L'ex-patron d'une usine endommage ses machines avant leur vente

Par latribune.fr  |   |  439  mots
À l'ancienne usine de Docelles, les cylindres de ce type sont désormais endommagés et inutilisables.
Dans le catalogue de la vente, prévue mardi à Epinal, certains équipements de ce qui fut longtemps la plus vieille usine en activité en France portent la mention "cylindres percés" : les acheteurs éventuels sont ainsi dûment avertis que les appareils concernés vaudront surtout pour leur poids en métal.

"Ils ont tout fait pour qu'il n'y ait pas de reprise d'activité." L'ancien délégué CDFT de l'ex-usine UPM de Docelles, Gildas Bannerot, jette un regard amer sur l'action de l'ex-propriétaire de l'endroit où il a travaillé 37 ans. Fermée en 2014 après cinq siècles d'activité, l'ancienne papeterie vosgienne doit voir ses machines être vendues aux enchères mardi. Le problème ? Elles ont été endommagées pour éviter qu'elles ne puissent être rachetées par des concurrents, a appris dimanche l'AFP de sources concordantes.

Dans le catalogue de la vente, prévue mardi à Epinal, certains équipements de ce qui fut longtemps la plus vieille usine en activité en France portent la mention "cylindres percés" : les acheteurs éventuels sont ainsi dûment avertis que les appareils concernés vaudront surtout pour leur poids en métal.

La société qui a acheté en juin le site de Docelles - et qui souhaite se débarrasser des machines cette semaine aux enchères - était parfaitement au courant que les appareils étaient hors d'usage, assure-t-il. Ce dossier n'est donc pas celui d'un "patron voyou qui viendrait détruire en cachette l'outil de travail", souligne auprès de l'AFP Jean Kubiak, l'actuel représentant en France du groupe UPM et avant-dernier directeur du site vosgien, de 2008 à 2012.

Les anciens salariés voulaient racheter l'usine

Après la fermeture de l'usine, qui avait laissé 162 personnes sur le carreau en janvier 2014, certains anciens salariés s'étaient battus en justice, mais en vain, pour reprendre l'usine: le propriétaire du site, le groupe finlandais UPM, avait refusé de le leur céder à un prix raisonnable.

"Ils ont tout fait pour qu'il n'y ait pas de reprise d'activité", commente Gildas Bannerot.

Les anciens propriétaires "auraient mieux fait de tout vendre directement à des ferrailleurs, plutôt que de les casser comme ça", se désole l'ancien ouvrier de maintenance, qui reconnaît toutefois que "sur le fond, ça n'aurait pas changé grand chose".

Si Jean Kubiak reconnaît que cette mise hors d'usage des anciennes machines "crée une émotion compréhensible", elle doit selon lui être considérée "en fonction du contexte économique".

"Effectivement, les rouleaux de la machine à papier ont été percés, afin d'éviter qu'un concurrent puisse les utiliser", a expliqué l'ancien directeur du site vosgien. Et d'ajouter :

"Je ressens cette charge émotionnelle. J'étais dans cette usine. Je sais ce que ça signifie, cet attachement à un outil industriel. En même temps je sais ce que c'est de devoir vendre une tonne de papier et d'être en concurrence avec le marché mondial."

(avec AFP)