PSA - DongFeng : et si les Chinois n'étaient pas d'accord

Par Jean-François Dufour  |   |  521  mots
Jean-François Dufour, président de Chine-Analyse. | DR
Si l’hypothèse d’une entrée du groupe DongFeng au capital de PSA émeut en France, elle pourrait provoquer des débats aussi côté chinois. Selon, Jean-François Dufour, président de Chine-Analyse, c'est le pouvoir politique à Pékin qui devrait avoir le dernier mot... Explications.

Très éclatée, avec quinze constructeurs produisant chacun plus de 100.000 véhicules par an, l'industrie automobile chinoise est destinée à une restructuration dans les années à venir. Dans ce contexte, les alliances internationales susceptibles de générer des transferts de technologies - c'est-à-dire allant au-delà des simples coentreprises d'assemblage dans lesquelles tous les grands groupes étrangers sont impliqués - sont un argument décisif de positionnement pour les constructeurs automobiles chinois.

Course au positionnement

Dans ce contexte, prendre une part significative du capital de PSA représente un enjeu stratégique majeur pour DongFeng, qui fait partie de la demi-douzaine de grands groupes autour desquels la restructuration est appelée à s'effectuer.

Il s'agit pour le constructeur basé à Wuhan (Hubei) de ne pas se laisser distancer par SAIC (Shanghai Auto), le numéro un chinois, pionnier des acquisitions de savoir-faire étranger (avec notamment le rachat des technologies du britannique MG Rover dès 2005). Ou par BAIC (Beijing Auto), un des cinq autres « Majors », avec lequel l'allemand Daimler a confirmé, il y a quelques semaines, un projet d'acquisitions croisées de capital.

Le(s) dossier(s) DongFeng

Mais ces concurrents, précisément, et plus encore les autres « Majors » moins avancés en termes de partenariats internationaux (les groupes FAW, ChangAn et GAIG), ne verraient de toute évidence pas d'un bon œil la perspective d'un renforcement décisif de DongFeng sur le créneau des voitures. Et ils disposent d'arguments pour plaider leur cause auprès du gouvernement chinois.

DongFeng a en effet déjà enregistré en 2013 une avancée décisive sur un autre créneau : celui des poids lourds, où une alliance avec le suédois Volvo Trucks l'a virtuellement propulsé au premier rang mondial. Par ailleurs, dans le paysage complexe des coentreprises, le groupe de Wuhan détient le record du nombre de partenariats, opérant des usines avec pas moins de cinq constructeurs étrangers (PSA, Nissan, Honda, Kia et le taiwanais Yulong) - sans compter le partenariat évoqué avec Volvo Trucks, ni la coentreprise dont l'approbation a été demandée avec Renault.

Négociations et arbitrage

La précédente grande acquisition dans l'automobile - celle de Volvo Auto par le groupe Geely, en 2010 - était plus simple à gérer pour Beijing. Geely n'est en effet pas un des « Majors » de l'automobile chinoise, et a vocation à terme à être absorbé par un de ceux-ci. L'opération était dès lors plus neutre.

L'hypothèse DongFeng - PSA est différente, parce qu'elle signifierait un soutien explicite à l'un des groupes susceptibles de mener l'industrie automobile nationale, avec toutes les implications politiques locales que cela induit. Il ne fait dès lors guère de doute que les négociations vont bon train aujourd'hui à Beijing, autour des ministères et commissions concernés par l'opération. Et qu'elles impliquent non seulement les grands constructeurs automobiles chinois, mais aussi les autorités des régions où ils sont implantés.

Ce n'est que lorsque le gouvernement chinois, dont l'accord est incontournable, aura décidé d'un arbitrage, que l'on saura si le dossier DongFeng - PSA a des chances d'aboutir.