La guerre à la dette

Par Bruno Jeudy  |   |  559  mots
Bruno Jeudy (Crédits : DR)
ÉDITO - Retrouvez l'éditorial de Bruno Jeudy, directeur délégué de La Tribune Dimanche.

Après sept années passées au ministère des Finances à dépenser sans compter, Bruno
Le Maire sonne le tocsin. La guerre à la dette est déclarée. Tant mieux. À l'offensive dans les médias, le patron de Bercy use de formules chocs - 
« l'État n'est pas une pompe à fric » - pour réveiller l'opinion. Ce n'est pas gagné, même si notre sondage révèle qu'un Français sur cinq considère la dette comme une des préoccupations majeures, davantage que le chômage notamment. Les Français se sont habitués à cette drogue douce du « quoi qu'il en coûte ». Formule magique inventée, à juste raison, par Emmanuel Macron pour protéger le pouvoir d'achat des Français et préserver les entreprises pendant le Covid. C'était il y a quatre ans, presque jour pour jour. Problème : on a mis autant de temps pour en sortir. Le président de la République ayant décidé de prolonger ce recours à la facilité pour amortir successivement la crise inflationniste, la crise énergétique, la baisse du pouvoir d'achat, etc.

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Le ministre des Finances a fini par faire sienne la phrase du gaulliste Philippe Séguin : « Ce n'est pas parce que les caisses sont vides qu'elles sont inépuisables... » Il lui reste à convertir son chef à l'Élysée, qualifié de « président le plus dépensier de la Ve » par Gérard Larcher. Vachard, le constat du président du Sénat se vérifie encore avec la seule addition du dernier mois. Le chef de l'État a dépensé 4 milliards : 500 millions pour les hôpitaux ; 400 pour les agriculteurs ; 120 pour le logement d'urgence et 3 milliards pour soutenir l'Ukraine. Des priorités sans doute incontestables. Le prix de la liberté et de la démocratie contre l'autoritarisme de Poutine ne souffre pas de discussion.

Mais avec une dette proche des 3 000 milliards, en hausse de 800 milliards depuis son accession au pouvoir, Emmanuel Macron n'a plus le choix sous peine de voir la note de la France dégradée par les agences de notation d'ici à l'été. Ce qui serait du plus mauvais effet au moment où il tente de convaincre nos partenaires européens d'envoyer des troupes en Ukraine. Rabelais, dans Gargantua, a tout dit : « La guerre faite sans bonne provision d'argent n'a qu'un soupirail de vigueur. Les nerfs des batailles sont pécunes. » Emmanuel Macron devrait méditer la formule.

À moins d'un changement de doctrine, le pouvoir n'augmentera pas les impôts, y compris ceux des plus riches comme le réclament certaines voix jusque dans le camp macroniste. La seule solution passe donc par une sérieuse cure d'amaigrissement du train de vie de l'État, comme le suggère le patron du Medef à notre journal. Patrick Martin réclame un arrêt des embauches de fonctionnaires, qu'il évalue à 60 000 postes supplémentaires en 2023. Le montant de la dette fera aussi partie de l'héritage de ce président qui ne pourra pas se représenter en 2027.

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