La libéralisation du rail a fait perdre un quart du marché du fret à la SNCF

Par Rémy Janin  |   |  397  mots
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La libéralisation impulsée par Bruxelles a abouti à l'inverse de ce qu'elle visait : la part modale du fret ferroviaire a chuté de 12,6% à 10,6 % en une dizaine d'années au profit du transport routier.

Depuis mars 2006, date de l'ouverture totale du fret ferroviaire en France, la part de marché des concurrents de la SNCF sur le fret n'a cessé d'augmenter. Selon les chiffres publiés mercredi par la SNCF, alors qu'elle était nulle en 2006 elle atteignait déjà 15% en 2009 et s'élevait à 20% l'an dernier. Cette part de marché est partagée entre dix-neuf entreprises ferroviaires qui ont obtenu les autorisations légales d'opérer sur le marché français. Une nouvelle étape de la libéralisation du rail est en cours de finalisation à Bruxelles.

L'émergence rapide d'entreprises concurrentes est un paradoxe. La libéralisation du rail européen, impulsée dès 2001 par la Commission européenne afin, affirmait-elle alors, de redynamiser le transport des marchandises par le rail, n'a en effet aboutit qu'au résultat inverse. "La part du ferroviaire n'a cessé de suivre son long déclin au profit de son principal concurrent qu'est le transport routier", pointe Pascal Deschamps, secrétaire général de la FGAAC-CFDT (conducteurs). Et les chiffres de la commission des transports du parlement européen confirment ses dires. La part modale du fret ferroviaire a chuté de 12,6% à 10,6% en une dizaine d'années. Comment dans ces conditions comprendre le développement de sociétés concurrentes et ceci alors que d'aucuns affirment que le bilan économique du fret privé reste négatif.

La question se pose d'ailleurs de façon plus globale. "Le ferroviaire n'est pas une activité ultra-rentable", reconnaît David Azema, directeur général délégué de la SNCF. Cette fragilité économique aiguillonne la compagnie nationale qui se dit que si elle a laissé des plumes sur le marché des marchandises, le même phénomène pourrait bien se reproduire pour le marché des voyageurs. Aujourd'hui, seule la concurrence sur les lignes inter-européennes est autorisée. Une seule société, Eurostar détenue à 50% par la SNCF, y est présente (Paris-Londres et Paris Bruxelles) dont elle réalise 7,8% de l'activité.

Mais dès le 11 décembre, l'entreprise ferroviaire Thello, un consortium formé par l'italien Trenitalia et le français Veolia-Transdev, fera rouler des trains de nuit entre Paris et Venise. Un nouveau défi pour la SNCF qui, côté cour, affiche sa sérénité mais qui, coté jardin, est plus fébrile et multiplie les initiatives afin de se préparer à ce nouveau choc concurrentiel.