Covid-19 et contagion : vers une géolocalisation des smartphones en France ?

Par A. C.  |   |  765  mots
(Crédits : DR)
Un comité de douze chercheurs et médecins va être mis en place à l'Élysée à partir de ce mardi pour conseiller le gouvernement sur les moyens d'endiguer la propagation du coronavirus. Le numérique figure parmi les thèmes à l'étude, notamment pour identifier des personnes ayant été potentiellement exposées au virus. De nombreux pays ont déjà opté pour la géolocalisation des smartphones afin de traquer les déplacements des individus.

[Publié le 24/03 à 16h, mis à jour le 25/03 à 10h35]

Pour tenter d'endiguer la crise sanitaire en cours, l'Élysée a annoncé ce mardi la mise en place d'un comité chargé de conseiller le gouvernement sur le "backtracking", ces pratiques qui permettent d'identifier les personnes en contact avec celles infectées par le coronavirus. Ce Comité analyse recherche et expertise (CARE) sera composé de douze chercheurs et médecins.

Présidé par Francoise Barré-Sanoussi, virologiste à l'Institut Pasteur/Inserm, prix Nobel et découvreuse du virus du SIDA, il assurera "le suivi des études thérapeutiques autorisées en France et les essais engagés sur des traitements à l'étranger", mais aussi "la capacité à réaliser des tests", précise l'Élysée dans un communiqué. Le comité se penchera également sur "l'opportunité de la mise en place d'une stratégie numérique d'identification des personnes ayant été au contact de personnes infectées".

Frédérique Vidal, la ministre de la Recherche a réfuté en fin d'après-midi tout projet d'utilisation du numérique pour vérifier, par exemple, le respect des obligations de confinement. "On n'en est pas à ce stade-là", a déclaré la ministre de la Recherche à la presse à l'occasion de l'installation du comité Care. Elle a évoqué notamment la possibilité d'utiliser le numérique pour "aider en terme de logistique" et pour "être capable de prévoir" le nombre de patients guéris quittant les hôpitaux et les places de réanimation qui vont se libérer.

Reconstituer les déplacements des personnes contaminées

Alors que plus de 2,6 milliards de personnes dans le monde sont appelées à se confiner afin de limiter la propagation du virus, de nombreux États ont déjà pris des mesures drastiques de surveillance pour faire respecter les limitations de déplacements. C'est le cas de la Chine, de la Corée du Sud, d'Israël ou encore de la Russie et même l'Italie. Tous ont notamment déployé des systèmes de géolocalisation des smartphones. Le but : détecter et reconstituer les déplacements des personnes potentiellement contaminées pour repérer les populations susceptibles d'avoir été exposées au virus.

C'est par exemple le cas de la Lombardie, région la plus touchée par le coronavirus en Italie. Les autorités ont étudié les données mobiles fournies par les opérateurs depuis le 20 février, jour où le premier mort de Covid-19 a été annoncé dans une ville non loin de Milan. Résultat : seulement 60% de la population lombarde aurait respecté les mesures de confinement, selon des résultats communiqués la semaine dernière.

Lire aussi : Confinement et suivi de la contagion: faut-il craindre la surveillance des smartphones ?

Orange collabore déjà avec l'Inserm

En France, l'opérateur télécoms Orange a annoncé vendredi dernier travailler avec les chercheurs de l'Institut français de la recherche médicale (Inserm) sur l'exploitation de données de géolocalisation anonymisées afin de mieux suivre les mouvements de la population dans l'Hexagone pendant la pandémie.

"Nous travaillons actuellement avec l'Inserm et des préfectures afin de pouvoir alimenter sous quelques jours les autorités avec des indicateurs statistiques construits en toute conformité avec la réglementation sur les données personnelles", a indiqué Orange à l'AFP.

L'objectif est notamment d'évaluer les variations de population "avant confinement" et "après confinement", "ce qui aidera à mieux pré-dimensionner le système de soins", selon Orange. Les indicateurs pourront permettre également "d'estimer les mobilités par zone pour vérifier l'effectivité des mesures de confinement", a indiqué l'opérateur, qui précise qu'il s'agirait alors "d'évaluer la discipline collective, et d'adapter en conséquence, à l'échelon national ou local, les mesures prises". Enfin, ils permettraient "d'améliorer les estimations prévisionnelles épidémiologiques par zone", pour "adapter en temps réel le système de soin aux prévisions de nouveaux cas."

L'opérateur ne fournirait dans ce cadre "que des données agrégées", ne comportant aucune information sur l'identité, ni même sur l'âge ou le sexe des personnes concernées, a indiqué un porte-parole d'Orange à l'AFP. En effet, l'Union européenne encadre le déploiement de tels dispositifs grâce au RGPD (règlement sur la protection des données), entré en vigueur en mai 2018, et la directive e-privacy. Ces textes autorisent notamment le traitement de données de géolocalisation via les moyens de communications électroniques, à condition d'avoir obtenu au préalable soit le consentement explicite des personnes, soit l'anonymisation des données collectées.