Déjà mal en point, la SNCM va devoir rembourser 220 millions d'euros à l'Etat

Par latribune.fr  |   |  709  mots
Un ferry de la SNCM dans le port de Marseille. Copyright Reuters
La Commission européenne a jugé incompatibles avec les règles européennes de la concurrence des aides publiques françaises à la compagnie maritime. Cette dernière a annoncé qu'elle comptait faire appel de cette décision.

Elle connaissait déjà des difficultés financières. Et on lui demande de mettre la main à la poche. Jeudi, la Commission européenne a sommé la SNCM de rembourser 220 millions d'euros d'aides publiques. Ces dernières sont incompatibles avec les règles européennes de la concurrence, juge Bruxelles.

La direction de la compagnie maritime a annoncé jeudi après-midi qu'elle faisait appel de cette décision. "Les voies d'appels et de recours en droit pour contester cette décision de l'Europe existent. Nous allons les saisir avec la plus grande fermeté et la plus grande détermination", affirme le communiqué de la compagnie, qui effectue les trajets en ferry entre Corse et continent.

Les compensations "de base" sont conformes...

La Commission conclut une enquête approfondie, menée à la suite d'une plainte du groupe italien Corsica Ferries, le principal concurrent de la SNCM, par un raisonnement en deux temps.

D'une part, elle reconnaît que les compensations de service public reçues sur la période 2007-2013 par la SNCM et son alliée, la Compagnie Maritime de Navigation (CMN) pour la desserte "de base" entre la Corse et Marseille, sont conformes aux règles de l'UE. En effet, "il est légitime de recourir à des subventions pour compenser le coût du service public de desserte maritime de la Corse, qui permet d'atténuer les contraintes liées à l'insularité", a expliqué dans un communiqué le commissaire européen chargé de la Concurrence, Joaquin Almunia. Une bonne nouvelle pour la SNCM au moment où elle doit signer avec l'Etat une nouvelle délégation de service publique pour la période 2014-2020.

… mais pas le service "complémentaire"

Mais d'autre part, la Commission juge que les aides d'Etat perçues par la SNCM pour le service "complémentaire", couvrant les périodes de pointe pendant la saison touristique, ne compensent aucun besoin réel de service public et ont donc procuré un avantage indû à la SNCM par rapport à la concurrence. L'enquête de la Commission a estimé le montant de ces compensations injustifiées à 220 millions d'euros pour la période 2007-2013. Ces aides doivent par conséquent être restituées aux contribuables, en l'occurrence à la région Corse, dans un délai de quatre mois, soit d'ici fin août.

De source proche du dossier, on explique que la récupération de l'aide accordée au titre du service "complémentaire" ne met pas en danger le service "de base", assuré par une autre flotte et dont les comptes sont séparés au sein de la société.

Dans un comminiqué, le gouvernement a estimé que ce service complémentaire "répond à un besoin réel de service public. Il considère que la compensation correspondant à ce service est assise sur des paramètres fixés de façon objective et transparente, à la suite d'une procédure de mise en concurrence ouverte à tous". Il dit envisager "toutes les voies de droit pour contexter la décision de la Commission européenne".

Âpre concurrence de Corsica Ferries

Il n'empêche qu'il s'agit d'un coup dur pour la SNCM, en plein marasme financier et dont le chiffre d'affaires en 2012 a avoisiné 300 millions d'euros. La compagnie est confrontée à une âpre concurrence de Corsica Ferries, qui domine le transport de passagers entre le continent et la Corse (60,6% de parts de marché au premier semestre 2012).

Sans compter que la décision de la Commission ne referme pas le dossier de la SNCM à Bruxelles: l'exécutif européen examine en parallèle un ensemble de mesures de soutien, d'un montant total d'environ 230 millions d'euros, liées à la restructuration et à la privatisation de la compagnie entre 2002 et 2006. Là encore, elle pourrait exiger le remboursement de tout ou partie de cette somme.

Surtout, la nouvelle intervient au moment où salariés et syndicats sont fortement préoccupés par les incertitudes concernant l'avenir de la compagnie et son changement d'actionnariat. Veolia Environnement a prévu de reprendre en direct pour un euro symbolique les 66% que détient sa coentreprise de transport Veolia Transdev dans la SNCM d'ici juin. Cette "remontée" dans Veolia est fortement contestée par les syndicats, qui craignent notamment l'absence de projet de Veolia pour la compagnie maritime.