François Hollande change tout pour ne rien changer

Par Ivan Best  |   |  624  mots
François Hollande va changer son gouvernement. Mais il ne peut amender sérieusement sa politique économique.

Une claque, une gifle… ces mots, revenus ad nauseam dans les commentaires journalistiques sur les municipales décrivent évidemment une réalité, celle d'une sanction subie par le Parti socialiste, plus que confirmée ce dimanche 30 mars lors du deuxième tour. De nombreux sympathisants socialistes n'ont pas voulu trouver le chemin de leur bureau de vote, contribuant largement à l'abstention record. Les messages lancés par l'exécutif dans l'entre deux tours - nous avons entendu le mécontentement, il y aura un geste fiscal en faveur des ménages- n'ont pas convaincu outre mesure cet électorat de gauche déçu par François Hollande. Pour la simple raison que cette « annonce » était à côté de la plaque. Tout comme pourrait l'être le changement du gouvernement.

La déception du « peuple de gauche », notamment des quelque 5 millions de fonctionnaires dont la majorité penche en faveur du PS, vient plutôt d'une  politique qui est loin de le favoriser. Une politique qui n'a pas quasiment pas changé, d'un gouvernement à l'autre. Alors que François Hollande avait fait toute sa campagne sur le thème du changement -c'est maintenant.

Rigueur salariale et suppression de postes dans de nombreux ministères

Une politique faite de rigueur salariale - le point d'indice qui détermine les traitements des agents publics est resté gelé depuis 2010- et de suppressions de postes dans la plupart des ministères. Certes, c'en est fini du un sur deux -un fonctionnaire d'Etat sur deux partant en retraite n'était pas remplacé, sous Sarkozy, le nombre global de fonctionnaires étant désormais stabilisé-, mais hors éducation nationale, rien ne change : les suppressions de postes perdurent. Il en va de même dans les hôpitaux, et aussi, c'est nouveau, dans les collectivités locales, soumises à une rigueur jamais vue.

François Hollande n'avait certes pas promis de massives embauches dans la fonction publique. Mais, en annonçant l'abandon de la Révision générale des politiques publiques, mise en place par Nicolas Sarkozy, et vilipendée par les syndicats de fonctionnaires, il avait fait naître un véritable espoir de changement. Or, c'est tout le contraire qui se produit : les politiques menées sous Sarkozy sont dans beaucoup d'endroit confirmées, voire amplifiées.

La déception du peuple de gauche

La déception est donc immense, au sein de cette base du "peuple de gauche". Et ce n'est pas la confirmation du pacte de stabilité et ses 50 milliards d'euros d'économies dans la dépense publique qui vont renverser la tendance.

Adoucir le rythme de ces économies, une solution ? Cela ne risque de ne pas être à la hauteur. D'autant que ce sera difficile à négocier à Bruxelles : le gouvernement devra bientôt présenter à la commission européenne son programme de redressement des finances publiques pour les trois années à venir.

De fait, François Hollande est coincé entre, d'une part,  l'Europe, qui lui dicte largement sa politique économique -de la baisse des déficits publics à la hausse de la TVA pour financer des baisses de charges-  à travers des traités on ne peut plus contraignants et la pression bruxello-allemande, et, d'autre part,  un électorat qui ne veut plus de cette rigueur, et qui avait voulu croire en la renégociation de ces traités promise par François Hollande.

"On ne change pas continuellement de politique" a affirmé ce dimanche soir le ministre du Travail, Michel Sapin. De fait, par delà le remaniement, même important, le changement, ce n'est toujours pas pour maintenant. Le pacte de responsabilité sera soumis aux députés en avril, comme prévu. Il s'agira de convaincre une partie de la majorité, qui risque de se montrer de plus en plus récalcitrante.