Transavia : des pilotes entrent dans la danse et déposent un préavis de grève de 6 semaines

Par Fabrice Gliszczynski  |   |  1110  mots
(Crédits : Paul Hanna)
Contestant le fond et la forme de l'accord de développement de la filiale low-cost d'Air France trouvé en juillet par la direction et le SNPL Air France, le SPL de Transavia (affilié à la CFDT) a déposé un préavis de grève dure du 1er septembre au 15 octobre.

Et maintenant des pilotes. Alors qu'une partie des hôtesses et stewards de Transavia sont en grève depuis le 16 août à l'appel de la CGT, le SPL, le syndicat des pilotes de ligne de la filiale low-cost d'Air France (affilié à la CFDT) a, selon nos informations, déposé à son tour un préavis de grève dure. Envoyé le 16 août à la direction de Transavia et d'Air France, il s'étale en effet sur six semaines, du 1er septembre (minuit) au 15 octobre (23h59). Des dates qui permettront néanmoins aux Aoûtiens de revenir de vacances sans encombre.

Accord en juillet

Le SPL dénonce le projet d'accord conclu en juillet entre la direction d'Air France et le SNPL (le syndicat national des pilotes de ligne) d'Air France, majoritaire, sur les conditions du développement de Transavia. Approuvé par les pilotes du SNPL Air France à l'occasion d'un référendum, cet accord lève le plafonnement de la flotte à 40 avions acté dans un accord signé en décembre 2014, après une grève de 14 jours en septembre.

Comme c'est le cas depuis cinq ans, le développement de Transavia sera assuré avec des pilotes détachés d'Air France. Ces derniers resteront donc des salariés d'Air France mais seront soumis aux règles d'utilisation chez Transavia, plus sévères qu'à Air France.  Et le système de rémunération sera celui d'Air France.

"Inacceptable" pour le SPL Transavia

Comptant une grande partie des 79 pilotes "historiques" de Transavia (contre 350 détachés d'Air France), qui ont lancé la compagnie entre  2007 et 2014 sans venir d'Air France), le SPL Transavia rejette les termes de l'accord de développement de la compagnie, jugé "inacceptable" tant sur la forme qui autorise un syndicat d'une autre compagnie (le SNPL Air France) à décider des conditions de travail, de rémunération et de développement des pilotes de Transavia que sur le fond qui fait perdre aux pilotes historiques une partie de leur ancienneté (celle-ci ne commencerait qu'en 2014) et de leur séniorité.

 "Nous exigeons le strict respect des instances représentatives du personnel de Transavia et de ses syndicats représentatifs. La loi est claire, les règles de dialogue social ne peuvent être ainsi bafouées. Un tel accord ne peut être négocié sans les organisations syndicales de l'entreprise Transavia. Il n'est pas acceptable que des organisations syndicales extérieures viennent négocier notre avenir, nos conditions de travail, et nos rémunérations", déclare le SPL dans son courrier envoyé à la direction.

Déplorant avoir été tenu à l'écart des négociations, le syndicat demande "une égalité de traitement entre les pilotes historiques et les pilotes d'Air France", "la fin des clauses de périmètre" pour mettre en place "une véritable stratégie de développement", et dénonce pêle-mêle le manque de pilotes, l'impossibilité de recruter en dehors d'Air France, ou encore les multiples pannes d'avions en raison d'une maintenance peu "performante". Surtout, le SPL veut participer aux négociations sur le développement de Transavia

L'accord sur le développement de Transavia modifié

Car l'accord trouvé en juillet entre la direction et le SNPL sur le développement de Transavia n'a pas encore été signé. Il va même être modifié pour éviter un couac juridique. Dans un tract envoyé récemment à ses membres, le SNPL Air France indique que le professeur de droit Maître Lyon-Caen, sollicité, par ses soins, planche sur "une rédaction qui écarte tout risque de contentieux et satisfasse aux objectifs initiaux".

Le SPL Transavia regrette de ne pas être convié aux négociations.

Le risque de contentieux par les pilotes historiques de Transavia porte notamment sur l'abandon d'une partie de leur ancienneté. Selon le SNPL Air France, la direction de Transavia avait entamé des négociations sur une transaction financière avec les pilotes historiques pour éviter tout risque juridique. Celles-ci ont été arrêtées après une intervention du SNPL "au plus haut niveau".

Au SNPL Air France, le point de vue diverge. Si Transavia France existe aujourd'hui, elle le doit au SNPL Air France qui a signé en 2006 avec la direction un accord pour la création de cette compagnie à bas coûts. Son développement a depuis l'origine était encadré pour ne pas cannibaliser l'activité de la maison-mère, laquelle l'a d'ailleurs renflouée plusieurs fois depuis sa création.

Concernant l'accord de développement trouvé en juillet, un certain nombre de pilotes d'Air France considèrent que les pilotes de Transavia ont été mieux traités. Leur rémunération est censée augmenter tandis qu'elle sera gelée en 2020 pour les pilotes d'Air France. L'application à Transavia des règles de rémunération en vigueur à Air France permettrait une hausse de rémunération de 4 à 5% pour les commandants de bord et de 15% pour les copilotes en appliquant les règles d'ancienneté d'Air France. Soit une hausse de la masse salariale de Transavia de 7 à 8%.

"Les pilotes historiques de Transavia sont les grands gagnants de la négociation. D'une part parce que ce sont eux qui auront les plus fortes augmentations car ils étaient moins bien payés que les détachés d'Air France, et d'autre part parce que la majorité d'entre eux assurent des fonctions d'instructeurs et se verront à ce titre attribuer les règles d'Air France plus rémunératrices", explique un cadre du SNPL Air France.

 Le SPL réfute ces chiffres et parle au contraire d'une absence d'augmentation.

"Nous avons demandé les simulations de hausses de rémunération. Cela nous a été refusé. Quand nous faisons tourner les calculettes, nous ne voyons pas d'augmentation", assure Cyril Froment, délégué syndical du SPL Transavia..

La direction de Transavia regrette cet appel à la grève

La direction de Transavia "regrette cet appel à la grève alors que les discussions ont abouti à des avancées significatives pour tous les pilotes de Transavia France et que cet accord permettrait la création d'emplois au sein de l'entreprise".

Et d'ajouter :

"Les discussions sur le développement de Transavia France sont menées dans le cadre d'un projet d'accord de Groupe Pilotes négocié avec les syndicats représentatifs au niveau du groupe de pilotes Air France et Transavia France : le SNPL et le SPAF. La négociation d'un accord de Groupe est permise par la loi du 8 août 2016 relative au travail, à la modernisation du dialogue social et à la sécurisation des parcours professionnels, dite loi Travail ou loi El Khomri. L'ensemble des pilotes de Transavia est représenté dans les négociations au travers des syndicats représentatifs".