La SNCF met les TGV low-cost Ouigo à Paris pour préparer l'ouverture à la concurrence

Par Fabrice Gliszczynski  |   |  830  mots
La SNCF va lancer le 10 décembre des TGV Ouigo au départ de la gare Montparnasse pour desservir Bordeaux, Nantes et Rennes.

Après avoir annoncé en début d'année l'idée de positionner ses TGV low-cost Ouigo au départ ou à destination des gares parisiennes en complément des gares de Marne-la-Vallée, Massy, et l'aéroport Charles-de-Gaulle, situées en périphérie de la capitale, la SNCF passe à l'acte. A partir du 10 décembre des TGV Ouigo partiront également de la gare Montparnasse pour rejoindre Rennes Nantes et Bordeaux, à raison d'un aller-retour quotidien vers Rennes et deux vers Bordeaux et Nantes. Les ventes seront ouvertes le 3 octobre. En raison des péages plus élevés au départ de la capitale, les billets seront un peu plus chers qu'au départ des gares périphériques : à partir de 16 euros pour les adultes, au lieu de 10 euros au départ des gares en périphérie, et un tarif fixe de 8 euros pour les enfants, au lieu de 5 euros.

Ouigo doit attirer 15 millions de nouveaux voyageurs d'ici à 2020

Des départs depuis d'autres gares parisiennes devraient également être mis en place dans le courant de l'année 2018. Le développement de Ouigo doit contribuer à augmenter le nombre de passagers voyageant sur TGV. L'objectif de la SNCF est ambitieux. La compagnie ferroviaire entend attirer 15 millions de nouveaux voyageurs dans ses TGV d'ici à 2020. Le nombre de rames Ouigo est appelé à tripler d'ici à trois ans, en passant de 12 rames aujourd'hui à 35 en 2020. A cet horizon, Ouigo devrait représenter, selon les plans de la direction, 17% de l'offre TGV et transporter 25% des passagers, contre 5% en 2016, soit plus de 25 millions de voyageurs, contre 7 millions attendus cette année. L'an prochain, le trafic Ouigo devrait quasiment doubler « grâce aux départs des gares parisiennes", a expliqué à l'AFP Rachel Picard, directrice générale de Voyages SNCF.

Le risque de la cannibalisation

Positionner Ouigo au départ de Paris constitue une révolution qui cannibalisera forcément l'offre de TGV classique. Un choix assumé par Rachel Picard :

« Oui, bien sûr. Une partie des clients TGV passera sur Ouigo, mais nous préférons ça plutôt que voir nos passagers aller chez un concurrent. Nous préférons également mettre un client qui paye moins cher dans un siège que nous produisons deux fois moins cher plutôt que dans un TGV. Nous n'opposons pas les deux offres mais nous construisons une offre globale avec les deux, une offre low-cost, qui est un modèle industriel et un contrat avec le voyageur différent et plus contraint, et une autre offre TGV plus qualitative, avec une fréquence des circulations très importante », déclarait-elle au printemps dernier, lors d'une rencontre avec la presse.

Ouigo différent d'inOui

Aujourd'hui elle souligne que la "différentiation (sera) de plus en plus forte" entre Ouigo, les TGV low-cost, et inOui, ses TGV classiques dans lesquels l'offre de services sera croissante.

Le départ des Ouigo depuis les gares parisiennes "ne remet pas en cause le modèle économique" de ces trains, a précisé Rachel Picard. Celui-ci repose sur quatre piliers: faire rouler le matériel le plus possible pour augmenter la productivité des trains, une densification des rames (24% de sièges en plus), une maintenance effectuée la nuit, et la distribution exclusivement en ligne. En effet, avec des trains Ouigo qui circulent 13 heures par jour (ce qui permet de répartir les coûts fixes sur un plus grand nombre d'heures de train) contre 6 à 7 heures pour un TGV classique, et des trains densifiés pouvant contenir plus de 1.100 places quand deux trains sont mis côte-à-côte, les coûts de production du siège au kilomètre de Ouigo sont 50% plus bas que ceux du TGV.

Des Ouigo marqueront également l'arrêt à Poitiers, Saint-Pierre-des-Corps (Tours) et Laval, et un aller-retour quotidien Tourcoing-Bordeaux sera mis en place.

Ouverture à la concurrence

 Cette approche s'inscrit dans la perspective de l'ouverture à la concurrence des lignes à grande vitesse à partir de 2021. Pour la SNCF, l'avenir du TGV passera par une baisse des coûts et des prix. Non seulement par le développement à marche forcée de Ouigo, mais aussi par la baisse des coûts du TGV classique. C'est la trajectoire qu'a décidée de prendre la SNCF, « pour résister à la concurrence de demain », comme l'indiquait récemment Rachel Picard et « donner de l'air » à un modèle fragilisé par la cherté des péages ferroviaires payés pour l'utilisation et l'entretien du réseau, et par la concurrence féroce des autres modes de transport comme la voiture particulière, l'avion, le covoiturage, le bus et demain d'autres acteurs ferroviaires.

L'objectif pour la SNCF est en effet d'être en mesure de gagner des parts de marché tout en améliorant fortement les marges du TGV pour être capable de financer les investissements. Avec les coûts élevés des péages ferroviaires et la baisse des prix liée à une concurrence toujours plus vive, la SNCF n'est en effet plus en mesure de le faire.