Fiscalité écologique : « La polémique montre que le sujet reste difficile » (Matthieu Orphelin)

Par Propos recueillis par Dominique Pialot  |   |  497  mots
Le député Matthieu Orphelin, proche de Nicolas Hulot, a annoncé le 6 février qu'il quittait le groupe LREM.
INTERVIEW. Emmenés par Matthieu Orphelin (ex-LREM, proche de Nicolas Hulot), 86 députés de plusieurs groupes politiques ont appelé le 12 février dans une tribune à trouver une "fiscalité carbone efficace, juste socialement" après l'abandon de la taxe carbone au plus fort de la crise des "Gilets jaunes".

LA TRIBUNE - Vous êtes à l'initiative de la tribune signée par 86 députés, appelant à « une fiscalité carbone juste ». Avez-vous été surpris par les réactions que sa publication le 13 février dernier a suscitées ?

MATTHIEU ORPHELIN - Ce qui s'est passé, ce brouhaha et cette polémique autour de cette tribune, sont très étonnants. En effet, nulle part on n'y demande de réouvrir la trajectoire d'augmentation de la taxe carbone. On ne cite même pas la taxe carbone ! On ne parle qu'accompagnement, nouvelles aides, extension de la fiscalité carbone à d'autres secteurs... Ce que nous préconisons, c'est tout sauf une taxe supplémentaire ! Les déclarations de François de Rugy [affirmant le 12 février que le retour de la taxe carbone était sur la table, ndlr], par exemple, vont bien plus loin !

Bien sûr, la polémique a été alimentée par certains députés de l'opposition, mais la violence de la réaction montre qu'alors même que la fiscalité et l'écologie sont deux des quatre thématiques du Grand débat, il reste compliqué de tenter de tirer les leçons de ce qui n'a pas fonctionné.

Quelles sont les pistes à suivre aujourd'hui ?

Pour l'instant, la priorité, c'est de rendre cette fiscalité juste. Que disent les « Gilets jaunes » ? Les taxes augmentent, nous n'avons pas d'alternative à nos modes de déplacement ou de chauffage et on ne voit pas à quoi servent les revenus de cette fiscalité... Il faut donner aux gens les moyens de changer. Cela signifie un meilleur accompagnement, une simplification des aides, une avance totale du coût des travaux de rénovation pour les ménages précaires...

Dès l'été dernier, j'avais adressé au Premier ministre une note proposant d'accorder sous conditions de ressources aux actifs des territoires ruraux et périurbains une prime mobilité-travail exceptionnelle et transitoire, versée uniquement les années où le prix du baril est très élevé et financée par l'augmentation mécanique des recettes de TVA liées à la hausse du prix du baril. Il faut s'inspirer des exemples étrangers qui fonctionnent. En France, la taxation des vols intérieurs, par exemple, qui rendrait plus juste la fiscalité carbone, rapporterait de 1 à 3 milliards par an.

Quelles leçons tirez-vous de cette polémique et, dans ce contexte, comment pouvez-vous avancer sur le sujet, d'autant plus après les déclarations du président lui-même ?

La réaction d'Emmanuel Macron [qui s'est dit opposé à plus d'impôts, ndlr] n'est pas orthogonale à notre position. La polémique provoquée par la publication de cette tribune est injustifiée, mais elle montre que le sujet reste difficile. Il faut maintenant trouver le bon endroit pour faire naître une intelligence collective autour de cette thématique.

___

▶︎ En complément de cet article de La Tribune Hebdo n°281 proposé gratuitement sur LATRIBUNE.frLISEZ NOTRE ENQUÊTE :

"Taxe carbone : l'impossible retour de la hausse ?" (article abonné)