Air France-KLM : les investisseurs craignent toujours un retour des grèves à Air France

Par Fabrice Gliszczynski  |   |  589  mots
(Crédits : Christian Hartmann)
Paradoxalement, l'annonce d'un objectif financier relativement ambitieux pour Air France-KLM s'est traduite par une chute de l'action en Bourse. Les investisseurs craignent notamment de nouveaux confllits sociaux et que les fruits de l'amélioration du groupe soient récupérés par les syndicats.

L'annonce d'un objectif ambitieux d'amélioration significative des bénéfices d'Air France-KLM et d'Air France en particulier ne s'est pas retrouvée dans le cours de Bourse du groupe. Mardi 5 novembre, après avoir détaillé aux analystes financiers sa stratégie pour augmenter de 117% le résultat opérationnel d'ici à cinq ans pour atteindre 2,5 milliards d'euros en 2024, Air France-KLM a plongé de près de 6% à la Bourse de Paris. Pour quelle raison? Yan Derocles, analyste chez Oddo BHF est formel :  la crainte des investisseurs est principalement sociale.

Les grèves ont coûté plus d'un milliard d'euros depuis 2014

"Le plan est crédible", explique-t-il à La Tribune, "mais en raison de l'historique des grèves à Air France, les investisseurs anglo-saxons estiment qu'Air France n'est pas à l'abri des conflits sociaux et qu'il y a un risque pour que l'amélioration des résultats soit récupérée par les syndicats".

Même si le directeur général du groupe, Ben Smith, a réussi à apaiser les tensions en signant de nombreux accords avec les syndicats d'Air France, notamment les pilotes, les investisseurs n'ont pas oublié les grèves de 2014, 2017 et 2018 qui ont coûté près d'un milliard d'euros à Air France et Air France-KLM.

En effet, hier le cours de l'action a notamment chuté pendant la séance de questions-réponses de la journée investisseurs, après qu'un analyste a demandé d'une part quelles étaient les différences entre le plan présenté et les précédents "aux caractéristques similaires", et si l'amélioration du résultat serait une nouvelle fois pour les syndicats et non pour les investisseurs. Frédéric Gagey, le directeur financier d'Air France-KLM, a répondu que la situation sociale à Air France était totalement différente aujourd'hui, en pointant la radicalité de l'ancienne direction du SNPL.

"Aujourd'hui, la qualité du dialogue est meilleure", a-t-il indiqué.

En décembre, une nouvelle équipe tenant d'une ligne "plus constructive" a été élue arrivée à la tête du syndicat national des pilotes de ligne pour une durée de quatre ans.

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Commentant plus tard la réaction boursière de mardi devant quelques journalistes, Ben Smith a estimé qu'il était "un peu tôt", que plusieurs aspects du plan "ne sont pas faciles à comprendre", et que la présentation aux analystes "n'a probablement pas assez insité sur les "26 accords signés avec les syndicats d'Air France depuis un an qui apportent une énorme flexibilité à la compagnie".

Le Canadien a notamment signé un accord collectif avec les pilotes permettant plus de flexibilité dans l'organisation du de leur travail, nécessaire à la mise en place du plan d'amélioration de la performance opérationnelle qui doit largement contribuer à l'amélioration des résultats. Il a également signé un accord permettant de faire sauter le plafond de 40 avions que ne pouvait pas dépasser jusqu'ici Transavia France.

Les investisseurs sont par ailleurs inquiets par le niveau des investissements, supérieur à leurs prévisions. Air France-KLM va en effet investir 4 milliards d'euros par an pendant cinq ans. Ce montant ne lui permettra pas de générer du cash avant 2023-2024 et par conséquent de diminuer sa dette. Au contraire. De quoi retarder toute velléité du groupe de pouvoir jouer un rôle dans la consolidation. Pour une opération d'envergure, Air France-KLM serait aujourd'hui obligé de recourir à une augmentation de capital. Mais pour cela, il lui faut augmenter son cours de Bourse.