Changeons vite le système d'attribution des logements sociaux !

Par Daniel Biard*  |   |  610  mots
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Face au manque criant de transparence dans les attributions de logements sociaux, Daniel Biard, président d'un organisme HLM, attend avec impatience que le projet de loi de la ministre du Logement Cécile Duflot, censé clarifier la situation, soit adopté.

Sur les 450.000 familles qui sont accueillies chaque année dans le parc du logement social français, 92% sont satisfaites de leur logement, selon le dernier baromètre sur l'image du logement social réalisé par l'Union sociale pour l'habitat (USH). Seul point noir, les conditions d'attribution qui, selon ce baromètre, mécontentent 59 % des Français. Il faut dire que plus d'un million de demandes restent insatisfaites, suscitant les frustrations et plaçant en situation plus difficile nos concitoyens les plus fragiles.
Les bailleurs sociaux, supposés régner en maître tout puissant sur le mécanisme des attributions, sont en première ligne et souvent pointés du doigt. Il est vrai que le patrimoine est sous leur responsabilité. Logiquement, les Français considèrent que leur principale activité consiste à gérer ces logements, et à les attribuer.

Un mécanisme d'attribution indigeste
C'est oublier ou ignorer le principe du "mille-feuille" qui, en France, régit le mécanisme d'attributions et contribue à le rendre proprement indigeste voire totalement obscur au demandeur, entrouvrant la porte au soupçon. Plusieurs acteurs (maires, préfet, régions, entreprises...) ont leur mot à dire avec un quota de logements réservés. La Commission d'attribution, composée des représentants des locataires, du bailleur, des représentants du maire et, parfois, du préfet, entérine in fine (ou pas) les choix qui lui sont proposés selon une procédure bien codifiée.
Dans un pays où le dispositif du logement social est l'un des plus organisé et consistant d'Europe (5 millions des 27 millions de logement sociaux dans l'Union se trouvent en France), ce mécanisme d'attribution peut paraître imparfait. Il possède néanmoins la qualité indéniable d'être collectif et codifié.
La décision se prend en concertation, sur la base de critères motivés relatifs au patrimoine, à la composition du ménage, à son niveau de ressources, aux conditions de son logement actuel, à l'éloignement du lieu de travail, à la proximité d'équipement correspondant à ses besoins et au caractère d'urgence de sa demande. Une pesée subtile mais probablement discutable puisqu'il s'agit d'hommes, de femmes, et d'enfants en situation délicate, dans un marché de pénurie générale du logement. Faut-il rappeler que, selon l'Ush, un tiers des ménages du parc HLM, soit 1,5 million de ménages, vit sous le seuil de pauvreté ?

Placer le demandeur au coeur du mécanisme d'attribution
Un dispositif qui permettrait davantage de lisibilité, de transparence, d'efficacité dans les attributions de logements sociaux, irait dans le bon sens ! Il placerait le demandeur au c?ur du mécanisme d'attribution. Comme le font déjà avec succès les Britanniques, les Canadiens, les Néerlandais avec la mise en place d'un accès unique, moderne (Internet) permettant d'accélérer et de fluidifier le traitement des demandes, tout en en garantissant une réponse adaptée.
Le projet de réforme des attributions proposé par la ministre de l'Egalité des territoires et du Logement et le ministre de la Ville, qui sera déposé en juillet au Parlement est une chance.
Sa force étant de répondre au défaut d'information du mécanisme actuel en offrant au demandeur la possibilité de connaitre - enfin - la situation de sa demande.
Son succès sera d'autant plus important, qu'il associera les maires et les bailleurs au plus près du mécanisme de décision : ces acteurs partageant la connaissance du terrain indispensable à l'attribution.
 
*Daniel Biard est président du comité éxécutif du Groupe Polylogis et membre du bureau de la Fédération des entreprises sociales pour l'habitat (ESH)