, groupe des entreprises), l'autre co-rapporteur de ce projet d'avis. «Associations environnementales, syndicats, entreprises, artisans, jeunes... qu'ils soient pro ou anti nucléaires, qu'ils aient une approche régionaliste ou jacobine, toutes ces visions se sont confrontées pour donner ces avis», explique-t-elle.

Intégrer la question des transports dans le débat national

Sur le fond, «s'il faut aller vite sur la transition énergétique, il ne faut pas se précipiter mais bien évaluer toutes les mesures sur le plan environnemental et socio-économique, ces deux critères étant pondérés à égalité», souligne le co-rapporteur. En d'autres termes, «ne pas négliger les critères de compétitivité et d'emploi. Sur 109 pages, ce projet d'avis liste tous les aspects à prendre en compte pour réussir non seulement le débat, mais surtout la future transition énergétique. Notamment, ne pas se focaliser sur la question du mix électrique et de la place du nucléaire mais prendre en compte toutes les énergies et les problématiques».

Et intégrer «de manière prioritaire» la question des transports (30% de la consommation d'énergie) dans le débat national sur l'énergie. «L'usage des moteurs électriques, hybrides ou à gaz naturel, puis renouvelables, devrait être accéléré. Nous recommandons qu'une saisine spécifique du CESE soit consacrée à la problématique des transports au regard de la transition énergétique», affirment les rapporteurs.