35% des Français cèdent aux sirènes de la contrefaçon

Par Virginie de Kerautem  |   |  626  mots
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Les Français n'ont pas vraiment mauvaise conscience à acheter des produits contrefaits, rapporte une étude Ifop réalisée pour l'Union des fabricants. Ils n'ont d'ailleurs que l'embarras du choix tant les réseaux de distribution se multiplient. Moins coûteux que les autres, Internet ressort comme étant la plaque tournante privilégiée de la contrefaçon.

Le phénomène de la contrefaçon s'aggrave, s'alarme l'Union des fabricants pour la protection internationale de la propriété intellectuelle (Unifab). Au point de représenter un manque à gagner global de 200 à 300 milliards d'euros par an, dont 6 milliards rien que pour la France (source KPMG). Dans son dernier rapport d'activité, l'Observatoire national de la délinquance et des réponses pénales (ONDRP) fait état de 6,2 millions de produits contrefaits saisis en 2010 par les Douanes (hors cigarettes). La valeur totale des contrefaçons saisies, de 412 millions d'euros a doublé entre 2009 et 2010.

A l'occasion des soixante ans du Musée de la contrefaçon (Paris 16ème), l'Unifab s'est interrogée sur l'attitude des consommateurs face à ce fléau, étude à l'appui.

35% des Français cèdent aux sirènes de la contrefaçon

Cette étude réalisée par l'Ifop et publiée jeudi soir, montre ainsi que 35% des Français (plus d'un sur trois) achète sciemment des produits contrefaits. Leur choix se dirige surtout vers les copies de vêtements de grandes marques (18%) ou de parfums (13%). Les copies de produits numériques ont également la cote, surtout les CD et DVD musicaux (10%). Quant au tabac contrefait, il est à égalité avec les films DVD (7%).

Pour se justifier, ces consommateurs déclarent se laisser volontiers tentés par l'achat d'un produit de marque qu'ils n'auraient pas pu s'offrir autrement; à condition de trouver l'imitation réussie. Beaucoup vont même jusqu'à militer sur le fait que la contrefaçon rend accessible des produits réservés aux plus riches. Pour d'autres, la contrefaçon est une sorte de défi pour les marques dès lors qu'elle leur fait de la publicité, voire qu'elle stimule la concurrence et pousse les marques à innover.

En revanche, peu de consommateurs considèrent que ce phénomène puisse représenter un danger pour la santé ou la sécurité. Ils sont également peu sensibles au fait que cela peut détruire des emplois. Ils se laissent d'autant plus tentés qu'ils pensent être à l'abri de poursuites judiciaires; ou du moins, nettement moins exposés que le fabricant des produits contrefaits, ceux qui en organisent la diffusion ou les vendeurs.

Internet, canal privilégié

Quant aux réseaux de distribution, l'étude souligne leur multiplicité. Elle en identifie au moins neuf, le canal privilégié pour vendre les produits contrefaits étant sans conteste Internet (40%). Les ventes en ligne dépassent nettement les marchés, les foires ou les ventes à la sauvette, rapporte l'étude.

En plus d'être peu coûteuse, la vente sur Internet rend la traçabilité du vendeur bien plus compliquée. Internet brouille ainsi les frontières puisque les produits contrefaits se retrouvent souvent à proximité des produits des marques. L'acheteur, quant à lui, se sent davantage protégé car il a l'impression de pouvoir réaliser ses emplettes de façon bien plus anonyme et confidentielle.

Actuellement, les saisies de contrefaçons écoulées via le commerce en ligne s'élèvent à un million d'articles contre 35.000 en 2005. Elles représentent près de 20% des saisies totales contre 1% il y a six ans.

La Chine produit, l'Europe consomme

Plus de la moitié des produits contrefaits provient de Chine (55%), d'après les saisies réalisées en Europe en 2008. Arrivent ensuite, mais dans une bien moindre mesure, les Emirats Arabes Unis (12%) et Taïwan (10%). Et c'est en Europe et aux Etats-Unis que tous ces produits s'écoulent.

La contrefaçon qui "était très focalisée sur les produits de luxe (...) s'est beaucoup diversifiée sur des produits qui peuvent parfois représenter un danger" comme des médicaments, des produits alimentaires, des pièces automobiles ou des jouets, souligne Francis Bonnet, adjoint au directeur général de la Douane.