Menace d'une grève nationale des pilotes de ligne du SNPL à Noël

Par Fabrice Gliszczynski  |   |  1070  mots
Ce bras de fer sur les accords d'entreprise se double chez HOP d'un problème de gestion des pilotes qui veulent être embauchés chez Air France en raison d'un accord signé dans le passé qui autorisait de telles passerelles en cas d'embauches chez Air France.
Le conseil national du SNPL a voté à l'unanimité le principe d'une grève pour dénoncer la manière dont la direction de HOP, la filiale régionale d'Air France, impose avec l'aval des autorités, les conditions de travail et de rémunération des pilotes. Une grève nationale, "extrêmement probable" selon le président du SNPL, est à l'étude

Y-aura-t-il une grève générale des pilotes de ligne français à Noël ? Voilà un scénario qui n'a pas encore dû remonter à Emmanuel Macron. Si le calendrier n'est pas encore fixé, le principe d'un préavis de grève capable de se déclencher à tout moment est quant à lui acté par le syndicat national des pilotes de ligne (SNPL) pour remettre en cause une manière d'imposer unilatéralement aux pilotes de HOP, la filiale régionale d'Air France, des conditions de travail qui ne souhaitent pas. Un procédé qui pourrait créer un précédent et être dupliqué dans les autres compagnies aériennes françaises, selon les pilotes.

Les vacances de fin d'année, une fenêtre de tir idéale pour le SNPL

Selon nos informations, une motion en ce sens a été récemment votée à l'unanimité lors du dernier conseil du syndicat national des pilotes de ligne (SNPL) qui réunissait tous les représentants des compagnies présentes en France dans lesquelles le syndicat dispose d'une section. C'est-à-dire Air France, HOP Air France, Transavia, Corsair, XL Airways, Aigle Azur, Air Caraïbes, Easyjet...

Le fusil est donc armé. Et risque bien de faire feu.

«Une grève est extrêmement probable. Il y a un risque de contournement du dialogue social par la direction générale de l'aviation civile (DGAC) qui est illégal selon nous », a déclaré à La Tribune Christophe Tharot, le président du SNPL, lequel n'a pas souhaité donner d'indication sur le calendrier d'un éventuel mouvement.

Pour autant, selon un pilote, un préavis très dur pendant la période des fêtes tient la corde au sein du SNPL national. Il est clair en effet que la proximité des vacances de fin d'année constitue une fenêtre de tir idéale pour les pilotes pour lancer un bras de fer.

L'origine du feu se situe chez HOP

L'histoire est un peu complexe. Elle découle de la fusion des trois compagnies régionales d'Air France, Britair, Regional et Airlinair décidée en 2016 pour créer la compagnie HOP. Comme pour les dénonciations d'accords d'entreprise, cette fusion imposait à la direction de renégocier avec les syndicats dans les 15 mois une nouvelle convention commune aux trois entités désormais regroupées pour définir les conditions de travail et d'utilisation des salariés. Avec la possibilité pour la direction d'imposer ses règles en cas d'absence d'accord au bout de 15 mois. C'est ce qui est arrivé.

Si la direction a trouvé un terrain d'entente avec les personnels au sol et les hôtesses et stewards, elle a, en revanche, échoué à signer un accord avec les pilotes. Le point de blocage se situe notamment au niveau des règles concernant l'organisation du travail entre les jours travaillés des pilotes et les jours non travaillés (système « ON-OFF »). S'ajoute également un désaccord sur les « repos réduits » ou « nuits courtes », où les pilotes ont par dérogation moins de 10 heures de repos comme le veut  la réglementation entre le dernier vol de la journée et le premier du jour suivant.

Face à l'absence d'accord début juillet, la direction de HOP a demandé à la DGAC de valider sa convention jusqu'au 31 décembre, provoquant une grève des pilotes de HOP au début de l'été. Pour le SNPL en effet, cette validation de la DGAC est illégale.

« Pour mettre en place un système ON-OFF, il faut non seulement un accord entre les syndicats et la direction, mais aussi une validation de l'inspection du travail et de la DGAC. En l'absence d'accord, la DGAC ne peut valider», explique un pilote de HOP.

« Si on laisse faire ce passage en force avec l'aval de la DGAC, ce genre de procédé peut se reproduire dans n'importe quelle compagnie », fait valoir un membre influent du SNPL Air France.

En pratique chez HOP, la direction peut imposer de manière définitive son système «ON-OFF » dès le premier décembre puis ses conditions de rémunération après le 31 décembre. « C'est un bond en arrière », déplore un pilote.

Le SNPL a perdu son recours en référé

Interrogée, la DGAC ne partage évidemment pas le point de vue du SNPL.

« Après l'échec des négociations avec certains syndicats de pilotes, la compagnie HOP! a demandé l'application d'un régime unilatéral de travail. Ce régime s'appuie sur un accord signé par une organisation syndicale ; accord qui n'a pu être validé, la représentativité de l'organisation syndicale signataire étant inférieure à 30%.

La compagnie HOP!, en application des dispositions du code de l'aviation civile et notamment son article D422-6, a demandé la validation à la DGAC de ce régime de travail. Après vérification de sa validité règlementaire, tant d'un point de vue social, que de celui de la sécurité des vols, la DGAC a produit un arrêté autorisant son application.

Cette procédure, qui existe de longue date, a été récemment contestée par le SNPL devant le tribunal administratif, qui, saisi en référé, a débouté la demande de cette organisation. »

En effet, le SNPL a déposé un recours en référé auprès du tribunal administratif de Melun qui l'a rejeté. Mais le recours demeure sur le fond.

Le patron d'Air France se dit confiant

Ce mardi, devant les journalistes de l'association des journalistes de l'aéronautique et de l'espace (AJPAE), Franck Terner, le directeur général d'Air France s'est montré très ferme et « confiant ».

« Si nous ne signons pas d'ici au 1er décembre, nous avons l'autorisation de passer les règles d'utilisation des pilotes de manière unilatérale. Je souhaite évidemment que nous arrivions à trouver un accord. Nous avons envoyé à la DGAC le dernier texte soumis à signature. Il n'y a pas beaucoup de points d'écart. Je suis confiant [...]. »

Ce bras de fer sur les accords d'entreprise se double chez HOP d'un problème de gestion des pilotes qui veulent être embauchés chez Air France en raison d'un accord signé dans le passé qui autorisait de telles passerelles en cas d'embauches chez Air France. Ce qui est le cas aujourd'hui. Or, ces départs pour Air France déstabilisent HOP.