L'opportunité du cycle de vie du nucléaire

Par Laurence Daziano  |   |  552  mots
Laurence Daziano.
Le démantèlement et le traitement des déchets de nombre de centrales nucléaires en fin de vie opérationnelle en France et dans le monde posent des problèmes que peut résoudre la filiale française grâce à son expertise sur l'ensemble du cycle nucléaire. Par Laurence Daziano, maître de conférences en économie à Sciences Po et membre du Conseil scientifique de la Fondation pour l'innovation politique (Fondapol).

Avec la réforme de la filière nucléaire française, Orano, l'ex-Areva, s'est vu confié la gestion du cycle du combustible, en conservant les mines d'uranium en amont et le retraitement des déchets en aval, ainsi que l'activité de démantèlement des parties les plus sensibles des réacteurs. Orano se concentre désormais sur la vie du combustible.

Par ailleurs, la question du stockage des déchets nucléaires commence à se poser avec acuité alors qu'une partie importante du parc nucléaire français, exploité par EDF, doit organiser sa fin de vie dans des conditions de sûreté absolue.

Selon l'Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA), sur les 448 réacteurs nucléaires en activité dans le monde, plus de la moitié approchent de la fin de leur vie opérationnelle. La question du traitement des déchets nucléaires doit être traitée, notamment en France, avec les meilleures garanties pour trouver une solution pérenne, durable et sécurisée.

Assumer la responsabilité vis-à-vis des générations futures

Cette question mérite mieux qu'un débat idéologique. Que l'on soit pour ou contre l'énergie nucléaire, les faits sont « têtus » : les déchets existent. Ils sont issus de choix énergétiques faits par les générations antérieures et il revient aux décideurs actuels d'en assumer la responsabilité vis-à-vis des générations futures. Il convient de trouver une solution pour gérer dans la durée ces déchets, les sécuriser afin que les choix du passé pèsent le moins possible sur les générations futures.

C'est dans ce cadre que s'inscrit le projet CIGEO (centre industriel de stockage géologique) installé sur le site de Bure dans la Meuse qui viendrait prendre la relève du stockage terrestre actuel à La Hague (Manche) ou à Marcoule (Gard), à l'instar du projet parallèle d'Onkalo situé en Finlande à proximité de la centrale d'Olkiluoto. Le stockage géologique français et finlandais vise à emprisonner, à 500 mètres de fond, les déchets nucléaires. La construction débuterait à Bure vers 2025, pour un début de stockage à compter de 2035. Ce mode de stockage des déchets nucléaires, qui présente les meilleures garanties actuelles de sûreté, serait réversible pendant une période longue (plusieurs décennies) avant une fermeture définitive, ce qui permettrait, le cas échéant, de récupérer les déchets si de nouveaux modes de traitement apparaissaient avec les avancées technologiques.

Une expertise incomparable

Au-delà du projet de Bure, les groupes français disposent d'une expertise incomparable pour saisir leur chance sur un marché prometteur à l'export. La filière nucléaire française dispose de la maîtrise de l'ensemble de la chaîne allant de l'accès sécurisé aux zones contaminées, à la stabilisation des déchets et comprenant la caractérisation, la mesure, le tri, la séparation, le transport, et la décontamination. C'est cette expertise reconnue qui a permis à Orano de signer, en janvier dernier lors de la visite d'Emmanuel Macron en Chine, un préambule d'accord commercial avec le groupe China National Nuclear Corporation relatif à la construction d'une usine de traitement des combustibles nucléaires usagés pour une valeur de 10 milliards d'euros.