La dérive des énergies nouvelles : la preuve par l'exemple

Par Bjorn Lomborg  |   |  626  mots
Comment l'installation de panneaux solaires par Greenpeace dans un village indien a tourné au fiasco. Par Bjorn Lomborg, directeur du Copenhagen Consensus Center et professeur adjoint au Copenhagen Business School. Bjorn Lomborg commente chaque jour l'actualité de la COP21 pour La Tribune

Dans ce blog que j'alimente de la conférence sur le climat à Paris, j'ai critiqué les activistes et les participants pour leur fixation sur « l'aide climatique ». J'ai souligné que ce n'est pas ce dont les populations les plus pauvres du monde ont besoin, ni ce qu'elles souhaitent.
Il serait intéressant d'en voir un exemple réel. Vous en trouverez un sur le site web de Greenpeace, Dharnai Live. Avec des images de gens souriants en Inde et des vues aériennes prises par des drones de toits couverts de panneaux solaires, destinés à nous réconforter intérieurement. Après « 30 ans dans l'obscurité », comme le déclame le site, l'énergie verte vient à leur rescousse.
Mais voyons plutôt cet article du Scientific American qui nous ramène à une réalité moins grisante.

Dharnai, ou l'électricité solaire aléatoire

En 2014, sous le slogan « L'accès à l'énergie simplifié », Greenpeace a doté le village de Dharnai d'un système de micro-grilles alimenté par des panneaux solaires - un réseau électrique qui n'est pas connecté au réseau central de l'Inde. Selon le récit de Greenpeace, « Dharnai avait refusé de tomber dans le piège de l'industrie des énergies fossiles ». Cela s'apparente plutôt à une paraphrase très libre de ce que les gens qui vivent dans ce village souhaitaient pour eux-mêmes.
Une rétrospective en 2010 vous apprendra que les habitants de Dharnai ont collecté 640 euros dans l'espoir de pouvoir se payer un accès au réseau électrique, qui dans la majorité des cas en Inde est alimenté par des centrales à charbon. 4 ans plus tard, le village étant toujours sans électricité, Greenpeace a sauté sur l'occasion pour voler à leur rescousse avec un système solaire.

Trois  fois plus cher...

Le jour où l'électricité fut branchée dans le village, les batteries ont été vidées en quelques heures. Un garçon du village se souvient qu'il voulait faire ses devoirs tôt le matin avant de partir travailler dans les champs, mais il n'y avait pas assez d'électricité pour l'unique lampe de son foyer.
Aujourd'hui, l'électricité produite par ce système solaire coûte trois fois plus que celui du réseau central, et elle nécessite également l'usage d'ampoules économiques, qui coûtent 66 fois plus que les ampoules classiqueHeureusement pour les habitants de Dharnai - si ce n'est pour le récit de Greenpeace - le village est aujourd'hui branché au réseau central.
A l'époque, Greenpeace avait invité le Ministre en Chef de l'état à l'inauguration de l'installation solaire afin qu'il puisse rencontrer des habitants pleins de reconnaissance. Cependant, lorsqu'il est apparu en public, il a été accueilli par une grande foule portant des pancartes ou entonnant des chants pour réclamer « de la vraie électricité » (celle que l'on utilise pour alimenter sa cuisinière et son réfrigérateur, ou qui permet à vos enfants de faire leur devoir tôt le matin) et non « une fausse électricité » (c-à-d l'énergie solaire).

Après une semaine de protestations devant le ministre et les caméras des chaînes de télévision, un transformateur de 100-kWh a été installé, et Dharnai reçut de l'électricité moderne. Aujourd'hui, les deux tiers des ménages initialement bénéficiaires du projet de panneaux solaires ont choisi de ne plus y souscrire, et le reste s'en sert principalement comme solution de réserve lors des pannes du réseau central.

C'est une partie de l'histoire que Greenpeace ne vous dira pas - mais elle démontre la nécessité de s'interroger lorsque des gens bien-pensants nous disent qu'il faut pourvoir aux besoins énergétiques de chacun avec les technologies vertes inefficaces disponibles actuellement.
Traduit par Ninah Rahobisoa