La voiture électrique en manque d'énergie

Par Rémy Janin  |   |  499  mots
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En l'état des technologies et de leurs performances, un développement massif est peu envisageable à court terme, selon le Conseil d'analyse stratégique.

Et si la voiture électrique n'était qu'une fausse bonne idée? C'est en tout cas ce que laisse implicitement entendre le rapport réalisé sous la houlette de l'ancien directeur général de l'énergie et des matières premières (DGEMP), Jean Syrota, et que vient de rendre public le Conseil d'analyse stratégique (CAS).

L'étude « La voiture de demain, carburant et électricité », très exhaustive et fouillée, ne se veut pas foncièrement anti-véhicules électriques. Elle leur reconnaît d'ailleurs quelques qualités. « Ils n'émettent pas de polluants, sont silencieux, ne consomment pas de pétrole », admet Jean Syrota. Mais immédiatement un bémol : « Selon le mix énergétique avec lequel est produite l'électricité, certains véhicules électriques émettent plus de CO2 que leurs cousins thermiques. » Un premier accroc dans la belle ouvrage suivi d'une douche de reproches : faible autonomie, encore diminuée par l'utilisation des phares la nuit, des essuie-glaces en cas de pluie ou du chauffage pendant les périodes froides, sans parler des incertitudes sur la durabilité des batteries, leur temps de rechargement voire pire, la propension de certains accus à l'inflammation.

Le rapport de la mission Syrota, dont « La Tribune » avait révélé dès mars les premières conclusions, aboutit à parier d'abord sur les véhicules hybrides (carburant + électricité) avant d'espérer voir se développer un marché de masse des voitures électriques.

Autonomie et prix

Il n'est pas le seul à tirer ce type de conclusions. Pour n'en citer qu'une parmi des dizaines d'autres, une étude de l'institut d'études économiques Xerfi n'évalue les ventes de voitures électriques en France, à l'horizon 2020, qu'à 2 % des immatriculations (« La Tribune » du 20 décembre 2010). Loin des 5 %, voire 10 %, prédits par certains opérateurs mais également par certains politiques qui brandissent le modèle électrique comme la panacée universelle censée trancher le noeud gordien de la pollution par les transports. Là encore, la prévision de Xerfi prend en compte les faiblesses bien identifiées des automobiles électriques : leur faible autonomie, leur prix d'achat prohibitif et, dans le droit fil du raisonnement développé par le rapport Syrota, la concurrence des motorisations hybrides ou traditionnelles de plus en plus performantes et de moins en moins gourmandes en carburant.

En dépit de ce cadre plutôt négatif, le véhicule électrique n'est pas mort-né. Dans un premier temps, il répond plutôt bien à tous les organismes publics comme privés possédant une flotte de véhicules aux trajets parfaitement déterminés et qui cherchent à diminuer leur empreinte carbone.

Besoins de masse

Le développement de parcs d'auto-partage comme le futur Autolib à Paris est également gage d'un « marché de niche » admet le rapport. Reste à savoir si, au-delà de ces marchés captifs, la voiture électrique saura faire face aux besoins d'un marché de masse. C'est la capacité à répondre à cette question qui déterminera le véritable avenir des voitures du XXIe siècle.