Pourquoi Lufthansa surclasse Air France-KLM

Par Fabrice Gliszczynski  |   |  747  mots
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En 2011, malgré la crise en Europe et la cherté du kérosène, Lufthansa a dégagé un bénéfice opérationnel de 820 millions d'euros quand Air France-KLM a affiché une perte de 353 millions. Explications.

1,173 milliard d'euros. C'est l'écart de performances opérationnelles entre Lufthansa et Air France-KLM en 2011, les deux premiers groupes aériens en Europe avec des chiffres d'affaires de 28,7 milliards d'euros pour le groupe allemand (+ 8,6 % par rapport à 2010) et 24,36 milliards d'euros (+ 4,5 %) pour son rival français.

Lufthansa, qui détaillait ce jeudi ses résultats 2011, a en effet dégagé un bénéfice opérationnel de 820 millions d'euros (hors son boulet, la filiale BMI, en cours de cession à British Airways) quand les pertes opérationnelles d'Air France-KLM se sont élevées à 353 millions d'euros. IAG, qui coiffe British Airways et Iberia (16 milliards d'euros de chiffre d'affaires), a, quant à lui, dégagé un bénéfice opérationnel de 485 millions d'euros. Le résultat net, qui ne traduit pas la performance des entreprises, est passé dans le rouge chez Lufthansa à hauteur de - 13 millions d'euros. La perte nette d'Air France-KLM a été de 809 millions.

Pourquoi cette différence ? Et surtout pourquoi dans un environnement aussi difficile pour le transport aérien européen (crise en Europe, prix du carburant au plus haut, concurrence des low-cost), Lufthansa parvient non seulement à ne pas être dans le rouge mais réussit à dégager près d'un milliard de bénéfices opérationnels, un niveau de résultat digne des années d'avant crise. Plusieurs facteurs l'expliquent

Le poids des filiales de maintenance et de restauration à bord

En comparaison avec Air France-KLM, Lufthansa peut compter sur une activité hors transport aérien pur (donc non impactée par l'envolée du carburant) très lucrative. Ces filiales contribuent fortement aux bénéfices du groupe. Lufthansa Technik (maintenance) est la plus importante d'entre elles. Elle profite de la vague porteuse de ce secteur, tout comme d'ailleurs Air France Industries.

Sauf que Lufthansa Technik (4 milliards d'euros de chiffre d'affaires) est quatre fois plus gros, avec des profits importants à la clé. Cette année, malgré plusieurs provisions passées sur des contrats, ils se sont élevés à 257 millions d'euros, contre 110 millions pour Air France Industries, qui a réalisé une très bonne performance. A cela s'ajoutent les activités catering (restauration à bord) de LSG Skychef et de logiciels informatiques, qui ont apporté respectivement 85 et 19 millions d'euros de bénéfices opérationnels au groupe allemand.

La performance étonnante du cargo

Autre grosse source de bénéfices, le cargo. Lufthansa a gagné 257 millions d'euros (la deuxième meilleure performance de son histoire) quand Air France-KLM en a perdu 60 malgré une forte restructuration au cours des années précédentes et une réorientation stratégique majeure vers le transport de marchandises dans les soutes des avions passagers.

« C'est impressionnant, notamment au quatrième trimestre où il n'y a pas eu de pic d'activité. Lufthansa est à la fois très flexible et peut compter sur son partenariats avec La Poste pour rentabiliser l'outil de production », explique un analyste. Si le groupe a bénéficié de la puissance des exportations allemandes, il a été pénalisé par la nouvelle réglementation sur les vols de nuit à l'aéroport de Francfort plus contraignante.

Swiss, la pépite

Qu'en est-il donc pour le transport de passagers, le cœur de métier des deux groupes européens ? Les différences sont là aussi importantes. Le groupe Lufthansa a dégagé un bénéfice opérationnel de 349 millions alors qu'Air France-KLM affiché une perte de 375 millions. Dans cette activité fortement impactée par les coûts du carburant, Lufthansa peut compter sur une pépite : Swiss, créée sur les cendres de Swissair après sa liquidation en 2001 et rachetée par Lufthansa en 2005.

« C'est la vache à lait de Lufthansa », explique le PDG d'Air France-KLM, Jean-Cyril Spinetta. « Swiss est positionné sur un marché riche, son image est remarquable, ses coûts ont diminué depuis la faillite de Swissair et ses revenus sont élevés grâce à une clientèle à hauts revenus », précise t-il. Toutes les filiales n'affichent pas la même santé. Austrian Airlines a perdu 62 millions, la low-cost Germanwings 52 millions. Lufthansa est d'ailleurs prête à injecter 140 millions dans Austrian à condition que les syndicats valident son plan de restructuration.

Quant aux bénéfices de la compagnie Lufthansa, vaisseau amiral du groupe éponyme, ils ont chuté de 56 % mais restent dans le vert pour s'élever encore à 168 millions d'euros. Pa rapport à Air France-KLM, le groupe allemand bénéficie notamment d'une productivité de son personnel navigant 35 % meilleure que celle d'Air France sur le réseau moyen-courrier.