Juniac reconduit PDG d’Air France-KLM avec une emprise renforcée sur Air France ?

Par Fabrice Gliszczynski  |   |  909  mots
Le comité de nomination du conseil d'administration d'Air France-KLM proposera ce mardi la reconduction à la tête du groupe du PDG actuel, Alexandre de Juniac, dont le mandat arrive à échéance. Le comité devrait évoquer sa volonté qu'il "s'implique" davantage dans la gestion d'Air France, la plus grosse filiale d'Air France-KLM.

Sauf coup de théâtre, Alexandre de Juniac sera reconduit à la tête d'Air France-KLM le 21 mai prochain lors de l'assemblée générale des actionnaires. Son renouvellement a tardé à se confirmer. Mais après un long débat au plus niveau de l'Etat, le PDG du groupe aérien, dont le mandat arrive à échéance, sera reconduit.

Mardi 17 mars, le comité de nomination du conseil d'administration d'Air France-KLM se réunira pour entériner la proposition qu'il fera au conseil. Ce dernier se réunira le 20 mars pour préparer les projets de résolutions qui seront soumis au vote à l'AG. Parmi eux figure le renouvellement du mandat de deux administrateurs, dont celui d'Alexandre de Juniac.

Le comité de nomination soutient Alexandre de Juniac depuis longtemps

Pas de mystère, le comité va, selon nos informations, proposer sa reconduction. Depuis longtemps, les trois membres qui le compose, l'ancien président de Sanofi, Jean-François Dehecq, l'un des trois représentants de l'Etat au conseil, Jean-Dominique Comolli -ancien directeur de l'agence des participations de l'Etat (APE)-, et le Hollandais Cornelis Van Lede, qui assure officieusement la liaison entre le groupe et les intérêts hollandais, sont tous favorables à la reconduction d'Alexandre de Juniac à la tête d'Air France-KLM.

Soutien du gouvernement

Après avoir longtemps hésité, l'Etat a quant à lui donné son accord la semaine dernière. Si Alexandre de Juniac avait le soutien du Premier ministre, Manuel Valls, et surtout du ministre de l'économie, Emmanuel Macron, certains membres du gouvernement coinçaient à l'idée de reconduire l'ancien directeur de cabinet de Christine Lagarde à Bercy durant la présidence de Nicolas Sarkozy. Sa gestion du conflit des pilotes en septembre dernier et les tensions actuelles avec ces derniers ont été abordées. Mais le remplacer aurait pu donner le sentiment de soutenir les pilotes, ce que ne voulaient en aucun cas le Premier ministre, qui nourrit un fort ressentiment à leur égard depuis la grève.

Solution interne privilégiée

Le gouvernement a certes étudié quelques noms en externe, comme Martin Vial, ancien directeur général de la Poste de 1997 à 2002 (puis d'Europ Assistance), le président de la SNCF, Guillaume Pepy, en pleine réforme ferroviaire, ou Jean-Marc Janaillac, PDG de Transdev, mais il a vite conclu qu'une solution interne était la meilleure façon ne pas ralentir le processus de restructuration d'Air France-KLM, d'Air France en particulier.

«Choisir quelqu'un de l'extérieur revenait à retarder de six mois les décision à prendre, or, il y a urgence», explique un connaisseur du dossier.

Or dans six mois, Alexandre de Juniac a l'intention d'avoir achevé les négociations avec le personnel d'Air France sur les mesures à prendre dans le Plan Perform 2020.

Le gouvernement a également regardé s'il y avait d'autres solutions internes. Notamment Frédéric Gagey, le PDG d'Air France. Mais Il n'en a pas trouvé. Contrairement à l'avis de nombreux observateurs, le fait que Frédéric Gagey soit bien perçu par les Hollandais de KLM, où il y a passé de nombreuses années en tant que directeur financier, est considéré comme un inconvénient à l'heure où le gouvernement français se méfie de son homologue hollandais. Dans la même veine le fait qu'il soit plus apprécié des pilotes qu'Alexandre de Juniac le dessert plus qu'il l'avantage.

«Certains craignaient qu'il fasse trop de concession aux Hollandais et aux pilotes », explique un connaisseur du dossier.

Comment sera formulée cette "implication" dans Air France

Le gouvernement souhaite qu'Alexandre de Juniac réussisse la réforme du groupe, qu'il améliore le dialogue social et qu'il s'attache aux bonnes relations avec les Hollandais.

Par ailleurs, les fonctions d'Alexandre de Juniac pourraient même être élargies. Selon plusieurs sources, le comité de nomination aurait l'intention de lui demander qu'il s'implique davantage au sein d'Air France.

«Il devrait être demandé à Alexandre de Juniac de s'impliquer davantage dans la gestion d'Air France », expliquent des sources concordantes.

Ce point aurait d'ailleurs été abordé la semaine dernière lors d'une réunion entre Emmanuel Macron, Alexandre de Juniac et Regis Turrini, le directeur de l'APE.

"Ils veulent donner plus de pouvoir à Alexandre de Juniac pour que les mesures de redressement aillent vite, qu'il y ait une plus grande cohésion dans le groupe", explique une source. Mais il n'est pas exclu que cela ne soit pas pour lui faire porter le chapeau si cela passe mal ».

Ce schéma serait apparu à l'automne dernier.

"A ce moment là, le comité de nomination a accepté l'idée qu'Alexandre de Juniac cumule les fonctions de PDG d'Air France-KLM et d'Air France, pour donner Frédéric Gagey restant simplement directeur général".

Reste à savoir comment cette «implication» dans Air France sera aujourd'hui formulée dans la lettre de mission qui sera remise à Alexandre de Juniac, peut être ce mardi.

Selon certaines sources les relations entre Alexandre de Juniac et Frédéric Gagey se sont dégradées ces derniers temps.

Il y a deux ans, en 2013, quand Alexandre de Juniac, alors PDG d'Air France, avait été nommé PDG d'Air France-KLM pour succéder à Jean-Cyril Spinetta, il avait cherché à conserver sa fonction de PDG d'Air France. Cela lui avait été refusé au nom de la volonté de renforcer la puissance de la holding. Aujourd'hui, une emprise renforcée d'Alexandre de Juniac sur Air France est perçue comme un moyen d'améliorer la cohésion du groupe.