Aluminium : le Britannique GFG Alliance intensifie ses investissements en France

Par Lysiane J. Baudu  |   |  731  mots
« On nous demande souvent quelle est notre solution miracle, s'amuse Jay Hambro, chief investment officer de la société GFG (Gupta Family Group) Alliance, de passage à Paris. En fait, il n'y en a pas, si ce n'est d'analyser la situation avec une nouvelle vision stratégique, qui s'inscrit dans la durée, de gérer, le cas échéant, des problèmes d'ordre financier, et de coller aux besoins des clients. » (Crédits : Reuters)
Le géant de l'aluminium a trouvé dans l'Hexagone la bonne alchimie pour ses projets. Après le rachat annoncé de la plus grande usine d'électrolyse d'aluminium d'Europe, à Dunkerque, la société a repris ARI, le dernier fabricant français de jantes, à Châteauroux.

« Nous avons noté ce que le président Macron faisait en matière de réformes et nous avons décidé d'investir dans l'Hexagone », déclare d'emblée Jay Hambro, chief investment officer de la société GFG (Gupta Family Group) Alliance, de passage à Paris.

Le matin même, il a rencontré les autorités françaises pour signaler la deuxième acquisition du groupe britannique, via sa filiale Liberty Engineering, celle du dernier fabricant français de jantes en aluminium, AR Industries (ARI), basé à Châteauroux et en procédure de sauvegarde depuis janvier dernier. « Nous n'avons reçu aucune subvention de la part de l'Etat ni de la région, et nous n'avons pas de responsable du désinvestissement dans notre groupe », précise-t-il dans un sourire. Autrement dit, l'investissement, dont le montant n'a pas été rendu public, s'inscrit dans la stratégie à long terme du géant britannique dans l'Hexagone. Le redressement, sur trois ans, d'ARI, qui a été récemment rebaptisé Liberty Wheels France, permettra de sauver environ 350 emplois directs et des centaines d'autres indirects.

Opportunités industrielles

Si GFG Alliance renforce ainsi sa présence sur le territoire, en amont comme en aval, c'est qu'elle y voit des opportunités industrielles à saisir. En janvier 2018, Sanjeev Gupta, le président du groupe, avait d'ailleurs annoncé une expansion en France, concrétisée par le rachat d'Aluminium Dunkerque, plus grande usine d'électrolyse d'aluminium d'Europe et ancien fleuron de Péchiney, à Rio Tinto, pour un montant de 500 millions de dollars. « Pour Rio Tinto, ce n'était qu'une toute petite activité, tandis que c'est un superbe ajout pour notre métier de base, explique le spécialiste, d'autant qu'au lieu de produire de l'aluminium brut, nous avons apporté de la valeur ajoutée, sous forme de fabrication de plaques et de lingots d'aluminium servant à la carrosserie et aux jantes. »

Vision stratégique

Changement de stratégie industrielle, plus tournée vers l'automobile, modernisation des process, évolution du management, plus collaboratif, pour les quelque 600 salariés de Dunkerque, et renforcement des relations clients sont autant de secrets du groupe britannique. « On nous demande souvent quelle est notre solution miracle, s'amuse Jay Hambro. En fait, il n'y en a pas, si ce n'est d'analyser la situation avec une nouvelle vision stratégique, qui s'inscrit dans la durée, de gérer, le cas échéant, des problèmes d'ordre financier, et de coller aux besoins des clients. »

Ainsi, en ce qui concerne l'ancienne ARI, l'investisseur britannique a pris langue avec les grands constructeurs automobiles français, dont PSA et Renault-Nissan, qui se sont engagés sur des volumes de jantes fabriquées à Châteauroux. « Et plus les voitures électriques prendront de parts de marché, plus il faudra de l'aluminium léger et de bonne qualité pour la carrosserie, en raison des contraintes sur les batteries, et toutes les voitures auront toujours besoin de roues », déclare Jay Hambro.

Protecteur de la planète

Au-delà d'une action citoyenne en matière de création et de préservation d'emplois, le groupe britannique se veut également protecteur de la planète, en privilégiant les énergies renouvelables et le recyclage de la matière première. Ainsi, les déchets des plaques d'aluminium découpées par les clients en aval de l'usine de Dunkerque seront finalement tous recyclés, et « nous avons rencontré EDF pour étudier l'idée de raccorder notre usine à un projet éolien offshore », révèle le britannique.

Nouveaux locaux à Paris

Autre symbole de ses nouvelles attaches en France, GFG inaugurera à la rentrée ses locaux, avenue Kléber, à Paris. Quant à Jay Hambro, il continuera ses pérégrinations à travers le monde, puisque le groupe (19.000 salariés et un chiffre d'affaires de plus de 15 milliards de dollars) est présent dans 30 pays, dont l'Australie. « D'ailleurs, c'est là-bas que Sanjeev Gupta a rencontré pour la première fois le président Macron, à l'occasion de la signature d'un protocole d'entente sur 15 ans entre la société française Neoen et GFG Alliance pour le développement et la production d'énergie renouvelable dans une centrale solaire », se souvient le britannique.

Si ces relations se sont nouées en Australie, elles n'ont fait que se renforcer depuis. « Nous sommes ravis et confiants », conclut, en anglais, Jay Hambro à propos de cette nouvelle entente cordiale, symbole du renouveau de l'industrie lourde dans l'Hexagone.