EPR Flamanville : le chantier progresse et les ennuis commencent pour Bouygues

Par latribune.fr  |   |  628  mots
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Le chantier de l'EPR de Flamanville a franchi une étape clé mardi avec la pose du dôme sur le réacteur. Une performance qui ne suffira pas à faire oublier les nombreux problèmes rencontrés par EDF et Bouygues. Retard, explosion des coûts, mise en cause des conditions de sécurité, et soupçons de travail illégal... revue des déboires rencontrés par l'électricien et le géant du BTP.

La fin approche pour le chantier de l'EPR de Flamanville. Entamé fin 2007, il a achevé sa dernière phase critique pour la partie BTP mardi avec la pose du dôme surplombant le réacteur... avec quatre ans de retard. Ce dôme en acier de 260 tonnes (le poids d'un Airbus A380 à vide) dont l'installation a nécessité l'utilisation de "Big Benny", la plus grande grue du monde, doit encore être recouvert de béton. Toutefois, le réacteur ne sera pas mis en route avant fin 2016.

  • Le coût du chantier bien plus élevé que prévu

Son image à l'international n'en reste pas moins ternie par divers couacs portant notamment sur des malfaçons supposées et sur un coût qui s'est finalement envolé, passant d'un budget initial de 3,3 milliards d'euros à 8,5 milliards d'euros. Le retard, à lui seul, causerait à lui seul un surcoût de 500 millions d'euros du fait de l'inflation, selon EDF.

Selon Greenpeace, ce surcoût dans la fabrication de l'EPR remet en cause sa compétitivité. Selon l'ONG, le coût de l'électricité issue de l'EPR reviendrait à 100 euros le mégawattheure (MWh), contre 82 euros le MWh pour l'éolien terrestre.

  • Bouygues mis en cause pour sa gestion de la sécurité

L'énorme retard sur la partie BTP du chantier et les coûts supplémentaires ne sont par ailleurs pas les seuls problèmes rencontrés par les quelque 150 entreprises et 3.400 personnes qui y ont oeuvré. Parallèlement à la pose du dôme, le parquet de Cherbourg a annoncé des poursuites pour "homicide involontaire" contre Bouygues, à la tête du pôle BTP du chantier, et ses sous-traitants Normetal et Tissot. Le procès en correctionnelle doit avoir lieu le 12 novembre prochain à Cherbourg.

L'histoire remonte au 24 janvier dernier, lorsqu'un soudeur de 37 ans, a fait une chute mortelle de 18 mètres. Cette même année, le chantier avait été la scène de trois accidents mortels. EDF, le maître d'oeuvre, n'est pour sa part pas mise en cause. Seule la chute du soudeur de 37 ans fait l'objet de poursuites, mais des questions sur la sécurité sur le chantier ont commencé à se poser de manière pressante lorsque le responsable de la sécurité de Bouygues a été licencié en 2010 après avoir exercé son droit de retrait. Les Prud'hommes ont jugé en février ce licenciement "sans cause réelle ni sérieuse". Bouygues a fait appel. Interrogé par l'AFP, l'ex-chef de sécurité parle d'un "état sécuritaire du chantier où la notion de danger grave et imminent (était) permanente" et donne de nombreux exemples.

  • Bouygues soupçonné d'avoir employé des travailleurs illégaux

Par ailleurs, selon une source judiciaire, il y a de "fortes" probabilités que Bouygues et deux sous-traitants, soient renvoyés en correctionnelle, vraisemblablement début 2014, pour "travail illégal" sur le chantier. Dans cette affaire, où l'Autorité de sûreté nucléaire (ASN) avait établi qu'en 2010, un accident du travail sur quatre n'avait pas été déclaré, EDF n'est pas non plus inquiété.

Deux sous-traitants de Bouygues sont accusés de ne pas avoir payé leurs cotisations sociales: le roumain Elco et le chypriote Atlanco, avec qui Bouygues avait rompu son contrat en 2011. Environ 700 salariés, essentiellement Roumains et Polonais sont concernés. Leur dette à l'égard de l'Urssaf s'élèverait au moins à 10 millions d'euros de cotisation, en grande partie liée à l'EPR, selon le parquet de Cherbourg.

En outre, les prud'hommes de Cherbourg doivent rendre le 4 décembre une décision concernant la plainte de 62 salariés polonais de l'EPR, pour des problèmes similaires, dont 16 contre Bouygues, selon leur conseil.

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>>> VIDEO Pose du dôme de l'EPR de Flamanville sur le bâtiment réacteur (BFM TV)