Air France-KLM perd du terrain face à Lufthansa et IAG. Et même beaucoup !

Par Fabrice Gliszczynski  |   |  856  mots
Les résultats d'Air France-KLM qui seront meilleurs l'an prochain en raison d'une nouvelle baisse de la facture de kérosène (du fait de l'amenuisement des couvertures carburant qui empêchent le groupe de profiter pleinement de la baisse du prix du pétrole), donnent la possibilité d'accorder plus de temps pour les négociations. Mais pas trop non plus.
Le groupe français a réalisé d'excellents résultats financiers au troisième trimestre. Mais ses rivaux aussi. Et ils creusent même l'écart de manière significative. Explications.

Après l'annonce de résultats trimestriels record par Air France-KLM qui se sont soldés par un bénéfice d'exploitation de 898 millions d'euros pour le groupe français (474 millions pour Air France, 424 pour KLM), la performance, largement supérieure, de Lufthansa (qui compte aussi Swiss, Austrian Airlines et Eurowings) et IAG (la maison-mère de British Airways, Iberia, Vueling et Aer Lingus) qui ont tous deux dégagé 1,2 milliard d'euros au cours de la même période, vient alimenter le débat sur la poursuite ou pas des efforts à Air France, sachant que KLM a signé cet été des accords de productivité avec toutes les catégories de personnel.

Compétitivité

Ces deux éléments traduisent les deux discours au sein de l'entreprise française. Celui d'une très grande partie des syndicats qui, au regard des résultats, fait valoir qu'il n'y a pas d'urgence à négocier d'accords de productivité et surtout pas aux niveaux demandés par la direction. Et celui de la compagnie qui pointe l'écart de compétitivité d'Air France et d'Air France-KLM avec ses concurrents pour justifier les nouveaux efforts demandés aux salariés pour pouvoir financer la croissance future et ne pas se retrouver à nouveau en difficulté en cas de remontée du prix du baril de pétrole ou de retournement de cycle.Qu'en est-il exactement ?

Les résultats d'Air France-KLM seront meilleurs en 2016

Les résultats d'Air France-KLM qui seront meilleurs l'an prochain en raison d'une nouvelle baisse de la facture de kérosène (du fait de l'amenuisement des couvertures carburant qui empêchent le groupe de profiter pleinement de la baisse du prix du pétrole), donnent la possibilité d'accorder plus de temps pour les négociations. Mais pas trop non plus. Car Air France-KLM a en effet intérêt d'avoir rattrapé ses rivaux en termes de compétitivité (ou du moins de s'en être approché) quand le prix du baril remontera à nouveau, sous peine de se retrouver à nouveau dans une situation critique.

L'écart se creuse encore

Or aujourd'hui, même si les résultats se sont nettement améliorés, l'écart de compétitivité n'a pas été comblé. Loin s'en faut. Ils se creuse même en 2015. La différence de performance opérationnelle entre Air France-KLM qui était en 2014 de 1,09 milliard d'euros avec IAG (hors impact négatif de la grève à Air France en septembre 2014) et de 757 millions d'euros avec Lufthansa (là aussi hors impact négatif de la grève au sein des deux groupes et en retraitant les chiffres du groupe allemand du fait de sa nouvelle politique d'amortissement), va en effet encore s'amplifier en 2015. Et ce de manière significative.

Certes, Air France-KLM n'a pas communiqué sur ses prévisions annuelles. Pour autant, selon certains analystes, Air France-KLM qui a publié un résultat d'exploitation positif de 666 millions au cours des neuf premiers mois de l'année, devrait terminer l'année sur un bénéfice d'exploitation d'environ 650 millions d'euros en 2015 (649 millions selon Yan Derocles, analyste chez Oddo Securities qui prévoit une perte au 4ème trimestre).

Du coup, Lufthansa et IAG tablant respectivement sur un bénéfice annuel compris entre 1,75 et 1,95 milliard d'euros pour le premier et entre 2,25 et 2,3 milliards pour le second, la différence de performance opérationnelle d'Air France-KLM avec le groupe allemand serait donc comprise entre 1,1 et 1,3 milliard d'euros et de 1,6 milliard avec IAG.

Ces écarts énormes risquent de se creuser une nouvelle fois en 2016 en raison des efforts prévus par Lufthansa et IAG. Le groupe allemand a par exemple identifié 1 milliard d'économies l'an prochain.

Les rivaux d'Air France-KLM ne sont pas restés les bras croisés

Les chiffres parlent donc d'eux-mêmes. Cette évolution défavorable à Air France-KLM n'est pas la conséquence de changements soudains en termes de coût du travail ou de taxation dans les pays d'origine des compagnies des trois groupes. Air France-KLM a fait des efforts importants, mais les autres en ont fait plus et prévoient d'en faire plus.

Concernant Air France, si le calendrier des négociations entre la direction et les syndicats sur des mesures de productivité à mettre en place en 2017 peut être en effet décalé, les objectifs d'économies auront du mal à être diminués sauf à prendre le risque de voir la compagnie se retrouver en difficulté dans quelques années.

Surtout que, quand bien même les objectifs de la direction étaient réalisés, ils seraient insuffisants pour atteindre le niveau de compétitivité des concurrents. Le retard pris dans le passé pour s'attaquer aux coûts de la compagnie ne peut être rattrapé en un seul plan. Le groupe a en fait un plan de retard. Cela vient notamment du fait qu'Air France a été la compagnie qui est entrée la plus mal préparée dans la crise de 2009 mais aussi celle qui a le plus tardé à réagir puisqu'il a fallu attendre 2012 et le plan Transform 2015 pour mettre en place de réelles mesures de redressement, sans pour autant qu'elles soient fortes que celles des concurrents.