"TGV du futur" de la SNCF : un méga contrat pour Alstom à 3 milliards d'euros

Par latribune.fr  |   |  777  mots
Dix des 12 sites français d'Alstom (dont l'usine de Belfort), avec qui le partenariat pour l'élaboration de ce "TGV du futur" a commencé en 2016, participeront au développement et à sa fabrication. (Crédits : Alstom)
La SNCF a validé l'octroi à Alstom d'un contrat de 3 milliards d'euros portant sur une centaine de "TGV du futur", une commande cruciale pour le constructeur ferroviaire français en passe de passer sous le contrôle de l'allemand Siemens. L'usine de Belfort renfloue quant à elle son carnet de commandes : elle produira 20 motrices par an, pendant une décennie. Mais gare aux déficits pour l'entreprise publique, qui deviendra une société anonyme dans deux ans.

Ce méga-contrat est une véritable bouffée d'oxygène pour Alstom. Guillaume Pépy, le Pdg de la SNCF, a annoncé ce 27 juillet que son conseil d'administration avait approuvé la commande ferme de 100 TGV de nouvelle génération pour un montant de près de 3 milliards d'euros, et a confirmé l'attribution à Alstom, en passe de passer sous le contrôle de l'allemand Siemens.

L'entreprise publique espère une mise en circulation de ces "TGV du futur" à partir de 2023, avec des livraisons échelonnées jusqu'en 2033. Ces rames circuleront sur tout le territoire.

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L'usine de Belfort produira 20 motrices par an, pendant une décennie

Dix des 12 sites français d'Alstom, avec qui le partenariat pour l'élaboration de ce "TGV du futur" a commencé en 2016, participeront au développement et à sa fabrication.

Ce projet générera "4.000 emplois pendant dix ans dans la filière ferroviaire chez Alstom et chez ses fournisseurs" s'est empressé de souligner Guillaume Pépy sur l'antenne de RTL.

Ce contrat est, en effet, crucial pour l'avenir des usines françaises du constructeur ferroviaire qui est en train de passer sous le giron de l'allemand Siemens. Depuis l'annonce du rapprochement des deux structures en septembre dernier - qui a d'ailleurs fait couler beaucoup d'encre -, et plus encore, du vote à une écrasante majorité des actionnaires d'Alstom, début juillet, en faveur de cette fusion, certains sites étaient particulièrement menacés. C'est le cas notamment pour Belfort dont les commandes de TGV assuraient jusqu'ici de l'activité pour les salariés seulement jusqu'en septembre 2019. Alstom y emploie 460 salariés.

Grâce à ce méga-contrat, l'usine sera responsable de la fabrication de 20 motrices par an pendant une décennieLes "premiers sous-ensembles seront produits à partir de mi-2020, ce qui assurera de la charge au site" de Belfort, a indiqué un porte-parole d'Alstom à l'AFP.

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À la Rochelle, on se réjouit (mais pas trop non plus)

Si, dans les colonnes de Sud Ouest, Fabrice Cotrel, délégué syndicat FO à l'usine d'Alstom d'Aytré (près de La Rochelle), a réagi positivement à cette méga commande passée par la SNCF, il reste néanmoins sur ses gardes.

"La bonne nouvelle, c'est que cela nous donne une visibilité d'environ 10 ans en termes de production et de travail (...) Mais la fabrication de ces trains du futur ne débutera à Aytré qu'en 2021 et, comme nous l'annonçons depuis de longs mois, cette bonne nouvelle ne comblera pas le creux de charge entre septembre 2019 et 2021".

Ce qu'espère l'intersyndicale est la commande de renouvellement de 10 à 15 rames actuelles des fameux Duplex pour combler ce creux de charge.

Un "TGV du futur" plus écolo

Mais qu'appelle-t-on par "TGV du futur" ? Par rapport aux rames actuelles, la consommation d'énergie y serait réduite de 20%, le matériel recyclable à 97% et le bilan carbone amélioré de 37%. Le groupe précise aussi que ce train pourra accueillir jusqu'à 740 passagers, soit 20% de places en plus que dans les rames duplex qui roulent depuis 1995. "On en a beaucoup plus pour moins cher", a renchéri Guillaume Pépy. Le nouveau TGV serait également modulable, avec des fauteuils montés sur des rails. Soit.

L'objectif pour la SNCF est clair : accueillir 25 millions de clients en plus des 100 millions qu'elle accueille chaque année dans ses TGV.

Une "équation économique compliquée" pour la SNCF

Du côté des syndicats de cheminots, l'Unsa ferroviaire s'est demandé si cette commande était "vraiment une priorité" pour une SNCF "sans hausse générale des salaires" depuis quatre ans. Avec ces nouveaux TGV, "on creuse la dette de la SNCF", a aussi critiqué SUD-Rail.

Guillaume Durant, responsable du secteur ferroviaire au cabinet de conseil Wavestone, souligne auprès de l'AFP qu'il s'agit d'une "équation économique compliquée pour la SNCF", rappelant que "ses budgets sont limités".

"Dans un contexte économique un peu tendu avec les grèves, il faut investir dans les TGV car la concurrence arrive", a-t-il expliqué, "mais il faut aussi maintenir les infrastructures, ça fait plusieurs fronts assez stratégiques à gérer."

Cette situation est d'autant plus délicate que, dans le cadre de la réforme de la SNCF promulguée fin juin après plusieurs mois de grèves et de débats parlementaires, l'exploitant ferroviaire va devenir une société anonyme et non plus un établissement public à caractère industriel et commercial (Epic). Cela signifie donc qu'avec ce nouveau statut, la SNCF ne pourra plus faire de déficit. "Si elle en fait, l'État ne pourra pas rembourser" précise Guillaume Durant.

(avec AFP et Reuters)