Aéroports de Paris, les bénéfices de la discorde

Par Fabrice Gliszczynski  |   |  558  mots
Le gestionnaire des aéroports parisiens a dégagé un bénéfice record en 2014. Ces profits provoquent des remous auprès des salariés qui veulent leur part du gâteau et donnent du grain à moudre aux compagnies aériennes qui ne cessent de dénoncer la hausse des redevances aéroportuaires, alors que va se négocier le nouveau contrat de régulation économique entre ADP et l'Etat. Les compagnies demandent un gel, voire une baisses des redevances.

Un bénéfice opérationnel courant de 737 millions d'euros, en hausse de 8,8%,  un chiffre d'affaires de 2,791 milliards d'euros en légère hausse par rapport à l'année précédente ; un bénéfice net qui bondit de 33,3% à 402 millions d'euros; un excédent brut d'exploitation (Ebitda) supérieur à 1,1 milliard, en progression de 3,4% : les deux semaines de grève des pilotes d'Air France en septembre n'ont pas empêché Aéroports de Paris de dégager l'an dernier les meilleurs résultats financiers de son histoire. Des résultats qui contrastent avec ceux de son premier client, Air France-KLM, qui a replongé dans le rouge l'an dernier.

"Les résultats 2014 traduisent la robustesse du modèle économique d'Aéroports de Paris : le trafic, bien qu'[affecté] par la grève des pilotes d'Air France, a continué sur la bonne dynamique engagée fin 2013, tout au long de l'année; les activités commerciales ont crû dans un environnement difficile et les charges du groupe ont été maîtrisées", a commenté son PDG, Augustin de Romanet.

Grève des salariés

Mais ces résultats historiques dérangent. Les salariés veulent une augmentation générale que la direction a refusé. Ce refus a provoqué une grève les 12 et 13 février et une autre ce jeudi 19 février. Près de 300 d'entre eux ont manifesté jeudi à Paris. Les manifestants, réunis à l'appel de quatre organisations syndicales (CGT, FO, CFE-CGC et Unsa), se sont rassemblés devant les grilles de la Maison de l'Amérique latine, dans le VIe arrondissement, où se tenait un conseil d'administration de l'entreprise. "La direction nous a annoncé 0% d'augmentation salariale et le non-remplacement d'un départ à la retraite jusqu'en 2020. Quand on voit les résultats de l'entreprise, il y a de quoi être en colère", dénonce Christelle Martin, du syndicat FO, citée par l'AFP. "Près de 60% des bénéfices vont aller à nos actionnaires", s'agace Fabrice Michaud, délégué CGT. "La répartition n'est pas équitable, on a l'impression d'être les dindons de la farce", ajoute-t-il. Les syndicats ont l'intention de maintenir la pression.

Les compagnies aériennes veulent un gel voire une baisse des redevances

"ADP veut du coup envoyer un message fort aux compagnies aériennes, un message de discipline budgétaire. Mais nous, on ne demande pas la Lune", assure Christelle Martin, qui évalue à "10 millions d'euros" le coût de la "hausse de 2% de l'ensemble des salaires" réclamée par FO.

"Notre chiffre d'affaires est en légère hausse", a commenté Edward Arkwright, directeur financier du groupe français, relevant "des tendances en sens contraires".

Ces bénéfices record donnent du grain à moudre aux compagnies aériennes qui demandent un gel voire une baisse des redevances au cours du prochain contrat de régulation économique d'une durée de 5 ans qui sera signé cet été entre l'Etat et ADP. En 2014, le produit des redevances aéronautiques a ainsi fortement progressé (+4,7% à 951 millions d'euros) "portées par la bonne dynamique du trafic passagers" (+2,6%).

Les compagnies aériennes, Air France en tête qui a enregistré en 2014 sa sixième année de perte consécutive, demandent une répartition de la richesse au sein du transport aérien. Le ministre du Transports est sur cette ligne, contrairement au ministère des Finances.