Pesticides, pêche, huile de palme... les députés reculent

Par Tiphaine Honoré  |   |  521  mots
L'interdiction générale des pesticides néonicotinoïdes, connus pour leurs effets toxiques sur les insectes pollinisateurs, était prévue pour le 1er janvier 2017.
Réunis depuis mardi autour de la loi sur la biodiversité, les députés ont voté jeudi trois décisions attendues sur les sujets controversés que sont l'huile de palme, les pesticides néonicotinoïdes et le chalutage en eau profonde.

Les abeilles pourront bien attendre un an et demi de plus. L'interdiction générale des pesticides néonicotinoïdes - connus pour leurs effets toxiques sur les insectes pollinisateurs - prévue pour le 1er janvier 2017 a finalement été adoptée par l'Assemblée Nationale... mais repoussée à septembre 2018.

Un essai encore à transformer au Sénat pour la député PS et ancienne ministre de l'Environnement Delphine Batho :

Au terme d'un débat intense, les députés ont adopté, par 30 voix contre 28, un amendement en ce sens du président de la commission du Développement durable, Jean-Paul Chanteguet (PS). L'objectif, a déclaré son auteur, est d'"adresser un signal fort aux groupes chimiques, aux agriculteurs, et à l'exécutif".

Un arrêté fournira "des réponses concrètes aux exploitants agricoles, confrontés à la brusque apparition d'un ravageur, qui pourrait compromettre leurs récoltes". Et la liste des alternatives aux néonicotinoïdes sera déterminée sur la base d'un avis de l'Anses (l'Agence française de sécurité alimentaire et sanitaire).

La taxe "Nutella" réduite

En deuxième lecture du projet de loi biodiversité, les députés ont également revu à la baisse jeudi la surtaxation de l'huile de palme, surnommée "taxe Nutella". Son vote au Sénat avait entraîné les protestations des deux principaux producteurs mondiaux, l'Indonésie et la Malaisie, ainsi que de l'industrie agroalimentaire.

Les sénateurs, à l'initiative des écologistes, avaient en première lecture créé une contribution additionnelle très élevée (300 euros la tonne en 2017, 500 euros en 2018, 700 en 2019 et 900 à partir de 2020), les députés l'ont finalement réduite hier à 90 euros, avec le soutien du gouvernement.

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Tout en envoyant un "signal", "cette taxation est plus réaliste. Nous ne voulons ni d'un boycott de ces deux pays, ni même de l'huile de palme", a plaidé la secrétaire d'État à la Biodiversité, l'écologiste Barbara Pompili.

La pêche en eau profonde confortée

La colère des pêcheurs a aussi fait reculer l'Assemblée nationale sur l'interdiction du chalutage en eaux profondes. Les députés l'avaient voté lors de la deuxième lecture du texte en commission, arguant que cette pêche affectait des "espèces menacées", comme le grenadier de roche ou la lingue bleue, et était "peu génératrice d'emplois directs" entre "44 et 112 marins" à temps plein, selon le député centriste Bertrand Pancher.

L'écologiste Laurence Abeille a dénoncé "un mode de pêche raclant les fonds marins" et "sans intérêt économique" car "fortement subventionné".

Mais le vote des députés en commission, avec l'aval du gouvernement, avait suscité un appel, notamment du Comité régional des pêches de Bretagne, à des blocages symboliques des ports de pêche pour protester contre "la menace d'une interdiction totale du chalutage, soit la disparition de toute une filière économique".