Entre Israël et la Palestine, c'est la guerre pour avoir accès à l'eau

Par Pascal Lacorie, à Jérusalem  |   |  495  mots
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Cette situation très particulière, dans une région du monde qui ne l'est pas moins, illustre bien la délicate gestion de ce "bien commun", surtout lorsque la ressource vient à manquer.

Israéliens et Palestiniens ne se disputent pas seulement des terres, mais aussi ce qu'il y a en dessous. Les principales nappes phréatiques utilisées par les deux populations se moquent en effet des frontières. Elles s'étendent sous la Cisjordanie et le territoire israélien. Pour leur partage, les Palestiniens estiment être victimes d'un rapport de forces qui leur est défavorable. Ils accusent l'Etat hébreu d'exercer une mainmise totale sur les ressources en eau, notamment au profit des quelque 300.000 colons israéliens installés en Cisjordanie.

Dans la bande de Gaza, contrôlée par les islamistes du Hamas, la situation est encore pire. Plus de 90 % de l'eau tirée de la nappe phréatique trop salée sont impropres à la consommation humaine, selon un rapport de la Banque Mondiale. La situation est telle qu'Israël doit fournir une partie de l'eau consommée par les 1,6 million d'habitants d'une région où la densité de la population est une des plus élevée au monde.

Une solution consisterait à imiter les Israéliens et construire une usine de dessalement. Un projet de ce genre a été lancé avec le soutien de la France qui a promis de verser 10 millions d'euros une fois que les études auront confirmé sa faisabilité. Mais dans ce cas aussi, les arrières pensées politiques et sécuritaires ne sont jamais loin. Durant les périodes d'affrontements avec les groupes armés palestiniens, l'armée israélienne a dans le passé détruit des infrastructures vitales pour répliquer à des attentats ou des tirs de roquettes. Rien ne dit qu'une telle usine de dessalement serait épargnée en cas de nouvelles guerres.

Le marché noir de l'eau

En Cisjordanie, les deux parties se livrent à une guerre de statistiques. Les Palestiniens, soutenus par des organisations humanitaires et l'ONU, affirment qu'Israël les a réduits à la portion congrue dans la répartition des ressources, tout en refusant la moindre gestion commune, rendant ainsi pratiquement impossible la création d'un Etat palestinien viable.

Sur le terrain, des dizaines de localités et de villages palestiniens sont privés d'eau courante et les agriculteurs se plaignent d'une pénurie organisée. En été, de nombreux Palestiniens sont contraints d'acheter de l'eau au marché noir à des prix prohibitifs. Dans un rapport d'information pour la Commission des Affaires étrangères de l'Assemblée nationale, le député (PS), Jean Glavany, avait estimé que la question de l'eau est "révélatrice d'un nouvel apartheid au Moyen Orient".

Les responsables israéliens s'étaient déclarés « indignés » par cette assimilation, et avaient rappelé en retour que l'Etat hébreu fournit aux Palestiniens des quotas d'eau bien supérieurs à ceux prévus par les accords d'autonomie conclus avec eux en 1995. Les experts israéliens accusent par ailleurs les Palestiniens de refuser le traitement des eaux usés et de creuser des puits sauvages qui épuisent et polluent les nappes phréatiques.