Remboursement de la grève : dialogue de sourds entre la Région, la RATP et le Medef

Par Jean Liou, AFP  |   |  715  mots
(Crédits : Reuters)
Après un mois de grève, la présidente de l'autorité organisatrice Île-de-France Mobilités, Valérie Pécresse, a demandé un "geste commercial" à la la SNCF et la RATP. Cette dernière propose le co-financement avec l'autre opérateur et le versement des pénalités directement aux voyageurs. De son côté, le Medef Paris demande le remboursement de la contribution des entreprises de la capitale.

La présidente d'Île-de-France Mobilités (IDFM) Valérie Pécresse a engagé mercredi des négociations serrées avec les dirigeants de la RATP et de la SNCF pour obtenir le remboursement des abonnements de décembre, la grève ayant très fortement perturbé les transports publics dans la région.

"Les Franciliens depuis un mois ont vécu l'enfer (...) et la souffrance continue depuis la rentrée", a déploré Mme Pécresse, qui est aussi présidente de la région Île-de-France.

"Je souhaite que la SNCF et la RATP reconnaissent que le service minimum (...) n'a en général pas été réalisé, que sur beaucoup de lignes le service a été presque égal à zéro, qu'il y avait une hyper-saturation des lignes, qu'énormément de Franciliens ont dû marcher des heures pour aller au travail et beaucoup ont été en retard, beaucoup ont eu des surcoûts de garde d'enfants, des surcoûts de taxis...", a-t-elle indiqué. "Bref, je souhaite le remboursement du passe Navigo (l'abonnement mensuel, NDLR) intégral pour le mois de décembre, quelles que soient les lignes qu'ils ont empruntées".

Valérie Pécresse demande "un geste commercial"

Contractuellement, la SNCF est engagée avec Île-de-France Mobilités à faire circuler au moins un train de banlieue sur trois. La RATP, elle, a une obligation contractuelle de 50% aux heures de pointe (sur les RER A et B, le métro et le réseau de surface).

"Je ne veux pas rentrer dans des comptes d'apothicaires sur tel pourcentage, telle ligne... parce que ce n'est pas ce que les Franciliens ont vécu", a tranché Mme Pécresse avant de recevoir Catherine Guillouard et Jean-Pierre Farandou, les PDG de la RATP et de la SNCF.

Mme Pécresse demande donc "un geste commercial" avec le remboursement intégral des passes Navigo de décembre se montant selon elle à "200 millions d'euros". Deux tiers à la charge de la RATP, un tiers pour la SNCF, selon ses services.

La RATP propose le co-financement avec la SNCF

La RATP ne l'entend pas de cette oreille, estimant qu'elle a rempli ses obligations sur le réseau de surface (bus et trams) et en grande partie sur le RER -même si les véhicules, bondés, étaient souvent inaccessibles- depuis le début de la grève.

"Nous venons proposer à Valérie Pécresse le cofinancement avec évidemment l'autre opérateur qu'est la SNCF (...) d'un mois de passe Navigo. Nous souhaitons aussi que toutes les pénalités que nous allons verser soient directement versées aux voyageurs pour parvenir à boucler le financement", a déclaré Mme Guillouard avant la réunion.

"Île-de-France Mobilités n'a pas fait grève", lui avait répondu à l'avance Valérie Pécresse, rappelant que l'autorité régionale des transports était un "client" face à des "fournisseurs" de transport.

Côté SNCF, le directeur général de Transilien -la branche qui fait rouler les trains de banlieue- Alain Krakovitch s'était engagé avant même le conflit à dédommager les clients "sur chacune des lignes où le service minimum n'(a) pas été respecté".

Le Medef Paris demande le remboursement du versement transport

Pour compliquer les choses, le Medef Paris a demandé mercredi à Île-de-France Mobilités le remboursement de la contribution des entreprises parisiennes en mois de décembre, la grève des transports publics ayant "causé des pertes majeures de chiffre d'affaires pour les entreprises et empêché leurs salariés de venir travailler".

Appelée "versement transport", cette contribution destinée au financement des transports en commun concerne les entreprises d'au moins onze salariés. Supérieure aux recettes commerciales, elle se monte à 4 milliards d'euros par an en Île-de-France, auxquels il faut ajouter la prise en charge par les entreprises de 50% des abonnements de leurs salariés via le passe Navigo (près d'un milliard par an) selon le Medef.

"Il n'est pas raisonnable de faire peser sur les entreprises parisiennes le montant d'une taxe équivalente à presque 3% de leur masse salariale pour financer des transports qui ne circulent pas", a déclaré le président du Medef Paris Jean-Louis Schilansky, cité dans un communiqué.

"La demande du Medef est indécente", a répondu Valérie Pécresse via son porte-parole.